Intervention de Nicolas Hulot

Séance en hémicycle du jeudi 22 février 2018 à 15h00
Questions sur la stratégie de sortie du nucléaire

Nicolas Hulot, ministre d'état, ministre de la transition écologique et solidaire :

Madame Le Pen, il en va de l'énergie nucléaire comme de notre modèle agricole : saluons le service rendu dans un contexte précis et tenons un discours objectif. Néanmoins, les paramètres ont changé. Le nucléaire a eu ses vertus. Quant à l'indépendance énergétique, nous pouvons en débattre, mais tel n'est pas l'objet de cette séance de questions. Sommes-nous du reste certains, dans le contexte géopolitique actuel, de pouvoir sécuriser durablement notre approvisionnement en matériaux fissiles ?

Longtemps, on a exclu qu'un accident majeur puisse se produire dans un pays politiquement et économiquement stable. Après Tchernobyl, on a circonscrit cette éventualité à l'URSS, puis aux pays qui en sont issus. Après Fukushima, on a mis l'accent sur le tsunami à l'origine de l'accident. Je demeure réservé, mais il ne s'agit plus d'un débat dogmatique. En tout état de cause, on voit bien que nous ne contrôlons plus grand-chose dans la filière du nucléaire en matière économique.

A l'heure où nous parlons, j'ignore combien de sarcophages recouvrent la centrale de Tchernobyl et combien de centaines de milliers de mètres cubes de substances radioactives ont été déversés dans l'océan Pacifique depuis la côte du Japon, sans parler des centaines de milliers de personnes qui ont dû quitter définitivement leur logement.

Adoptons donc un discours plus mesuré. Je ne me livre ici à aucun procès : je dis que la sagesse minimale impose d'équilibrer la composition du mix énergétique, notamment en matière de production d'électricité. La filière nucléaire est très technique et soulève des problèmes d'acceptabilité sociale. Elle est très lourde. À l'heure où nous envisageons d'en sortir, nous découvrons la complexité d'une telle démarche. Elle fait en outre l'objet de nouvelles exigences de sûreté.

J'adopterai donc un discours plus prudent que le vôtre, madame Le Pen. Les arguments économiques sont successivement battus en brèche, d'autant plus que nous ne maîtrisons pas les coûts.

Quant aux énergies renouvelables, elles sont à présent bien plus matures qu'elles ne l'étaient auparavant. Porter à terme leur part dans le mix énergétique à 50 % permettra, me semble-t-il, de faire la démonstration – car je ne peux vous convaincre uniquement par des mots – qu'elles renforceront la souveraineté énergétique de la France, à laquelle je vous sais très attachée.

Elles en assureront également une à des pays moins puissants économiquement que la France, et constitueront donc un facteur d'équité à l'échelle mondiale. Il importe en particulier que l'Afrique – si vous me permettez cette brève digression – produise l'énergie qu'elle consomme dans le cadre de ses frontières, à partir des sources d'énergie gratuites que sont le vent, le soleil et la biomasse.

Il me semble que nous pouvons tous tomber d'accord qu'il ne faut pas mettre tous ses oeufs dans le même panier, ce qui en l'espèce consiste à viser l'objectif des 50 %. Je suis absolument convaincu que ce choix est valable socialement, écologiquement et économiquement. Le coût des énergies renouvelables diminue – c'est déjà le cas pour l'énergie solaire, et l'éolien, la biomasse et la géothermie devraient suivre. Elles emploient des technologies bien plus simples que la filière nucléaire et leur arrêt est bien plus facile que celui d'un réacteur nucléaire.

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