Cela permettra d'assurer un suivi du dossier et d'enrichir nos débats, par exemple dans le cadre des conventions fiscales bilatérales.
S'agissant du volet de sanctions prévu à l'article 2, nous maintenons la position que nous avions défendue en commission. Cet article ne nous semble pas adapté ; le volet de sanctions doit faire l'objet de travaux approfondis et être soumis à une étude d'impact, afin que les sanctions soient pertinentes, efficaces et dissuasives. Les travaux préparatoires au projet de loi relatif à la lutte contre la fraude y contribueront. Notre groupe propose en particulier d'étudier la pertinence et la faisabilité, à la fois juridique et technique, d'une taxe, à taux faible, sur les flux financiers entre la France et les États ou territoires qui figurent sur la liste des paradis fiscaux.
J'en viens maintenant aux critères. Comme je l'ai dit, ceux-ci sont proches de ceux utilisés par l'Union européenne pour constituer la liste de décembre dernier. Ils s'appuient notamment sur les travaux menés au sein de l'OCDE, particulièrement ceux qui concernent les moyens de lutter contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices, communément appelés « BEPS » – Base erosion and profit shifting –, et sur ceux du Forum mondial.
Toutefois, en l'état, ces critères nous semblent difficilement applicables : on risquerait de ne disposer que d'informations partielles etou d'inscrire la quasi-totalité des États et territoires sur la liste, ce qui reviendrait à la discréditer. En effet, certains critères, comme l'évaluation de la mise en oeuvre des normes anti-BEPS, sont aujourd'hui peu opérants, et ils ne seront pas actualisés de manière annuelle : on ne pourra donc pas empêcher un État ayant mis en oeuvre ces préconisations de sortir rapidement de la liste des paradis fiscaux.
La constitution des critères et leur évaluation nécessitent un travail long et approfondi, notamment en matière d'étude d'impact. À ce stade, ces travaux n'ont pas pu être réalisés, malgré la volonté de nos collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, en raison principalement de l'absence de structure d'expertise dédiée à la réalisation d'études d'impact des propositions des parlementaires. Le mois dernier, nos collègues Jean-Noël Barrot et Jean-François Eliaou ont d'ailleurs rédigé, en collaboration avec David Thesmar, une tribune sur le sujet, afin que le Parlement se dote d'une structure propre d'évaluation des politiques publiques.
C'est pour ces raisons que notre groupe demandera le renvoi en commission de la présente proposition de loi. Si la liste française des paradis fiscaux n'est plus remise à jour annuellement, comme cela était prévu à sa création, la France porte au niveau européen une voix forte et ambitieuse sur ce thème, et il est nécessaire qu'elle montre l'exemple au niveau international. Un renvoi en commission permettrait d'engager ensemble, en s'appuyant sur le travail réalisé par le rapporteur, une réflexion en profondeur sur les critères qui serviront de base à la mise en oeuvre d'un volet de sanctions dissuasives et adaptées, dans le cadre du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale, annoncé pour l'été.
Plus que jamais, la France doit être en première ligne dans cette lutte. À l'heure où chacun et chacune participe au redressement de notre pays, il est de notre responsabilité d'être d'une extrême fermeté. Nous devons, j'ose le dire, faire vivre l'enfer aux fraudeurs et aux paradis fiscaux.