Examen pour avis et vote, ouverts à la presse, sur les articles 1 à 6 (Titre I) et les articles 18, 23, 24, 26, 31, 40 et 42 (Titre II) du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 659).
La séance est ouverte à neuf heures trente.
Nous allons examiner pour avis le projet de loi relatif à la programmation militaire 2019-2025. Cette réunion est ouverte à la presse.
Je vais donner la parole à Laëtitia Saint-Paul. Je rappelle que nous avons déjà eu un échange de vues au sein de notre commission. Aujourd'hui, nous examinerons le texte de manière plus formelle et devrons nous prononcer sur plusieurs amendements.
Il me paraît essentiel que notre commission se saisisse pour avis de ce projet de loi de programmation militaire (LPM). En effet, nous nous intéressons quotidiennement aux questions relatives aux droits humains, au développement, à la diplomatie ; il me semble indispensable que nous ne négligions pas les enjeux de sécurité et de défense. Raymond Aron a dit qu'« il n'existe que deux acteurs sur la scène internationale : le diplomate et le soldat ». Notre commission a ainsi toute légitimité de se saisir de ces questions, aux côtés de la commission de la défense. Le présent projet de LPM couvrant toute la durée de la législature, nous aurons d'ailleurs sans doute l'occasion de revenir à ces questions stratégiques, de souveraineté, qui sont essentielles.
Nos forces sont présentes partout. Quand nous réfléchissons à la loi de programmation militaire, nous pensons tous d'abord à l'armée de terre qui protège le territoire national et affirme sa présence sur différents théâtres d'opérations. Mais les navires de notre marine sont également présents partout dans les eaux internationales pour faire respecter la liberté de navigation. Nos forces sont aussi dans le ciel, espace partagé par tous, ainsi que dans le cyberespace, qui constitue désormais un espace de défense à part entière. Les enjeux de défense ont ainsi une dimension internationale incontournable.
J'ai servi au sein de l'armée de terre pendant quinze ans, c'est pourquoi je sais la responsabilité politique que nous portons quand nous décidons d'envoyer des troupes sur un théâtre d'opérations. Je propose d'ailleurs que notre commission rende visite, à l'hôpital militaire de Percy, à nos militaires blessés en opération. Le prix de nos décisions politiques est le prix du sang. À cet égard, je rends hommage aux deux militaires tombés au Mali le mois dernier, ainsi qu'à tous les blessés qui ont payé dans leur chair leur engagement au service de la France.
Quand nous discutons du budget des armées, ayons à l'esprit ces images et notre responsabilité politique. Ainsi, même si nous n'avons heureusement pas à décider une baisse du budget aujourd'hui, nous devrions, si c'était le cas, nous rappeler par exemple que des économies réalisées sur des treillis ignifugés laissent nos soldats sans protection contre des brûlures au troisième degré. C'est aussi cela, notre responsabilité politique !
Aujourd'hui, c'est avec satisfaction que je vous présente ce projet de loi de programmation militaire. Pour la première fois depuis la fin de la guerre froide, un effort budgétaire substantiel est consenti en matière de défense ; pour la première fois, il ne sera pas question de fermeture de casernes, de réductions d'effectifs ou de baisse du budget. Des points d'ombre subsistent toutefois, cela m'est apparu au cours de notre échange de vues. Je m'efforcerai d'apporter des réponses dans la suite de notre discussion.
La loi de programmation militaire fixe un objectif de dépenses à hauteur de 2 % du produit intérieur brut (PIB) en 2025, ce qui représente une forte augmentation. C'est le prix de notre autonomie stratégique nationale, mais c'est aussi un engagement que nous avons pris auprès de nos alliés de l'OTAN ; c'est enfin la moyenne internationale des dépenses militaires et nous devons donc nous situer à ce niveau.
Traduisant notre vision stratégique, la loi de programmation militaire 2019-2025 est non seulement ambitieuse, mais elle sera également la loi des engagements tenus et une loi d'adéquation entre les objectifs fixés et les moyens alloués. Enfin ! Car, pour la première fois, comme l'a fait remarquer notre rapporteure, nous constatons une augmentation prégnante des budgets.
Le projet consacre l'engagement du Président de la République de porter le budget de la défense à 2 % du PIB en 2025, avec une inflexion budgétaire de 300 milliards. Ainsi, le budget global augmente de près de 7,4 milliards d'euros par rapport à la LPM 2014-2019.
Le contexte international, marqué par la multiplication des théâtres de crises et l'incertitude de nos partenaires, appelle non seulement à renforcer nos capacités opérationnelles, mais aussi à réaffirmer notre autonomie stratégique.
Ainsi, le projet de LPM 2019-2025 remet à niveau nos capacités opérationnelles, par le remplacement des équipements vieillissants devenus inadaptés et par la livraison d'équipements de nouvelle génération.
Nos engagements opérationnels, plus fréquents et nécessitant, de fait, une augmentation de nos effectifs, trouvent réponse dans le recrutement de près de 6 000 personnes : 3 000 d'ici 2023 et 3 000 de plus d'ici 2025.
Avec pour objectif la soutenabilité des aptitudes nécessaires à notre défense : dissuasion, protection, connaissance et anticipation, prévention et intervention, la France n'est pas sur la scène internationale la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf mais tiendra son rang de « première armée d'Europe et de deuxième armée du monde libre », comme l'a rappelé le Président de la République.
Enfin, au-delà des ambitions budgétaires et stratégiques, le moral de nos troupes est un élément crucial. Cette LPM à « hauteur d'homme » pense la condition militaire à travers ses différents leviers que sont le bien-être, le logement et la conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle. Maintenu et abondé de 200 millions d'euros, le plan famille bénéficiera ainsi de 530 millions de crédits sur cinq ans.
La France, meurtrie par les funestes événements terroristes, a besoin de cette LPM, qui pense la convergence nation armée par l'augmentation des réserves militaires, la pérennisation du service militaire volontaire et la prise en compte des familles dans les carrières.
Ce texte, vous le voyez bien, dessine un modèle d'armée complet et équilibré par des moyens à la hauteur de nos ambitions ; il est lucide au regard de l'environnement stratégique ; il est sincère en termes de finances publiques. C'est pourquoi, au nom du groupe La République en Marche, je vous invite à donner un avis favorable à l'adoption de la LPM 2019-2025.
Au nom du groupe Les Républicains, je salue le travail de notre rapporteure pour avis, qui connaît de l'intérieur la chose militaire.
L'effort de la loi de programmation militaire est à saluer : il est sans précédent depuis la présidence de Jacques Chirac. Parmi les points positifs figurent la priorité donnée à l'innovation, qui sera soutenue par un fonds d'un milliard d'euros, et l'orientation européenne des programmes d'armement.
