Intervention de Agnès Fontana

Réunion du jeudi 15 février 2018 à 14h35
Mission d'information sur le suivi des négociations liées au brexit et l'avenir des relations de l'union européenne et de la france avec le royaume-uni

Agnès Fontana, directrice de l'accueil, de l'accompagnement des étrangers et de la nationalité :

Je vous prie d'excuser Pierre-Antoine Molina, directeur général des étrangers en France, qui m'a chargée de le représenter.

Afin d'éviter les redites, ma présentation sera un peu moins structurée que je l'avais prévu : je me concentrerai surtout sur les questions qui ont été posées lors des interventions précédentes et sur les préoccupations exprimées par les représentants des associations.

Mme Bernard l'a souligné, tout est vraiment loin d'être réglé aujourd'hui en ce qui concerne le sort des citoyens britanniques présents en France et des citoyens français et européens résidant sur le sol britannique. Même si le rapport conjoint du 8 décembre dernier a permis de poser quelques jalons, l'incertitude reste la note dominante : il n'est malheureusement pas possible de répondre à toutes les questions et préoccupations.

Ce qui semble acquis est, au moins, la conservation des droits d'entrée et de séjour – et des droits liés, notamment pour les études et le travail – dont bénéficient des personnes ayant déjà résidé cinq années sur notre sol et disposant d'une carte de résident de longue durée Union européenne. Leurs droits devraient être préservés tout au long de leur vie. Il en est de même pour les conjoints qui n'auraient pas encore rejoint ces personnes, mais qui se seraient unis à elles avant la date du retrait britannique, et pour les enfants qui naîtraient de deux parents ayant le statut de résident permanent ou qui seraient confiés à la garde d'un parent en bénéficiant. La préservation de ces droits est un principe important.

Il se pourrait aussi – mais on reste là dans un état d'incertitude lié à la notion de période de transition dont Mme Bernard a fait état – que ces droits continuent à se cristalliser pendant la période de transition, si elle doit exister. Ceux qui n'auraient pas encore acquis des droits en mars 2019 pourraient continuer à le faire pendant la période de transition.

Se pose ensuite la question des personnes qui n'auraient pas encore de droit de résident permanent au titre de l'Union européenne en France et qui se trouveraient alors dans la situation des ressortissants de pays tiers. Mme Bernard a bien exposé les solutions qui pourraient être accessibles dans le cadre de l'AELE et de l'Espace économique européen. On peut aussi rappeler que la France est liée par des accords particuliers à un certain nombre d'États, avec qui elle entretient des relations particulières du fait de son histoire, notamment l'Algérie, la Tunisie et le Maroc : ces accords réservent un sort plus favorable aux résidents de ces pays qu'à ceux de pays tiers. À titre d'exemple, cela permet un accès plus rapide et plus facile à une carte de résident de longue durée, valable dix ans. Il est possible que la France choisisse de négocier avec le Royaume-Uni un accord particulier qui accorderait un sort plus favorable aux résidents britanniques.

En ce qui concerne les diplômes, nous disposons d'un centre ENIC-NARIC, comme tous les États européens. Ce centre est chargé de délivrer des attestations de comparabilité : le diplôme présenté par l'étranger est décrit selon le référentiel des diplômes français, ce qui permet à un futur employeur ou à un établissement d'enseignement de savoir à quoi cela correspond dans le système français. À proprement parler, il ne s'agit donc pas d'une équivalence, comme c'est le cas dans le système européen, mais d'une comparabilité. Néanmoins, cela peut rendre un premier niveau de service pour les diplômes acquis à l'étranger.

Pour ce qui est des droits liés à la citoyenneté, c'est-à-dire le droit de vote aux élections locales et européennes, ainsi que le droit de pétition et le droit d'occuper des postes dans la fonction publique ne correspondant pas à des fonctions régaliennes, il faut rappeler que ces droits sont attachés à la citoyenneté européenne. Celle-ci est une citoyenneté de superposition : elle n'existe pas en elle-même, mais elle se superpose aux citoyennetés des États de l'Union européenne. Cela empêche que des personnes n'ayant plus la citoyenneté européenne conservent ces droits : ils vont subir un sort distinct de celui des droits liés au séjour, qui pourront être conservés. Il est pratiquement certain que les Britanniques ne bénéficieront plus des droits liés à la citoyenneté européenne après le retrait du Royaume-Uni, même s'ils se trouvent en France sous le couvert d'un droit de séjour permanent.

Une solution est néanmoins possible à travers l'acquisition de la nationalité française. Elle est ouverte aux citoyens britanniques résidant en France, comme à tous les autres résidents. Nous avons déjà constaté une augmentation des demandes émanant des citoyens britanniques et de l'octroi de la citoyenneté française à ces derniers : entre la dernière année normale, qui est 2015, et 2017, les demandes ont été multipliées par un peu plus de 8, et l'octroi de la nationalité française par presque 5. L'écart ne signifie pas que l'on a moins accordé la nationalité française aux demandeurs britanniques : toutes les demandes ne sont pas encore parvenues au terme de leur instruction.

Je rappelle que le ministère de l'intérieur gère deux modalités principales d'accès à la nationalité française. La plus fréquente est la naturalisation par décret, qui concerne typiquement une personne installée en France depuis plus de cinq ans, qui travaille ou a des revenus autonomes et qui peut avoir constitué une famille et toute une série de liens sociaux et amicaux en France. On peut aussi accéder à la nationalité française par déclaration, essentiellement à raison d'un mariage avec un Français ou une Française.

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