Vous touchez au coeur de mon rapport. Mon but n'était pas de répéter le propos de la commission de la Défense et des Forces armées saisie au fond. J'ai réfléchi à la manière dont nous organisions nos rapports bilatéraux, multilatéraux et transatlantiques. Tous ici, nous savons que le Président de la République est un Européen convaincu. J'ai vraiment essayé de connaître le ressenti des chefs militaires : comment envisagent-ils l'articulation entre l'autonomie stratégique nationale et l'autonomie stratégique européenne ? Ils sont unanimes : il est essentiel au grand État que nous sommes de conserver ce qui s'appelle « notre jardin secret ». L'autonomie stratégique nationale est rendue possible, entre autres, par un renseignement complètement autonome – c'est ce qui nous a permis de ne pas suivre les Américains en Irak en 2003. Cependant, nous n'avons plus la taille critique nécessaire à une autonomie dans tous les domaines : terre, air, mer, espace, cyber. Il est donc indispensable d'organiser cette autonomie stratégique au niveau européen pour peser face aux grands pays, États-Unis et BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Peut-être cela demande-t-il un effort intellectuel puisque ces deux notions sont souvent opposées, mais elles sont en fait complémentaires. L'idée fait consensus parmi nos chefs militaires.
Par ailleurs, je souscris, à titre personnel, à votre proposition d'une commission qui aurait à connaître des opérations secrètes menées par la France.