Surtout, une remontée en puissance est engagée avec la création de 6 000 postes – dont 1 500 dans le renseignement et 1 500 dans la cyberdéfense. Une régénération des forces est également prévue, afin de répondre à l'épuisement des soldats et de leurs matériels.
Si la modernisation de capacités vieillissantes est bien inscrite pour les véhicules de l'avant blindés quadragénaires et les avions ravitailleurs valétudinaires, un effort significatif aurait dû être fait, en liaison avec les industriels, pour rééquiper nos forces projetées, notamment celles qui sont engagées au Sahel.
Pour autant, la LPM repose sur des paris risqués. Les scénarios de crise et les contrats opérationnels des armées n'ont pas été révisés, alors que l'environnement stratégique évolue rapidement.
La pérennité de l'autonomie stratégique et d'un modèle complet d'armée est réaffirmée, mais la priorité donnée à la régénération des forces et à la dissuasion nucléaire pèse sur la modernisation des équipements.
Les déficits capacitaires hérités du quinquennat précédent subsisteront, notamment dans la dimension aérienne, où l'effort pour les drones a pour contrepartie un retard aggravé en matière d'avions de combat et d'hélicoptères.
Le risque est d'aboutir à une impasse financière. D'un côté sont affichés des besoins de 295 milliards jusqu'en 2025, mais, de l'autre, seuls 198 milliards sont programmés jusqu'en 2023. La hausse de 1,7 milliard d'euros du budget pour 2018 couvre à peine l'intégration du coût des opérations extérieures, soit 1,3 milliard, et le financement des mesures décidées en 2016.
Le budget de la défense devra donc être augmenté de trois milliards chaque année, de 2023 à 2025, pour atteindre l'objectif de 2 % du PIB.
Beaucoup est, en effet, renvoyé à l'après quinquennat actuel… De plus, les engagements inscrits dans la LPM 2019-2025 seront fortement touchés par le renouvellement et la modernisation de notre dissuasion nucléaire.
À cet égard, il me semble qu'un débat stratégique devrait avoir lieu sur la nécessité du maintien de nos deux composantes…
Je termine en soulignant l'urgence à renforcer notre présence dans les océans, alors que nous disposons d'une zone économique exclusive immense, en passe de devenir la première du monde, avec plus de 13 millions de km², mais que nous serions bien en peine de défendre contre d'éventuelles agressions qui peuvent être très diverses – je ne reviens pas sur Mayotte, dont nous avons beaucoup parlé.
Enfin, il convient de préciser, s'il est en besoin, que cette LPM reste dépendante de la promesse de créer un service national universel et obligatoire de trois à six mois, dont les objectifs, encore flous, sont très coûteux.
Dans son programme de campagne, le Président de la République avait fixé l'objectif très ambitieux de porter progressivement le budget de défense de notre pays à 2 % du PIB. Cette ambition répond à une attente très forte du nécessaire renforcement de notre outil de défense, aujourd'hui très sollicité.
Il est donc naturel que le groupe Mouvement Démocrate et apparentés soit globalement très satisfait de ce projet de loi de programmation militaire. Il n'étonnera personne qu'il le soutienne fermement.
Ce projet répond à une nécessité stratégique. Nos militaires ont régulièrement exprimé leurs attentes, parfois leur désarroi, quand ce n'est pas leur amertume envers un pouvoir politique qui leur demande beaucoup – toujours plus – sans forcément leur donner les moyens nécessaires. Toutes ces années de frustration, voire de crainte de ne pouvoir remplir leur mission sans péril encore accru pour leur vie : voilà ce que le général de Villiers a sans doute tenu à exprimer à l'été 2017.
En rupture, ce projet de LPM marque au contraire une vraie remontée en puissance de nos moyens de défense, avec une augmentation significative du budget et des effectifs sur la période de la programmation.
Nous saluons la lucidité et la sincérité du gouvernement manifestée dans ce projet.
Lucidité, d'abord, qui se traduit par la priorité donnée à la condition militaire et au renforcement des capacités opérationnelles les plus critiques. La famille politique à laquelle j'appartiens ne peut par ailleurs que se réjouir des accents pro-européens de ce projet de loi. Il nous paraît en effet évident que nous devons partager le fardeau de l'effort de défense avec nos partenaires européens en particulier, que ce soit sur le plan opérationnel ou industriel.
Sincérité de ce projet de loi, ensuite, qui s'exprime par le recours exclusif à des crédits budgétaires et non pas à d'hypothétiques recettes exceptionnelles comme ce fut le cas dans la LPM précédente, ou par l'augmentation réaliste de la provision dédiée au financement des opérations extérieures.
Mon groupe restera toutefois vigilant quant à l'application effective de cette programmation militaire, alors qu'une part importante de l'effort, pour le budget comme pour les effectifs, porte sur l'après-2022. Le contrôle par le Parlement de cette programmation devra ainsi rester étroit et exigeant.
Ce point de vigilance mis à part, le groupe Mouvement Démocrate donne un avis favorable à ce projet de loi.
Le groupe UDI, Agir et Indépendants salue à son tour un effort sans précédent, et très attendu, notamment des militaires, en faveur de nos moyens de défense. Nous nous réjouissons aussi de ce que la commission des affaires étrangères, dans une démarche novatrice, se soit saisie pour avis de ce projet.
Nous saluons également la modernisation des équipements, mais aussi, et surtout, la prise en compte des personnels militaires, à travers les dispositions relatives à la condition militaire. C'est un axe fort de cette loi de programmation. Nous nous félicitons aussi à notre tour des orientations pro-européennes de ce texte.
Globalement, vous l'aurez compris, nous sommes plutôt favorables à ce texte. Nous serons cependant vigilants. J'appelle l'attention de la rapporteure pour avis sur le fait que des projets formidables sur le papier subissent parfois une régulation budgétaire, qui conduit à l'annulation de crédits prévus ; le budget de la défense en a déjà fait l'expérience.
C'est pourquoi notre groupe sera à la fois favorable à ce texte et vigilant quant à son application. Au demeurant, comme l'a dit Didier Quentin, une bonne partie de ce qui est prévu se trouve renvoyé au quinquennat suivant. Nous serons vigilants quant à la mise en oeuvre prévue au cours de ce quinquennat, au cours duquel nous aurions préféré que soit consenti l'essentiel de l'effort.
Sans avoir pour ce texte les yeux de Chimène, le groupe Nouvelle Gauche le voit avec une certaine bienveillance, qui ne pourra que croître si la rapporteure nous apporte des réponses et si elle soutient nos amendements en séance.
Je ne poserai que quatre questions, très simples.
