Intervention de Arnaud Leroy

Réunion du mercredi 7 mars 2018 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Arnaud Leroy :

En tant qu'utilisateur, je partage le diagnostic de Mme Nathalie Sarles sur le tri des déchets. Pour certains EPCI, seuls quelques types de déchets vont dans la poubelle jaune, tandis que pour d'autres, tout peut y aller car ils sont éligibles à un programme d'expérimentation. Il faut uniformiser les pratiques. Des expériences ont été menées en partenariat avec Eco-emballages – devenu Citeo – et l'ADEME.

Il y a un problème s'agissant du plastique ; nous devons discuter des produits qui entrent dans sa composition avec les producteurs. J'avais lutté pour faire interdire les emballages oxo-fragmentables. Ce type de plastique permet soi-disant la biodégradation, mais c'est faux : il ne fait que se fragmenter en microparticules qui persistent dans l'environnement, et c'est dramatique pour tout l'appareillage de recyclage. Un travail est en cours sur ce sujet.

L'ADEME étant issue de la fusion de trois structures, dont l'agence des déchets, elle a une vraie histoire et une compétence avérée sur ce sujet. Citeo est un acteur et un partenaire important, issu des filières à responsabilité élargie des producteurs. Nous sommes aussi en relation avec les EPCI et les communautés de communes, devenus quasiment partout responsables de la question des déchets, pour identifier les bonnes pratiques et accompagner leur amélioration. Un nivellement par le haut pourrait être décidé par le législateur ; je n'ai pas encore vu la version finale de la feuille de route pour l'économie circulaire, mais nous sommes très favorables à une généralisation de la simplification du tri. Il y a d'autres débats, notamment sur la tarification incitative.

La question se pose aussi, pour les spécialistes du déchet, de mettre en place une taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) en amont applicable à tout déchet non recyclable ou n'entrant pas dans une filière de responsabilité élargie des producteurs. Comment faire ? Faut-il pénaliser ? Le débat est ouvert, et j'espère que nous pourrons en parler au cours des prochaines années. Il est important d'en discuter avant d'espérer créer une taxe affectée, ce dont rêve tout dirigeant d'EPIC, ou au moins obtenir des fonds supplémentaires pour le Fonds « déchets ».

Madame Auconie, je partage totalement vos vues à propos de la surtransposition. Nous pourrons peut-être faire le nécessaire sur certains sujets : en travaillant depuis Bruxelles, nous connaîtrons en amont le contenu des directives, et nous identifierons mieux les différences dans les projets de transposition. C'est un combat quotidien, et je vous souhaite bon courage car j'ai le souvenir d'une lutte acharnée.

Il en va de même pour les procédures, nous devons apprendre à simplifier. Je n'ose plus parler de simplification depuis que j'ai écouté un entretien de M. Thierry Mandon, et on m'a montré dans certains cas ce qui avait été complexifié au nom de la simplification. Il faut donc faire attention, la simplification peut être un faux ami, mais vous aurez tout le soutien de l'ADEME. Il faut faire la part du nécessaire, par exemple dans le logement : c'est très bien d'isoler, mais attention aux implications sur la qualité de l'air intérieur.

Monsieur Garot, les territoires « zéro déchet » fonctionnent bien, la ligne budgétaire est donc sacralisée. Il faut que l'ADEME monte en puissance, nous avons quelques années de recul qui nous permettent d'animer, d'identifier les bonnes pratiques et d'aller de l'avant. Cela permettra aussi, au-delà de la subvention, de savoir comment les collectivités locales se sont emparées de cette affaire. Parfois, certaines collectivités locales réclament de l'argent, l'obtiennent, mais les projets ne vont pas toujours au bout de ce qui avait été annoncé : nous devons être vigilants, d'autant que nous avons de moins en moins d'argent.

La rénovation thermique est un axe important, et je me « mets dans les pantoufles » de M. Bruno Léchevin sur ce sujet. Nous avons une relation forte avec l'Agence nationale de l'habitat, pour qui ce sujet constitue également un enjeu majeur. Comptez sur moi pour faire de l'Observatoire permanent de l'amélioration énergétique du logement un vrai « poil à gratter ». La campagne devrait être lancée en 2019 sur ce sujet ; il faudra bien la calibrer pour que cela ne soit pas trop technique. Enfin, nous devons échanger avec les points info énergie, qui sont les hussards de la rénovation énergétique et écologique sur le terrain. Est-ce encore un modèle performant aujourd'hui ? Que devons-nous faire différemment ? Prenons garde aux effets d'aubaine et aux démarchages abusifs, surtout pour les bouquets énergétiques et les bouquets de rénovation. Il faut que tout le monde joue le jeu : si quelque chose coûte 7 000 euros aujourd'hui, il ne doit pas coûter 12 000 euros demain au motif qu'il est financé différemment, avec des aides directes. Nous serons vigilants ; le confort thermique est un élément important pour préserver le pouvoir d'achat des populations concernées, mais également satisfaire nos obligations légales. Et surtout, la précarité énergétique touche encore beaucoup trop de monde dans notre pays.

S'agissant des friches industrielles, l'ADEME s'occupe de celles qui n'ont plus de propriétaire et de celles dont l'opérateur est insolvable ou a disparu, cas assez fréquent dans notre pays. La problématique doit être discutée avec le ministère de la cohésion des territoires. Nous savons où sont les terrains concernés, et quel est leur état de dépollution. Mais ce sont des dossiers qui prennent beaucoup de temps ; je connais le désir de construire des élus locaux, et je pense aussi qu'il est préférable de construire sur les friches plutôt que d'artificialiser les sols.

Cela étant, dans certains cas, il ne sera pas possible de construire. Il faut alors savoir comment nous allons dépolluer. Je milite pour une dépollution beaucoup plus naturelle. Il faut tenter des expériences, c'est aussi la raison pour laquelle je suis attaché aux relations avec l'Agence française pour la biodiversité. On peut également transformer les friches en espaces pour compléter des trames vertes ; c'est une solution à étudier. Parfois, il faut aussi leur rendre une vocation industrielle ou commerciale. Nous allons connaître une révolution du transport et de la logistique pour la desserte des grands centres urbains, et nous aurons besoin, pour assurer le fameux « dernier kilomètre », de villages logistiques beaucoup plus proches, parfois même à l'intérieur des zones urbanisées, pour empêcher les camions de 38 ou 44 tonnes de pénétrer en ville. L'ADEME a une mission historique sur ce sujet. Faudra-t-il entrer dans une logique différente pour l'avenir de ces friches ? C'est à discuter. En revanche, la création de zones franches ou d'incitations fiscales n'est pas du tout du ressort de l'ADEME.

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