Intervention de Florence Parly

Réunion du jeudi 8 février 2018 à 15h15
Commission de la défense nationale et des forces armées

Florence Parly, ministre des Armées :

Monsieur le président, Mesdames, Messieurs les députés, je veux, pour commencer, évoquer devant vous la mémoire des cinq serviteurs de la France qui sont morts en service le vendredi 2 février dernier, ainsi que celle des deux gendarmes qui sont également décédés dans l'exercice de leurs fonctions cette semaine. Leur disparition nous rappelle une chose : les armes de la France, ce sont avant tout des hommes et des femmes qui acceptent de risquer leur vie pour notre sécurité et notre liberté. Si nous sommes là pour débattre, discuter, voire nous opposer, nous ne devons pas oublier que c'est d'abord et avant tout pour eux que nous travaillons. Les femmes et les hommes des armées se battent pour nous ; il nous revient en cet instant de nous battre pour eux.

Il y a huit mois, nous avons commencé à travailler ensemble. Vous vous êtes pleinement saisis des questions de défense et nous oeuvrons aujourd'hui ensemble, de façon quasi quotidienne, à l'amélioration tant des cadres que du quotidien de nos armées. Jusqu'à présent, nos travaux ont été surtout consacrés au projet de loi de finances pour 2018, qui a permis une hausse de 1,8 milliard d'euros du budget alloué à notre ministère. Vous avez également été très attentifs, et je vous en remercie, à la bonne fin de la gestion 2017. Celle-ci a été mise en oeuvre conformément aux engagements que j'avais pris devant vous, mais je sais que votre soutien a été efficace.

Aujourd'hui, un nouveau chapitre s'ouvre avec un texte majeur de la législature, qui suscitera, j'en suis certaine, de très nombreuses auditions. En ce qui me concerne, je souhaite que celles-ci soient aussi régulières et nombreuses que possible, car je crois important d'entretenir le dialogue avec chacun d'entre vous et ce, quel que soit, bien entendu, le groupe politique auquel vous appartenez. Lorsqu'il s'agit de la défense nationale, de nos armées, les querelles partisanes s'effacent pour laisser place à la volonté commune de protéger les Français et d'assurer le succès des armes de la France.

Le projet de loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2019-2025, que j'ai présenté ce matin au Conseil des ministres, marque un moment charnière pour nos armées. En effet, depuis des années, notre défense, nos armées, les personnels militaires et civils qui s'engagent pour servir notre pays sont en fait confrontés à des tendances contraires : d'un côté, des budgets toujours plus contraints, des réductions drastiques d'effectifs, des programmes soit retardés, soit même, pour certains, arrêtés ; de l'autre, un engagement croissant, en opérations extérieures comme sur le territoire national, qui a fortement sollicité notre outil de défense.

Malgré ces tendances contradictoires, les difficultés et des conditions souvent éprouvantes, nos forces armées ont tenu leur rang avec efficacité, rigueur et talent, et je veux leur rendre hommage. Elles ont rempli leur mission en se déployant au Sahel, en République centrafricaine et au Levant et en relevant le gant lorsqu'il s'est agi d'assurer au plus près, dans le cadre de l'opération Sentinelle, la protection des Français sur notre territoire.

Notre ministère a su se réformer et lancer de lourds chantiers de rénovation pour continuer à bien fonctionner dans ce contexte. Toutefois, cette contradiction ne pouvait plus durer. Le président de la République l'a dit et répété de manière extrêmement claire, les armées doivent disposer pleinement des moyens d'accomplir leur mission. Il a donc décidé de lancer, au tout début de l'été, une revue stratégique. Ce document, que je suis venue vous présenter il y a quelques mois, a été validé en octobre ; il comporte une analyse précise et détaillée de la situation internationale et de l'évolution des conflits.

Je la résume en quelques mots. Le monde dans lequel nous évoluons est plus imprévisible, plus instable, et plus armé. Les conflits ont définitivement changé de visage : ils sont plus déséquilibrés, plus numériques et plus violents. Les succès militaires de la coalition au Levant n'ont pas éradiqué la menace de Daech : privé de territoire, cet ennemi change de moyens d'action et les dommages causés par sa propagande demeurent. Nous n'en avons donc pas fini avec le terrorisme, que nous combattrons jusqu'au bout. Par ailleurs, certaines grandes puissances continuent à affirmer leur autorité par tous les moyens, à reprendre la course aux armements et à pratiquer une politique du fait accompli inacceptable.

Dans ce monde et face à ces guerres nouvelles, la France doit continuer de tenir son rang. Elle doit faire entendre sa voix, être en mesure d'intervenir partout où ses intérêts sont menacés et où la stabilité internationale en dépend. Dans un tel contexte, une réaction forte et rapide était nécessaire. Elle se traduit par ce projet de loi de programmation militaire qui a été élaboré dans des délais historiquement courts : six mois seulement se sont écoulés depuis le lancement des travaux de programmation au sein du ministère et trois mois à peine depuis la remise des conclusions de la revue stratégique.

Ce texte est désormais entre vos mains et dans celles de vos collègues du Sénat. Le calendrier, tel qu'il a été fixé et confirmé par le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, devrait permettre à la loi de programmation militaire d'être votée par le Parlement en juillet.

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