Qu'en est-il tout d'abord des trois milliards prévus pour la période 2023 à 2025 ? Lors de la dernière audition, nous avions proposé de faire l'inverse, c'est-à-dire de terminer en sifflet la trajectoire budgétaire, plutôt que de commencer petit. Cela aurait eu également l'avantage de clore déjà une partie de l'exercice au cours de ce quinquennat. L'année 2023 est bien loin ; un certain nombre d'entre nous ne seront d'ailleurs sans doute plus là…
Qu'en est-il ensuite de l'augmentation annuelle de 1,7 milliards d'euros, avec la réintégration annuelle dans le budget de la défense du financement des opérations extérieures ? La question a déjà été évoquée.
Qu'en est-il encore des reports de charge, qui viennent alourdir le budget à hauteur de pas moins de trois milliards d'euros ?
Qu'en est-il enfin des engagements venant à échéance ou du « reste à payer » à hauteur de seize milliards d'euros ? Ce n'est pas rien ; comment fait-on ?
À la suite de notre discussion sur la place du militaire dans la nation, vous allez proposer qu'un militaire puisse être conseiller municipal. Notre groupe proposera qu'il puisse aussi être conseiller départemental et conseiller régional aussi. Ces élus sont en effet soumis au même statut.
Déjà répandue dans les pays d'Europe du Nord, la vision d'un militaire-citoyen convient aussi au groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Que les militaires puissent assumer des responsabilités de citoyens, dans la gestion de leur commune ou à d'autres échelons territoriaux, comme le propose le groupe Nouvelle Gauche, voilà qui va dans le sens d'une armée intégrée dans la République, mais aussi d'une République entretenant de meilleurs liens avec son armée.
Pour le reste, je partage les remarques d'autres groupes. Pourquoi l'effort majeur doit-il être effectué après ce quinquennat ? Si nous adoptons une loi de programmation militaire, il faudrait commencer par assumer la responsabilité de ce quinquennat-ci. Il paraît un peu hypocrite de se borner à dire que tout ira mieux demain, en laissant à nos successeurs l'effort le plus lourd.
Le projet de loi prévoit un gros investissement dans la force nucléaire stratégique. Mais quel est aujourd'hui l'intérêt de la force nucléaire, de la totalité de ses composantes, de leur modernisation ?
Elle représente une grande part du budget et notre commission doit donc avoir un débat à ce propos, que nous pourrons d'ailleurs poursuivre après l'examen de la LPM. Quand faut-il lever le pied sur la dissuasion et appuyer sur l'accélérateur quand il s'agit du soldat et des moyens de le protéger et de l'équiper ? Nous verrons au cours des prochaines années quelles orientations il convient de prendre.
J'ai été par ailleurs surpris par le nombre de cavaliers législatifs présents dans ce texte. Je pense notamment aux opérations extérieures, dans le cadre desquelles des prélèvements salivaires seraient désormais possibles, lorsqu'elles se déroulent dans des pays où la législation ne protège pas forcément le citoyen, mais où celui qui arrive avec une arme en mains a au contraire les pleins pouvoirs. Cela nous pose problème. L'ONU s'est penchée sur la question, tout comme le Conseil de l'Europe.
L'objectif des 2 % du PIB est une demande de l'OTAN qui est devenue un engagement du Président de la République… Pourquoi nous y tenir ? Cela vous paraîtra peut-être curieux de la part des communistes, mais nous considérons que notre défense doit être adaptée à la menace : si la menace exige 2,5 %, il ne faut pas rester à 2 %. Si en revanche elle n'exige que 1,5 %, il ne faut pas s'arc-bouter à 2 %.
Effectivement, nous avons longtemps adapté la menace à la dépense, plutôt que la dépense à la menace. Ces 2 %, qui représentent déjà un effort important, garantissent notre autonomie stratégique et nous permettent de tenir nos engagements internationaux, tout en nous situant dans la moyenne mondiale des dépenses militaires. Je vous l'accorde, cependant, nous ne devons pas rester butés sur le chiffre des 2 %.
Je reviendrai lors de l'examen des articles sur les frustrations que peut provoquer la LPM, en m'efforçant d'éviter tout discours aseptisé : je vous le dois et nous le devons à nos soldats.
S'agissant de la réintégration du coût des opérations extérieures dans le budget de la défense, il faut être lucide : un attentat en France fait plus pour ce budget, dans l'opinion publique, que 150 rapports rédigés par de grands spécialistes, comme me l'ont montré mes auditions ; mais, le jour où l'adhésion populaire en faveur des opérations extérieures n'est pas là, la réintégration de ces coûts permet précisément d'éviter tout effort interministériel pour trouver des financements, effort alors difficile à obtenir. Néanmoins, l'effort budgétaire global se trouve amoindri du fait de cette réintégration.
Mieux aurait valu que l'augmentation soit lissée sur toute la durée de la LPM, plutôt de prévoir un bond des dépenses lors de la prochaine législature. Le Président de la République a cependant fait preuve de courage politique en demandant que la loi de programmation soit revue en 2021, année qui précédera la prochaine élection présidentielle. Il marque ainsi sa volonté qu'on puisse s'interroger sur la trajectoire financière de la loi de programmation militaire : nous serons saisis de la question. Il fait ainsi preuve d'audace.
L'augmentation du budget à partir de 2023 nous conduit à nous interroger sur les efforts à fournir pour le renouvellement de nos forces conventionnelles et nucléaires. Pour les premières, il doit être constant ; pour les secondes, un effort supplémentaire doit avoir lieu tous les trente ans. Or, il ne fait qu'être repoussé année après année. Créées dans les années 1960, nos composantes nucléaires furent renouvelées dans les années 1990 et nous arrivons maintenant à l'échéance 2020. Reporter constamment l'effort nuit à la crédibilité de nos équipements. Un incident nucléaire avec l'un de nos sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) serait impossible à assumer. La rénovation de notre force nucléaire nous place donc devant un véritable enjeu.
Les chiffres du nucléaire sont entourés d'une immense confidentialité. M'étant battue pour avoir des données, y compris auprès du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), je me demande, en tant qu'élue de la nation, si les gens avertis ne pourraient pas être plus nombreux. En effet, il faut bien contrôler la trajectoire budgétaire. Ainsi, à partir de 2023, l'effort à consentir en faveur du nucléaire induira sans doute des débats sur le renouvellement de nos composantes à l'horizon 2035-2040, lequel se prépare longtemps en amont.
En réalité, ces 2 % du PIB, c'est totalement fictif – il faut quand même oser le dire. La hausse des crédits n'est que de 1,7 milliard d'euros par an. Elle atteint 3 milliards d'euros… après l'élection présidentielle de 2022 : en 2023. Cela revient à faire porter l'essentiel de l'effort par un potentiel successeur. Je ne parle même pas de la loi d'actualisation prévue pour 2021, qui a quand même une sacrée odeur électoraliste.
