Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du mardi 18 juillet 2017 à 16h30
Commission des affaires sociales

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Monsieur Taquet, vous avez évoqué le travail que je souhaite conduire en faveur de l'accès aux droits, de la simplification et de la lisibilité. J'ai entendu la critique de M. Dharréville, qui, avec raison, se disait frustré par le manque de précisions : je concède que, par moments, je souhaiterais moi-même être plus précise.

Mais il faut comprendre que, si ces sujets n'ont pas encore été traités, c'est qu'ils sont souvent techniquement complexes. Avant d'annoncer, au terme de deux mois, la façon dont nous allons procéder, nous avons besoin de travailler en concertation ; cela d'autant plus que je prône la co-construction.

La question des minima sociaux concerne la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), dans les territoires et les départements ; et je ne me vois pas exposer la façon dont je souhaite m'y prendre aujourd'hui, avant la concertation. Je dois rencontrer l'Assemblée des départements de France au mois de septembre afin de discuter de ces sujets. De son côté, la Conférences des territoires a été lancée hier, et le sujet y a été largement abordé. Je travaillerai donc cette question de septembre à décembre, à la fois avec la CNAF, car nous allons négocier la future convention d'objectifs et de gestion (Cog), ainsi qu'avec les départements. Au minimum, il nous faut un « Cloud » dans lequel les personnes pourront déposer les informations les concernant afin de ne pas avoir à répéter à chaque guichet leurs coordonnées, leur domicile – que d'ailleurs elles n'ont souvent pas, ce qui oblige à fixer un domicile administratif à des gens qui en sont dépourvus.

Ainsi, il existe un travail de simplification que je peux réaliser ; mais le versement social unique ou la fusion d'un certain nombre de minima doivent être débattus notamment dans le cadre de la discussion que nous aurons avec les départements sur la recentralisation du RSA, qui constitue un énorme budget de 500 millions d'euros pour le ministère.

Vous aurez donc plutôt la réponse au mois de décembre qu'aujourd'hui.

Madame Dubié, vous avez évoqué le PAERPA. Je vous livrerai à ce sujet un sentiment personnel : pour l'avoir connu au sein de la Haute Autorité de santé (HAS), j'ai été amenée à procéder à une forme d'évaluation ainsi qu'à produire beaucoup de documents d'accompagnement. Je pense que, dans ce pays, nous avons trop tendance à plaquer des dispositifs provenant de ministères sur des territoires qui sont tous différents.

Ainsi, les PAERPA fonctionnent très bien dans les Pays de la Loire, par exemple, où quelques aménagements ont été apportés, et où d'autres professionnels que ceux initialement prévus ont pu participer, parce que l'ARS a fait des efforts particuliers d'accompagnement. En revanche, dans certains territoires, aucune progression n'est constatée, et cet accompagnement personnalisé ne voit pas le jour.

Je pense que nous devons procéder autrement. C'est la raison pour laquelle je souhaite travailler en fixant des objectifs aux territoires, en proposant des financements permettant d'accompagner des expérimentations et des initiatives locales, et en demandant aux acteurs de rendre compte de leurs résultats, sans obligatoirement caler des organisations issues d'un bureau du ministère. Car je pense que cela ne marche plus.

À mes yeux, le PAERPA est un dispositif en cours d'évaluation, j'attends donc le résultat de cette évaluation nationale ; mais j'ai des doutes quant à son efficacité, et je ne pense pas qu'il ait atteint ses cibles. Faut-il le déployer en l'état, le simplifier, ou plutôt le rendre plus agile ? C'est peut-être cette question que nous devons nous poser de façon à ce que des acteurs différents puissent y participer afin de mieux accompagner nos personnes âgées.

Un plan est en cours d'élaboration pour lutter contre la maladie de Lyme, il est dirigé par le directeur général de la santé. Au sein de l'AHS nous avions constitué des groupes de travail. Un protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) était prévu ; un référentiel de prise en charge des patients atteints de la maladie de Lyme devait être rédigé, mais les acteurs associatifs se sont présentés avec leurs avocats. Cette situation a singulièrement compliqué la tâche, car un groupe de travail médical est avant tout destiné à écrire un référentiel fondé sur l'analyse de la littérature scientifique.

C'est pourquoi les travaux ont pris du retard : nous voulons bien travailler, mais dans un contexte scientifique rationnel ; en tout état de cause, ce PNDS devrait voir le jour à l'automne prochain.

Monsieur Véran, vous m'avez demandé mon avis sur le vapotage. Mon appréciation a évolué au fil du temps. Étant comme vous médecin hospitalier, je suis rarement dogmatique, j'ai plutôt tendance à consulter les analyses et la littérature. Il fut un temps où des études montraient que le vapotage réduisait le nombre de cigarettes fumées, mais ne permettait pas l'arrêt du tabac, or, en cancérologie, ce qui compte c'est d'arrêter de fumer, car la durée du tabagisme importe beaucoup plus que le nombre de cigarettes fumées.

Ainsi le vapotage n'apportait absolument pas le bénéfice qu'on en attendait en termes d'arrêt du tabac ; je ne me suis donc pas du tout battue pour que le vapotage soit favorisé ; nous avions par ailleurs de sérieux doutes quant à la qualité des produits utilisés. Je suis la littérature scientifique, et si l'on me montre que le vapotage est utile, je changerai éventuellement la façon dont il est encadré en France ; en fait, je n'ai pas d'avis personnel sur ce sujet.

Ainsi que vous l'avez dit, il est prévu que l'ONDAM soit de 2,3 % en moyenne lors du quinquennat, ce qui donnera un peu de visibilité aux acteurs. Aussi allons-nous essayer de maintenir cette proportion, ce qui implique impérativement des restructurations. Notre système de santé ne pourra pas survivre si nous ne restructurons pas l'offre hospitalière notamment, ce qui emporte la modification du mode de tarification. Tant que les hôpitaux ne seront pas tarifés à l'activité, nous aurons tendance à conserver des lits au sein de ces établissements, sans pouvoir les supprimer au profit de la médecine ambulatoire.

Monsieur le député, vous avez rendu un très bon rapport, dont je vais m'inspirer, dans lequel vous proposez des expérimentations de tarification au parcours. Là encore, pour avoir suivi cette question dès 2014 dans le cadre du Plan cancer, je puis affirmer que, si nous n'y parvenons pas, c'est que c'est extrêmement compliqué sur le plan juridique ainsi que sur celui de la modélisation de ce que peut être une tarification au parcours.

Ainsi, la transition d'un modèle à l'autre est techniquement très complexe. Aujourd'hui, et je suis d'accord avec vous, il faut passer par des expérimentations de terrain, et favoriser des initiatives locales avec des propositions afin de voir ce qui fonctionne dans les territoires, avant de faire le grand soir de la tarification, que nous ne savons pas faire actuellement, et qui est cependant indispensable.

Dès cette année, je vais continuer à travailler sur cette tarification hospitalière et j'espère pouvoir revenir vers vous avec des propositions dès l'année prochaine.

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