Intervention de Pierre-Yves Bournazel

Séance en hémicycle du jeudi 15 février 2018 à 15h00
Bonne application du régime d'asile européen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Yves Bournazel :

Nous devons répondre à des questions d'urgence. Nous avons aussi le devoir de travailler au niveau européen pour harmoniser nos législations, notamment sur le droit d'asile. Nous avons un autre devoir : ayons le courage et la lucidité de dire que la situation actuelle n'est rien comparée au défi qui nous attend dans les prochaines années ou les prochaines décennies.

Il faut donc s'attaquer structurellement à ce défi en traitant d'abord le cas de celles et ceux qui ont vocation à rester sur notre territoire et bénéficieront du droit d'asile. Ce qui les attend, c'est l'intégration. Quelle est notre politique en la matière ? Aujourd'hui, en France, nous posons-nous les bonnes questions ? Sommes-nous à la hauteur de ce défi en matière de langue ou d'acceptation de certains principes républicains : la liberté, l'égalité et la fraternité, mais aussi la laïcité ? Comment transmettre ces valeurs ? Comment transmettre notre langue et faire en sorte que ces personnes qui ont fui leur pays puissent connaître un nouveau destin et un avenir plus radieux ? L'intégration est une question essentielle. On ne peut pas l'évacuer d'un mot, car elle va revenir au coeur de nos politiques publiques.

Un autre enjeu structurel est la politique de coopération et de développement. Pour celles et ceux qui seront reconduits dans leur pays d'origine, il va falloir trouver des solutions, faute de quoi ces personnes reviendront et les problèmes se poseront de nouveau.

La politique de coopération et de développement demande une nouvelle stratégie de la part de la France comme de l'Europe. Cela suppose de chercher des investissements avec des partenaires privés pour permettre l'accès ici à l'eau, là à une alimentation durable, là-bas à l'école, à la formation, pour permettre aux populations de se développer par elles-mêmes avec notre soutien. Se désintéresser de leur sort, c'est se désintéresser du nôtre et de celui de l'humanité.

Vous pensez peut-être que je me suis éloigné de la proposition de M. Warsmann. À mon sens, si l'on n'a pas quelques principes et une vision un tant soit peu structurelle de ces enjeux, on pourra prendre toutes les décisions, on pourra voter toutes les propositions ou tous les projets de loi, les problèmes perdureront ou s'aggraveront dans les années ou les décennies qui viennent.

La proposition de notre excellent collègue M. Warsmann vise à permettre une meilleure application du régime d'asile européen, qui est essentielle.

C'est un enjeu majeur et une nécessité pour agir. Il faut en effet combler un vide juridique et tirer les conséquences des décisions de la Cour de justice de l'Union européenne et des juridictions françaises, qui ont fragilisé l'application du règlement Dublin et qui ont été confirmées la semaine dernière par un arrêt de la Cour de cassation. N'est-ce pas le signe qu'il est urgent pour les pouvoirs publics de remédier enfin à cette situation ?

L'objectif est de conjuguer, dans le respect des libertés fondamentales et des textes européens, la procédure de placement en rétention, indispensable d'un point de vue opérationnel, et la procédure de détermination de l'État responsable, qui constitue un élément central du droit européen de l'asile.

Modifiée en première lecture, la proposition de loi comprend désormais quatre articles qui visent respectivement à sécuriser le placement en rétention administrative des étrangers relevant du règlement Dublin, à exclure ce placement en rétention de manière concomitante à l'enregistrement d'une demande d'asile, mais à le permettre toutefois avant la notification d'une décision de transfert, et enfin à sécuriser les assignations à résidence des étrangers faisant l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire.

Nos collègues sénateurs n'ont pas dénaturé l'esprit du texte. Ils se sont au contraire montrés fidèles à sa raison d'être, qui est de combler les lacunes de notre droit. Ils ont voulu permettre la bonne application des procédures pour permettre à notre système d'asile de répondre aux exigences européennes en toute responsabilité et avec le sens de la solidarité, dans le respect des libertés fondamentales et dans la continuité de la tradition historique de l'accueil.

À Paris, en Île-de-France, comme à Calais ou dans les Alpes-Maritimes, de nombreux collègues confrontés aux mêmes difficultés éprouvent, au-delà de nos différentes appartenances politiques, la volonté, née d'un constat commun, de trouver des solutions concrètes.

Cette volonté de trouver des solutions, de pallier des manquements face aux évolutions des politiques migratoires, a guidé de travail de Jean-Luc Warsmann.

Avec votre permission, je salue en votre présence, madame la ministre, l'état d'esprit du ministre d'État, ministre de l'intérieur, Gérard Collomb, qui a montré sur ces dossiers complexes tant la volonté de dialoguer avec tous ses interlocuteurs qu'une détermination à agir en tenant compte des équilibres à ménager entre la dignité des personnes et la nécessaire fermeté.

Vous me permettrez, en tant qu'orateur du groupe UDI-Agir et indépendants, de saluer une nouvelle fois Jean-Luc Warsmann, notre excellent collègue, qui a travaillé avec sincérité et lucidité sur ce texte, et a su convaincre beaucoup de nos partenaires, dont certains de nos collègues ou des membres du Gouvernement, ce qui n'est pas rien.

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