Quant aux surcoûts des OPEX, certes, la provision est officiellement portée à 1 milliard, mais il ne s'agit là que de transcrire une réalité budgétaire. En effet, le milliard de surcoût est devenu structurel ces dernières années. Et même portée à 1,1 milliard, la provision promet d'être tout à fait insuffisante : en 2017, elle était de 450 millions d'euros, et le surcoût réel s'est élevé à 1,2 milliard – en 2018, pour une provision de 650 millions d'euros, le surcoût réel devrait être de 1,5 milliard.
Tout cela aura évidemment des conséquences, notamment sur les matériels dont l'état est tout à fait inquiétant en métropole – je dis bien en métropole. Elles seront dangereuses pour nos troupes, sous-entraînées : faute d'avoir effectué un nombre suffisant d'heures de vol, 20 % des pilotes de l'aviation légère de l'armée de terre ne sont pas aptes aux missions de guerre, et moins de 60 % des équipages de transport tactique de l'armée de l'air sont qualifiés à l'atterrissage sur terrain sommaire, mode d'action pourtant essentiel. Je ne compléterai pas ce tableau dramatique en mentionnant le mal-être du personnel quand, par exemple, 58 % des fusiliers marins ne sont pas sûrs de renouveler leurs contrats.
On parle beaucoup des efforts, mais ils ne sont donc pas au rendez-vous ; du moins ne sont-ils pas à la hauteur des attentes. Et une comparaison systématique avec d'autres pays n'a pas de sens, puisque nous avons, nous, une force de dissuasion nucléaire qui requiert un effort tout particulier.
Je m'interroge sur la dissuasion. Il ne vous a pas échappé que le prix Nobel de la paix avait été décerné l'an dernier à la Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires, ni qu'une mission d'information de la commission des affaires étrangères, bienvenue, travaillait sur le thème : « 50 ans après le traité de non-prolifération nucléaire : où en est-on ? » Cette mission terminera ses travaux après l'adoption de cette loi de programmation militaire. Il y a là un vrai problème de calendrier, car la LPM lance le cycle de renouvellement des deux composantes de la force de dissuasion, cycle dont la durée se compte en décennies – peu d'entre nous, même parmi les plus jeunes, en verront le terme. Dans quelle mesure cette loi de programmation est-elle compatible avec les engagements pris par la France, dès 1992, dans le cadre du traité de non-prolifération ? Je ne parle même pas du traité d'interdiction des armes nucléaires ouvert à la signature au mois de septembre dernier.
Que lisons-nous en page 27 du rapport ? « Le Président de la République a choisi de ne pas ouvrir le débat sur la dissuasion nucléaire de la France. » La moindre des choses serait précisément qu'on en débatte !
Certes, c'est en 2025 que l'ambition d'un effort de 2 % du PIB en faveur de la défense sera réalisée, mais je tiens à défendre le concept même de loi de programmation militaire.
Que se passe-t-il en Bulgarie ou dans certains pays où il n'en existe pas ?
Il peut arriver qu'une année les budgets pour acheter de nouveaux matériels soient prévus et que, finalement, du fait d'une concurrence déloyale, voire de la corruption, ces budgets ne soient pas alloués. Quand bien même l'horizon est lointain – j'aurais préféré, effectivement, qu'il le soit moins –, quand bien même une loi de programmation est imparfaite, elle permet – c'est le principe – une vision à moyen terme qui fait défaut aux États qui ne recourent pas à ce type de loi, vraiment nécessaire malgré ses faiblesses.
J'espère que nous continuerons d'étudier les questions de défense pour que cet effort soit maintenu. Nous devons collectivement, de manière transpartisane, convaincre nos opinions publiques que cet effort doit impérativement être fourni.
Quant aux OPEX, l'année 2017 aura quand même constitué le pic de la décennie. Dans tous les cas, il y a deux options : soit la provision est insuffisante, auquel cas elle sera complétée par le mécanisme de solidarité interministérielle, comme c'était le cas jusqu'à présent, à hauteur de la part de chaque ministère dans le budget de l'État, soit environ 20% pour la défense. Et si cette provision se retrouvait un jour, vraisemblablement lointain, supérieure aux besoins, le ministère de la défense conserverait le surplus.
Cette loi de programmation militaire pourrait être intitulée « préparer et réparer ». Certes, c'est frustrant, il n'y a pas de grands projets structurants, il n'y a pas de projets bénéficiant d'une grande visibilité, comme un porte-avions, c'est vraiment une LPM à hauteur d'homme : on prépare les soldats et on répare tous les matériels utilisés, dont certains sont vieux de plus de quarante ans.
La France a déjà considérablement réduit son empreinte nucléaire, en décidant unilatéralement de supprimer toute la composante terrestre de la force de dissuasion – elle a été la seule à le faire. L'effort en faveur de la non-prolifération et de la réduction de l'empreinte nucléaire est déjà accompli. Aujourd'hui, compte tenu de ce que j'appellerai la « nucléarisation » du monde, il ne serait absolument pas pertinent de s'engager sur la voie de la fin d'une dissuasion nucléaire qui assure notre autonomie stratégique. La question des deux composantes restantes se posera cependant nécessairement, au moins en termes financiers, à l'horizon 2025-2030, et, effectivement, une mission d'information est en cours, dans le cadre de laquelle un premier échange de vues doit avoir lieu mardi prochain.
Effectivement, une mission d'information, consacrée à la question « Cinquante ans après le traité de non-prolifération, où en est-on ? », a été constituée au sein de notre commission. Nos collègues Michel Fanget et Jean-Paul Lecoq, avec qui nous aurons un échange de vues la semaine prochaine, en sont les co-rapporteurs.
« Enfin une loi de programmation militaire qui tiendra ses promesses ! », entends-je, mais j'ai connu des lois de ce type et je souhaite à celle-ci de connaître une autre destinée ! Permettez-moi d'exprimer à mon tour mes doutes. Beaucoup se félicitent de ce texte, mais nous renvoyons à une autre législature que la nôtre le moment où nombre de ses promesses devront être tenues. Tenons un autre langage et ne prétendons pas que nous tenons nos promesses. Ceux qui le pourront verront ce qu'il en sera.
Par ailleurs, je trouve moi aussi absurde que l'on continue à développer la filière nucléaire, y compris financièrement. C'est contraire aux engagements que nous avons pris dans la lutte contre la prolifération nucléaire. Nos efforts de miniaturisation et de modernisation de notre force nucléaire constituent en eux-mêmes un encouragement à suivre notre exemple. Quant à la suppression de la composante terrestre, elle est déjà fort ancienne ; pour le reste, rien n'a été supprimé, nos forces seront même renforcées. C'est contraire à nos engagements internationaux. En tant que membres de la commission des affaires étrangères, nous devrions y être sensibles.
