Intervention de Stéphane Peu

Séance en hémicycle du jeudi 15 février 2018 à 15h00
Bonne application du régime d'asile européen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Je rappelle qu'à six reprises, depuis 2012, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour le placement en rétention de familles accompagnées d'enfants. Ces condamnations sont fondées sur l'interdiction des traitements inhumains et dégradants, ainsi que sur les droits à la liberté et à la sûreté et au respect de la vie familiale, protégés par la CEDH. Toute rétention d'étrangers mineurs aurait donc dû cesser, en métropole comme dans les territoires d'outre-mer. Au contraire, leur nombre a augmenté ! En métropole, il a plus que triplé, passant de 41 enfants en 2013 à 182 en 2016, l'augmentation étant de 70 % entre 2015 et 2016. À Mayotte, le phénomène est encore plus massif, avec 4 285 enfants en rétention sur un total de 20 000. Actuellement, et nous l'avons constaté, les placements en rétention administrative se poursuivent, sans que les enfants ne bénéficient de garanties suffisantes.

C'est la raison pour laquelle notre groupe a déposé une proposition de loi visant à interdire le placement en rétention administrative des enfants mineurs. L'intérêt de l'enfant doit systématiquement primer sur les conséquences de son origine étrangère. La jouissance des droits énoncés dans la Convention internationale des droits de l'enfant doit être accessible à tous les enfants, y compris les enfants de demandeurs d'asile, réfugiés ou migrants.

Pour conclure, nous voterons une nouvelle fois résolument contre ce texte qui banalise les restrictions à la liberté individuelle des demandeurs d'asile, y compris des enfants, et tend à dégrader leur situation à toutes les étapes de leurs parcours. Ce texte préfigure malheureusement le futur projet de loi, très répressif, sur l' asile et l'immigration, qui a été préparé sans concertation avec les associations – comme le dénonce la Coordination française pour le droit d'asile – et sans qu'aucune évaluation de la précédente réforme de 2015 n'ait été réalisée. Les associations sont vent debout contre cette réforme. Avec la grève qu'ils ont lancée mardi, les agents de la CNDA tirent également un signal d'alarme : ils dénoncent la logique comptable appliquée à l'asile, qui fait primer le raccourcissement des délais de jugement sur la qualité des décisions rendues.

En définitive, avec cette proposition de loi, vous voulez sécuriser le placement en rétention des demandeurs d'asile sous procédure Dublin quand nous souhaitons, au contraire, sécuriser leurs droits et les garanties qui leur sont apportées.

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