Monsieur le président, le Gouvernement a entrepris ce programme et donné comme conditions de sa réussite qu'il soit rythmé par des prises de décision régulières. D'ailleurs, deux mois après son lancement, il a fait l'objet, le 1er février, d'un premier comité interministériel de la transformation publique qui a ouvert des chantiers fondamentaux.
La rénovation du cadre des ressources humaines est un de ces grands chantiers interministériels. Vous avez évoqué la mobilité, les perspectives de carrière, le dialogue social, les rémunérations. Ce sont des sujets majeurs, des leviers pour réussir la transformation publique. Voilà pourquoi le Gouvernement a souhaité commencer par les chantiers transversaux avant d'entamer les champs ministériels. Ce seront donc bien ces comités interministériels qui rythmeront ce programme, à échéances régulières – le premier le 1er février, le prochain en avril.
Vous avez aussi posé la question de la doctrine d'emploi des 700 millions d'euros du programme de transformation de l'action publique. Le choix qui a été fait est de dédier cette enveloppe à l'accompagnement des transformations susceptibles de dégager des économies et d'améliorer la qualité du service. Cette enveloppe peut tout à fait servir à financer des projets de nature informatique parce qu'ils amènent assez classiquement des gains de productivité, parce qu'ils permettent de créer de nouveaux usages, de financer des mutualisations de services ou d'accompagner la réorganisation de services. Ce programme d'investissement a donc été conçu dans une acception extrêmement large.
Pour répondre à la question de M. le rapporteur général sur la procédure, nous avons lancé le premier appel à projets le 1er février, pour une sélection qui s'opérera au printemps. Les administrations et les opérateurs ont jusqu'à la mi-mars pour faire des propositions à la commission, qui est placée sous la présidence du ministre en charge de l'action et des comptes publics, et associe des représentants de l'administration ainsi que des personnalités qualifiées. Quant au comité de pilotage, il est en voie de constitution. Les critères d'éligibilité des projets et la nature de leur contenu sont relativement ouverts, de manière à permettre le plus grand nombre d'initiatives, l'objectif étant de dégager des économies durables et d'améliorer significativement la qualité du service. En ce qui concerne le fonds, il doit être réservé dans un premier temps à l'État et à ses opérateurs pour accompagner leur transformation.
Vous m'avez également interrogé, monsieur le rapporteur général, sur l'équilibre entre les réformes conjoncturelles et les réformes structurelles. Le Gouvernement a d'abord souhaité lancer le chantier des réformes structurelles, estimant qu'il ne pouvait y avoir de transformation pérenne si l'on ne crée pas les conditions qui permettent au service public de s'adapter aux attentes des usagers et des entreprises et à un processus de réforme de l'action publique qui, au bout du compte, comme le faisait observer votre président, est un exercice permanent. Il s'agit donc d'introduire de la souplesse dans le système pour lui permettre d'être plus réactif et de se transformer le plus rapidement possible.
Madame de Montchalin, je vous rejoins sur l'idée que l'ambition numérique ne peut se limiter à la dématérialisation des procédures administratives existantes. Si nous nous sommes fixé pour objectif d'avoir dématérialisé l'ensemble des procédures d'ici la fin du quinquennat, ce qui passe à la fois par l'identification de celles restant à dématérialiser et par la mise en place – Henri Verdier y reviendra – d'une « usine » de dématérialisation à l'usage des collectivités et des opérateurs, le véritable enjeu tient surtout à la transformation profonde des métiers de l'action publique. Je suis en effet persuadé que, grâce au numérique, on pourra résoudre l'équation entre la baisse du nombre d'agents publics et l'amélioration de la qualité du service. En d'autres termes, le numérique doit nous permettre d'imaginer un service public augmenté, c'est-à-dire enrichi de nouveaux services et davantage tourné vers les citoyens et les usagers.
Dans le domaine de la santé, par exemple, la transformation digitale, via notamment une meilleure exploitation des données, permettra demain d'améliorer significativement l'efficacité du système de soins, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives.
En matière d'action sociale, vous évoquiez la question du taux de recours : demain, un meilleur croisement et une meilleure mobilisation des données permettront de diminuer significativement le taux de recours et de dégager ainsi des marges pour réinvestir le champ de l'accompagnement des bénéficiaires de l'aide sociale. La simplification de la gestion administrative, qui mobilise beaucoup d'agents publics, sera autant de gagné pour renforcer la médiation sociale, l'accompagnement et le conseil. Dans cette perspective, le numérique nous ouvre, par rapport à ce que nous aurions pu faire il y a une dizaine d'années, d'immenses perspectives de progression : on a souvent tendance à se focaliser sur l'impact de la révolution numérique sur les réseaux bancaires ou la grande distribution, en négligeant ses effets sur le secteur public, qu'il est pourtant essentiel de prendre en compte pour faire évoluer les politiques publiques.
L'allocation unique fait partie des sujets que recouvre CAP 2022. Il est un peu tôt encore pour savoir ce que seront les propositions de CAP 2022 et du Gouvernement, mais l'on peut d'ores et déjà affirmer que le numérique représente, en termes d'accès au droit, une formidable chance de garantir l'effectivité de ces droits, ce qui est l'un des critères à l'aune desquels se juge l'efficacité de l'action publique.
L'organisation territoriale des services publics fait également l'objet d'une réflexion transversale. Le chantier, piloté par le secrétaire général du ministère de l'intérieur, est ouvert, et doit aboutir, à partir de concertations entre les experts de CAP 2022 et les collectivités territoriales, dans le cadre notamment de la Conférence nationale des territoires, à faire évoluer l'organisation territoriale de nos services publics, repensée en fonction de nouvelles formes de coopération entre les acteurs. À ce titre, le projet de loi « ESOC » offre de nouvelles perspectives, grâce notamment au dispositif de l'interlocuteur unique et à l'ensemble des mesures qui doivent contribuer à gommer les frontières entre les différentes administrations.
Monsieur Cazeneuve, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris votre question sur la transformation numérique dans les petites villes.