Pour que le cap des 2 % soit tenu, notre commission doit vraiment être sensibilisée aux questions de défense. Le chef d'état-major des Armées et la ministre des Armées n'ont pas pu venir dans le cadre de notre cycle d'auditions lié à la LPM, mais la défense doit toujours figurer parmi nos préoccupations et il faut qu'ils puissent régulièrement venir nous faire un état des lieux.
J'adhère à cette proposition. La ministre des Armées s'est exprimée devant notre commission et reviendra régulièrement.
Selon votre rapport sur la loi de programmation militaire, la France se donne pour objectif une autonomie dans sa stratégie de défense, mais exprime aujourd'hui, notamment dans les discours du Président de la République, une volonté de se doter d'une défense européenne, donc d'une stratégie de défense européenne. Cet objectif national à court terme et cet objectif européen à long terme ne risquent-ils pas d'entrer en contradiction ?
Par ailleurs, vous évoquiez le secret de la défense nationale, notamment le secret qui s'attache aux opérations et au nucléaire. En visite au Royaume-Uni, j'ai pu constater qu'une commission parlementaire s'y consacrait aux opérations secrètes et à tout ce qui est soumis au secret. Ne pourrions-nous envisager semblable instance, à effectif restreint, qui aurait à connaître des opérations secrètes de notre pays ?
À effectif restreint mais où tous les groupes politiques seraient représentés, tout de même !
Vous touchez au coeur de mon rapport. Mon but n'était pas de répéter le propos de la commission de la Défense et des Forces armées saisie au fond. J'ai réfléchi à la manière dont nous organisions nos rapports bilatéraux, multilatéraux et transatlantiques. Tous ici, nous savons que le Président de la République est un Européen convaincu. J'ai vraiment essayé de connaître le ressenti des chefs militaires : comment envisagent-ils l'articulation entre l'autonomie stratégique nationale et l'autonomie stratégique européenne ? Ils sont unanimes : il est essentiel au grand État que nous sommes de conserver ce qui s'appelle « notre jardin secret ». L'autonomie stratégique nationale est rendue possible, entre autres, par un renseignement complètement autonome – c'est ce qui nous a permis de ne pas suivre les Américains en Irak en 2003. Cependant, nous n'avons plus la taille critique nécessaire à une autonomie dans tous les domaines : terre, air, mer, espace, cyber. Il est donc indispensable d'organiser cette autonomie stratégique au niveau européen pour peser face aux grands pays, États-Unis et BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud. Peut-être cela demande-t-il un effort intellectuel puisque ces deux notions sont souvent opposées, mais elles sont en fait complémentaires. L'idée fait consensus parmi nos chefs militaires.
Par ailleurs, je souscris, à titre personnel, à votre proposition d'une commission qui aurait à connaître des opérations secrètes menées par la France.
Une délégation parlementaire au renseignement composée de quatre députés et de quatre sénateurs existe depuis 2007. Nous pourrions réfléchir à un élargissement du champ de ses compétences.
La relance de l'Europe de la défense est un élément positif, qui manifeste une ambition. Au-delà du projet politique, j'imagine que vous avez abordé ce sujet à de multiples reprises au cours de vos auditions, tant avec des experts qu'avec des militaires. Pouvez-vous nous indiquer comment ces derniers perçoivent le projet en lui-même ?
J'ose espérer que nous sommes à un tournant de l'Europe de la défense. Nous constatons ce qui, je l'espère, est plus qu'un frémissement. De nombreux pays ont ainsi adhéré à la coopération structurée permanente (CSP). A cet égard, la France est quelque peu déçue. Nous nourrissions en effet l'ambition d'un noyau dur de pays très réactifs, qui puisse mener rapidement des projets structurants. Or c'est la proposition allemande, beaucoup plus englobante, avec vingt-cinq États, qui a été choisie.
La France a donc eu l'idée de l'initiative européenne d'intervention (IED), qui vise à susciter une union de vision stratégique. Il s'agit non pas simplement d'être disposé à des engagements ponctuels, mais de penser une culture stratégique commune. Le modèle des Five Eyes est intéressant. L'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, le Canada et les États-Unis se sont unis pour échanger sur toutes les questions de renseignement, mais cela va plus loin, ces Five Eyes s'apportant un vrai soutien militaire dans le cadre de certaines opérations. L'idée de la France est donc de travailler à travers cette initiative européenne d'intervention sur la maturation d'une culture stratégique commune. Un certain nombre de pays répondent favorablement. Cela nous permet d'organiser, avec la coopération structurée permanente, des programmes industriels idoines et, en parallèle, une culture stratégique commune – l'un ne va pas sans l'autre.
Merci pour ce rapport très enrichissant. Pourriez-vous nous éclairer sur l'impact qu'aura le Brexit – le Royaume-Uni devrait quitter l'Union européenne dans un an – sur nos partenariats en matière de défense avec les Britanniques ?
Madame la rapporteure pour avis. C'est une question qui m'a passionnée dans mes recherches sur les rapports bilatéraux. J'ai interrogé l'attaché de défense français au Royaume-Uni. Il n'est en aucun cas question pour les Britanniques ni pour nous de revenir sur les accords de Lancaster House qui sont le fondement de notre coopération bilatérale. Cependant, pour des raisons financières, le Royaume-Uni ne peut honorer certains engagements pris dans le cadre du programme de système de combat aérien futur (SCAF, ou FCAS pour Future Combat Air System). En raison de la baisse du cours de la livre, il n'est plus possible au Royaume-Uni de tenir cet engagement financier d'un montant très élevé. Cependant, pour montrer sa bonne volonté et son attachement à ces accords, il a décidé de dépêcher quelques hélicoptères Chinook à nos côtés au Sahel.
Tous nos chefs militaires considèrent que l'armée du Royaume-Uni, armée expéditionnaire, dotée de forces conventionnelles et de forces non-conventionnelles, est soeur jumelle de la nôtre. Nous n'avons aucun intérêt à ce que la défense du Royaume-Uni soit affaiblie et nous devons rappeler notre attachement aux accords de Lancaster House.
Confirmons que le Royaume-Uni souhaite conserver avec la France cette relation spéciale. Il souhaite même conserver une relation spéciale avec l'Union européenne en matière de sécurité. La question doit être étudiée en vue du futur partenariat, dont nous aurons à débattre puisqu'il relève de la compétence de notre commission.
Je suis très inquiet pour la deuxième puissance maritime du monde que nous sommes, avec 12 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE) – la première à certains égards, en raison de l'extension de certains dispositifs. Rien dans ce projet de LPM ne me rassure quant à notre capacité à assurer notre souveraineté maritime. La régression des moyens de la marine nationale est substantielle et, dans un certain nombre de circonstances, nous ne pouvons même plus assurer la sécurité de nos compatriotes des outre-mer. Notre présence indispensable en termes géostratégiques, notamment dans l'océan Pacifique, est aujourd'hui menacée.
