(Interprétation de l'anglais.) Je commencerai par la question des GAFA, une préoccupation majeure. Il s'agit d'entreprises qui ont une position dominante sur le marché, génèrent beaucoup de bénéfices et en outre payent très peu d'impôts, en Europe et même ailleurs. Je suis très content de l'initiative française : il faut parvenir à une solution équitable en matière de fiscalité. Nous avons eu quelques échanges, avec M. Le Maire en particulier, pour voir quelle serait la meilleure manière d'aborder cette question. L'idée d'une taxe assise sur le chiffre d'affaires serait assez difficile à intégrer dans nos traités fiscaux. Il y a également la question de l'assiette consolidée pour l'impôt sur les sociétés, et celle des établissements permanents. Une première étape est d'examiner la répartition des bénéfices.
Nous pouvons essayer de pousser à la mise en oeuvre de cette solution structurelle, car nous pensons que c'est la meilleure approche, même si nous craignons qu'elle ne devienne la solution de long terme.
Si j'insiste sur l'approche structurelle, c'est parce que les GAFA ne sont pas les seuls concernés. Des multinationales paient moins d'impôts que les PME : ce n'est pas une situation équitable. C'est dû au fait que les systèmes européens d'imposition sur les sociétés sont dépassés. Ils datent de l'immédiat après-guerre, époque où la production se faisait encore dans des usines : nous savions où elle était localisée, nous connaissions l'origine des profits. Mais la mondialisation a tout changé. Des montages financiers peuvent être domiciliés n'importe où. Il est possible de placer ses droits de propriété intellectuelle où l'on veut. Les entreprises multinationales utilisent ces moyens pour échapper à l'impôt.
Nous travaillons donc avec des systèmes désuets, qui aboutissent à un environnement inéquitable et une taxation injuste. Cela doit changer.
L'ACCIS peut changer les règles du jeu. Actuellement, parce que les multinationales peuvent décider de la localisation de leurs profits et de l'administration à laquelle elles paient leurs impôts, les États sont soumis à une forte pression pour réduire les taux d'imposition des sociétés. Nous constatons cette tendance en France, aux Pays-Bas, en Belgique, pas seulement aux États-Unis. Nous devons changer les règles du jeu pour que ce soient les États qui décident où sont localisés les profits, et où sont payées les taxes. C'est un changement fondamental.
Ce n'est pas suffisant pour lutter contre l'évasion fiscale, et certains ont relevé qu'il existait des paradis fiscaux au sein de l'Union européenne comme au dehors. Il est très important de définir la notion de paradis fiscal et de déterminer notre politique à leur égard. L'Europe est une superpuissance économique qui agit parfois comme un nain politique. Nous devrions décider des règles sur la taxation appliquées par les autres systèmes juridiques. C'est pourquoi la liste noire et la liste grise des paradis fiscaux sont très importantes.
Au sein de l'Union, nous devons faire pression sur les pirates. Des pays, dont le mien, volent la base imposable des autres. C'est le jeu des Pays-Bas, de l'Irlande, du Luxembourg, et il ne prendra fin que si la France, l'Allemagne et les autres grands pays se lèvent et affirment qu'ils n'acceptent plus cela.
Nous avons besoin d'une coalition de grands États faisant pression sur les petits, mais nous devons aller de l'avant dans tous les cas. Nous ne pouvons pas attendre que deux États membres ne soient plus à bord. Pour changer les règles du jeu, nous devons pousser cette solution.
Il ne suffit pas de changer l'ACCIS, il faut décider de notre comportement avec les paradis fiscaux, décider des relations extérieures. Une proposition de la Commission au Parlement européen porte sur le changement des règles de TVA. Le problème est le même : c'est un système dépassé que nous devons changer.