Cela m'amène à poser la question du deuxième porte-avions, dont le Président de la République, alors candidat, avait dit vouloir lancer le chantier au cours de son quinquennat. Nous sommes aujourd'hui sans porte-avions puisque le Charles de Gaulle est en restructuration pour dix-huit mois. Nous dépendons donc entièrement des porte-avions américains – les États-Unis d'Amérique en possèdent une dizaine. Et, alors que nous voyons, autour de nous, de grands pays, comme la Grande-Bretagne, l'Inde et la Chine, en construire à un rythme soutenu, nous n'avons pas engagé la construction de ce deuxième porte-avions. C'est un motif d'inquiétude, et cela risque de nous coûter très cher dans dix ou quinze ans.
Un porte-avions, c'est évidemment la puissance et la capacité de projection, c'est aussi la puissance diplomatique de notre pays. Et cela coûte 5 milliards d'euros. Comparons cela aux 10 milliards du dérapage du coût de l'EPR (Evolutionary Power Reactor). Pour un grand pays comme la France, qui veut rester une grande puissance mondiale, qui doit assumer son rôle de grande puissance mondiale maritime – nous savons très bien que ce sera, au cours de ce XXIe siècle, un enjeu crucial –, ce n'est pas hors de portée. Notre groupe apprécierait donc que la question ne soit pas enterrée.
Je partage, cher collègue, votre attachement à notre ZEE, motif de fierté et gage d'autonomie stratégique. C'est pourquoi j'ai souhaité me saisir de l'article 42, qui précise les modalités d'application de la loi outre-mer. Les questions de défense et sécurité se posent aux outre-mer de la même manière qu'à nous. Et, effectivement, pour m'être interrogée sur ces questions de diplomatie militaire, je sais que la présence en mer est essentielle. Des patrouilleurs dans les eaux internationales manifestent que la France est présente partout dans le monde, sur terre et dans les mers.
La question du deuxième porte-avions n'est en revanche pas à l'ordre du jour avant 2035 ou 2040 ; les études seront lancées au cours de la LPM. Le premier objectif de cette loi était vraiment de préparer et réparer. C'est le choix fait, avant d'envisager de grands projets porteurs. En l'absence de porte-avions, nous cherchons les moyens de faire autrement, notamment à travers des bases avancées que nous avons en différents endroits du monde.
Nous aurons largement l'occasion, au cours des prochains mois, de revenir sur cette question et de l'approfondir dans le cadre de notre mission d'information sur la stratégie française dans les mers et océans, dont les co-rapporteurs sont nos collègues Joachim Son-Forget et Jean-Luc Mélenchon.
Bravo pour ce rapport, mais pouvez-vous nous rappeler la définition de ce concept de new space que vous évoquez et nous en donner les prochaines applications ?
Mon rapport m'a effectivement ouvert des horizons inconnus. Le new space renvoie à l'utilisation de l'espace par des acteurs privés. Jusqu'à présent, seuls des acteurs étatiques avaient la possibilité financière, humaine et technologique d'envoyer des satellites ou des personnes dans l'espace. L'actualité vous l'a montré : de nouveaux acteurs privés se rendent dans l'espace.
Cela aura plusieurs conséquences. Après les embouteillages dans le ciel, nous pouvons courir le risque d'une certaine forme d'embouteillage dans l'espace. Chaque jour, tous, nous sommes usagers de l'espace, ne serait-ce que par notre recours au GPS. Actuellement, 1 500 satellites sont en orbite autour de la Terre, mais il pourrait y en avoir 6 000 en 2025, avec des risques accrus de collision, de destruction, dont seraient issus de nombreux débris qui menaceraient nos propres satellites. L'enjeu est réel.
Certains proposent de réduire notre dissuasion, peut-être au profit d'autres façons de préparer et réparer, mais la dissuasion nucléaire à la française obéit à un principe de stricte suffisance qui nous singularise parmi les puissances nucléaires.
C'est une politique de responsabilité : nous faisons preuve de responsabilité en n'étant pas proliférant tout en préservant notre capacité de nous défendre. Cela suppose que nous marchions sur nos deux jambes : une crédibilité politique, dont je ne doute pas, et une crédibilité technique, qui implique que nous renouvelions et éventuellement modernisions les équipements de nos deux composantes.
Voyez la situation internationale, voyez l'actuelle campagne présidentielle russe. Le président russe sortant – qui sera aussi, probablement, le président entrant… – se targue précisément du développement de missiles hypervéloces, plus furtifs. Participons-nous à une course technologique à l'armement ou nous donnons-nous au moins les moyens de pouvoir choisir ? La nécessité d'un effort financier suffisant vise simplement à permettre à nos militaires de proposer au Président de la République toutes les options stratégiques possibles.
Soyons responsables, ne donnons pas dans la prolifération, ne donnons pas le mauvais exemple à des États qui ne disposent pas d'armes nucléaires, mais soyons aussi réalistes en acceptant les développements techniques et technologiques nécessaires.
Cela implique une réflexion sur l'hypervélocité et la furtivité, cela implique le renouvellement de notre composante aérienne – des missiles air-sol moyenne portée améliorés (ASMPA) vers les missiles air-sol nucléaires de quatrième génération (ASN4G) – et de la composante sous-marine. Assurer le renouvellement de cette dernière, qui arrive en deuxième ligne dans une stratégie de guerre nucléaire et permet de frapper sans être repéré, alors que le reste de nos capacités sont détruites à ce moment-là, me semble d'ailleurs plus important que nous doter d'un nouveau porte-avions.
N'oublions pas non plus les capacités de dissuasion nouvelles, avec des drones sous-marins, marins ou aériens. Ne manquons pas une fois encore ce tournant du drone – car nous l'avons peut-être déjà un peu manqué.
Je vous rejoins tout à fait, cher collègue. Dans tous les cas, il est essentiel de ne pas manquer les tournants technologiques. Il y va de notre crédibilité et de notre autonomie stratégique dans les prochaines décennies. Outre le nucléaire, il y a par exemple le cyber : dans ce domaine, l'intelligence artificielle sera essentielle et nous ne pouvons pas nous permettre d'accumuler du retard. L'autonomie stratégique européenne reprend là tout son sens, puisque ce sont des projets qu'il est presque impossible de conduire seul – je pourrai en parler plus longuement si vous m'interrogez à ce propos.
Je me félicite de ce budget en hausse grâce à la LPM. Entre 2008 et 2010, les Mosellans ont perdu 7 000 emplois de militaires – sans parler du Grand Est et de Châlons-en-Champagne… L'armée constitue l'ADN de notre région, elle est chevillée à nos corps. Nous sommes heureux de constater que les militaires sont à nouveau sur le devant de la scène. Le gouverneur général de Metz tient à vous faire savoir que ce projet va dans le bon sens. Nous avons par ailleurs reçu Mme Parly à propos du volet « Famille » de la LPM, qui prend en compte les aspects sociaux et la protection des familles des militaires.
Ce budget vise-t-il à répondre à l'urgence des problèmes de nos armées ou prépare-t-il l'armée du futur ? L'armée du futur, c'est également la coopération industrielle renforcée avec nos voisins européens, même après 2025. S'y prépare-t-on déjà ? Comment la budgétise-t-on et aménage-t-on les interfaces qui permettront d'aller plus vite ? Beaucoup de pays voisins réfléchissent déjà à l'amélioration de leurs matériels et de leurs technologies. Va-t-on collaborer sur ces sujets ?
Comme l'a rappelé Annie Chapelier, le Plan d'accompagnement des familles et d'amélioration des conditions de vie des militaires, dit « plan Famille », fixe un impératif : préparer, « réparer » et prendre en compte les familles des militaires. Ainsi, 500 millions seront engagés pour faciliter l'emploi du conjoint, la mobilité, la recherche de logement et la vie au quotidien, afin d'anticiper chaque problématique.
La coopération supranationale est déjà une réalité dans les armées de l'air et dans la marine. Ces armées sont déjà interopérables, on n'en a pas forcément conscience en tant que « terrien » – ce qui était mon cas. Mais, depuis toujours, la marine et l'armée de l'air partagent le même environnement opérationnel, qui ne connaît pas de frontières physiques, même s'il existe des frontières administratives. L'interopérabilité est organisée au niveau de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) : les procédures sont similaires et les moyens interopérables.
Notre responsabilité politique est maintenant de faire en sorte que cette interopérabilité devienne une réalité dans l'industrie, où l'émiettement de capacités au sein de chaque pays est une réalité. Nous ne sommes pas les États-Unis : chaque État européen souhaite préserver son outil de défense national. L'enjeu politique est donc réel : il nous faut réaliser des économies d'échelle et disposer de matériels plus efficaces.
Je vous remercie pour ce rapport très éclairant. En tant que membre de cette commission, je suis impliquée dans les questions européennes et souhaitais vous interroger sur l'autonomie et le renforcement de l'Europe de la défense. Vous avez évoqué à plusieurs reprises la coopération structurée permanente (CSP) : à travers quel prisme peut-elle se développer ?
Elle est par ailleurs quelque peu méconnue du grand public. Pourriez-vous nous indiquer quels projets seront portés dans les mois à venir et ceux auxquels la France est favorable ?
C'est peu de dire que la CSP est méconnue du grand public… D'ailleurs le sigle ne figure même pas dans le rapport annexé à la LPM : je vous proposerai un amendement pour y remédier. Nous ne pouvons pas soutenir le projet d'autonomie stratégique européenne sans mentionner les structures que nous avons créées pour atteindre cette autonomie…
Je ne dresserai pas la liste de tous les pays qui ont rejoint la CSP en 2017, mais plutôt de ceux qui ne l'ont pas encore rejointe au sein de l'Union européenne : le Royaume-Uni, le Danemark et Malte. Cela signifie que tous les autres pays ont souhaité en faire partie. Dans ce cadre, Mme Federica Mogherini, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a lancé un appel à projets à tous les pays. Je n'en connais pas le détail – en partie confidentiel –, mais, lors du sommet de politique étrangère et de sécurité commune (PESC), elle a indiqué que les projets reçus ne sont pas structurants, mentionnant notamment de petits projets de sous-munitions… Par ailleurs, la France ne participe – de loin – qu'à quatre d'entre eux.
Pour que la CSP prenne tout son sens, nous devrions plutôt porter des projets d'avenir, comme celui du drone de moyenne altitude longue endurance (MALE), et ne pas nous contenter de microprojets – même s'ils satisfont les industries nationales de défense.
Je m'associe à mes collègues pour saluer la qualité du rapport et les orientations du projet de loi de programmation militaire. Vous l'avez rappelé, le budget approche les 2 % du PIB, comme l'a souhaité le Président de la République. Vous avez également rappelé les différents champs d'action du projet : la terre, la mer, l'air et, maintenant, le cyber.
Ma question portera précisément sur la cybersécurité, évoquée à plusieurs reprises dans votre rapport. La semaine dernière, l'Allemagne a été victime d'une attaque sans précédent. Pourriez-vous nous éclairer quant aux moyens dont la France dispose pour faire face à ces attaques ?
La France dispose de moyens et les développe. C'est un des enjeux de la LPM. Deux sites – un à Paris, l'autre à Bruz, près de Rennes – sont spécialisés et développent nos capacités cyber. L'enjeu européen ne doit pas être oublié : l'échange de données est la clé stratégique d'efficacité du cyber. Actuellement, nous sommes dans l'incapacité d'attribuer les attaques cybers. Lorsque nous indiquons qu'une attaque a été commanditée par la Russie ou un autre pays, nous signifions simplement que nous connaissons les modes d'action des différents États et les critères des attaques russes, iraniennes ou américaines. Mais il ne s'agit que d'un ressenti : nous ne pouvons pas les attribuer…
Cela sera vraisemblablement possible le jour où nous maîtriserons l'intelligence artificielle. En conséquence, nous devons réfléchir à la cybersécurité de demain et engager des moyens financiers importants – c'est prévu dans la LPM : si nous accumulons un retard trop important, certains États – en premier lieu, les États-Unis – seront en mesure d'attribuer une attaque alors que nous ne le serons toujours pas…
Il y a derrière ces attaques une véritable stratégie : on peut s'attribuer une attaque que l'on n'a pas conduite, imiter un mode d'action pour faire croire que c'est un autre pays qui a attaqué. Je le répète, l'intelligence artificielle sera vraisemblablement la clé : notre effort en matière de nouvelles technologies est vital, comme je l'ai indiqué à M. Son-Forget.
Vous avez raison, la question de l'intelligence artificielle est absolument stratégique. Une réunion de notre commission sera d'ailleurs spécifiquement consacrée à ce sujet début avril.
Madame la rapporteure pour avis, tout comme vous, je souhaite saluer les efforts et les sacrifices réalisés depuis de nombreuses années par l'ensemble des personnels militaires afin de protéger nos concitoyens.
Il est de notre responsabilité politique de travailler à l'amélioration du quotidien de toutes ces personnes, qui risquent leur vie pour nous. En octobre dernier, la ministre des armées a dévoilé le contenu de son plan Famille, qui vise à soutenir nos militaires et leurs proches. Ce plan est, me semble-t-il, pérennisé dans le cadre de la LPM. Pourriez-vous nous le confirmer et nous préciser quelles dispositions du plan sont intégrées au projet de loi ?
Effectivement, ce plan Famille et son budget figurent bien dans la LPM. La prise en compte des conditions de vie des personnels constitue une réelle avancée car les LPM étaient jusqu'à présent tournées vers les grands programmes industriels.
Ce plan comporte plusieurs axes. Le premier concerne le délai prévisionnel de mutation, puisque les militaires ne sont pas les seuls mutés – certains d'entre vous doivent connaître ce processus. Or, plus vous êtes informé tardivement d'une mutation, moins vous avez le temps de choisir un logement, une école et d'organiser votre nouvelle vie.
Le logement est également abordé : en région parisienne, la forte pression immobilière accroît les difficultés à se loger correctement. La solde de militaire suffit rarement pour disposer d'un logement décent, ce qui explique la volonté de disposer de davantage de logements sociaux pour les militaires. Certaines dispositions du projet de loi – qui ne sont pas du champ de compétence de la commission des affaires étrangères – m'ont d'ailleurs surpris car elles prévoient des cessions immobilières : quand on manque de logements pour la population militaire dans les grandes villes, je ne conçois pas que l'on puisse céder les biens immobiliers du ministère de la défense à d'autres ministères…
En outre, l'engagement de dépenses en mission est simplifié : lorsqu'ils partent en mission, les militaires engagent des dépenses de train, de logement ou de restauration. Ces dépenses seront désormais indemnisées avant le départ. Actuellement, selon le niveau de revenu des militaires concernés, cela peut ponctionner une part importante de leur reste à vivre. Il est absolument anormal que ces missions leur coûtent de l'argent. Je portais déjà cette revendication de l'intérieur : j'ai effectué beaucoup de missions qui m'ont coûté de l'argent. C'est un vrai scandale : on ne travaille pas pour dépenser son argent…
La LPM aborde également le sujet des places de crèches, les horaires atypiques ou le travail du conjoint. Toutes les problématiques ont été passées en revue par le ministère. Cet effort doit vraiment être salué.
Je joins à celles de tous mes collègues mes félicitations pour le travail de la rapporteure !
Le terrain militaire n'est absolument pas investi de façon satisfaisante par le Parlement. Au-delà de la loi de programmation militaire, le Parlement a des droits – y compris constitutionnels – qu'il exerce peu… Il ne s'agit pas d'un manque de volonté, mais plutôt d'un manque de pratique et de l'absence de processus de reporting d'informations, de documentation ou d'étude d'impact – en particulier pour les OPEX. Nous aurions l'occasion de faire un progrès en la matière.
Nous avons parlé de la classification et des opérations secrètes. Je lance un appel solennel : la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) intervient en matière de déclassification, dans le cadre d'affaires pénales dans lesquels les juges cherchent à connaître les responsabilités. Notre commission des affaires étrangères est très impliquée dans certains dossiers, comme l'assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon au Mali en 2013. La semaine dernière encore, un journaliste croate a été assassiné dans l'attentat de Ouagadougou. Malheureusement, il s'agit désormais d'un drame en continu… Or, bien souvent, quand on cherche à connaître les raisons de ces assassinats, le secret défense est opposé à la transmission d'informations.
Comme son nom l'indique, la CCSDN n'a qu'un rôle consultatif en matière de déclassification. Des sénateurs et députés sont présents en son sein et nous devrions réfléchir, afin de faire en sorte que la décision ne soit plus consultative, mais prise par un juge pénal spécialisé. Ainsi, la déclassification pourrait être réalisée sous contrôle judiciaire – et non administratif – et la confidentialité de l'enquête pénale serait maintenue.
L'actualité étant extrêmement morbide en la matière, je souhaitais faire cette proposition : nous sommes dans un État de droit et devons progresser ensemble.
Je rejoins mon collègue Jacques Maire avec qui nous nous sommes entretenus de la place des parlementaires sur les sujets relatifs à la défense nationale. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, le Parlement se prononce au bout de cent vingt jours sur la pertinence d'une opération extérieure. Vous le savez, le processus décisionnel est différent dans chaque État européen. Ainsi, en Allemagne, il est parlementaire. En France, à l'inverse, le Président de la République a les pleins pouvoirs pour engager une opération ; le Parlement est informé au bout de trois jours et saisi pour avis après cent vingt jours.
Il est absolument essentiel que nous soyons vraiment éclairés lorsque nous nous prononçons sur la pertinence d'une opération. Nous devons cet appui politique à tous nos soldats engagés en opérations. J'ai participé à des opérations extérieures et je sais combien le soutien de l'opinion publique et l'intérêt du Parlement sont essentiels dans ce métier – si on peut le considérer comme un métier : vous risquez votre vie, vous êtes loin de vos proches, dans des conditions rustiques.
Elle a eu lieu, mais elle n'est pas nécessairement pérennisée. Je ne sais pas comment nous pourrions mener ce travail. Mais il est essentiel que la représentation nationale sache où la France est engagée, pour quelles raisons et avec quels moyens.
Nous touchons là à un processus décisionnel hors du champ du projet de loi mais, vous avez raison, l'enjeu est réel. Je vous invite à me transmettre vos propositions.
Vous avez une très bonne connaissance de l'Allemagne, ma question portera donc sur les relations franco-allemandes, auxquelles vous avez consacré une partie de votre rapport. Pourriez-vous nous éclairer sur nos partenariats avec l'Allemagne ? Quels sont les groupements tactiques ou coopérations bilatérales les plus intéressants ?
Votre question intervient au bon moment, après celle sur les processus décisionnels. Si le Royaume-Uni a jusqu'à présent été considéré comme notre jumeau en la matière, ce n'est pas le cas de l'Allemagne, qui n'a pas le même processus décisionnel que nous, non plus que cette culture expéditionnaire qui nous caractérise. De par son histoire contrariée, elle n'a d'ailleurs pas l'intention de changer.
De même, notre effort – 2 % du PIB – n'a pas été mentionné dans l'accord de grande coalition en Allemagne. Il n'empêche : il n'est pas question de ne pas unir nos forces, d'autant que nous partageons la brigade franco-allemande. Cette dernière connaît des réussites et des échecs, mais elle est malgré tout la première ébauche de défense européenne. Nous ne partons donc pas de rien et avons noué beaucoup de partenariats avec ce pays.
Mais il est désormais important de fournir des preuves d'amour : l'Allemagne a constaté notre déception à propos de la coopération structurée permanente – très large et englobante, contrairement à notre souhait. En parallèle, nous avons créé l'initiative européenne d'intervention, afin de partager notre culture stratégique. L'Allemagne le voit comme une sorte de concurrente de la CSP. Nous devons mieux expliquer qu'il ne s'agit pas d'une création ad hoc destinée à contrer les orientations prises par la coopération structurée permanente, mais de deux entités distinctes, qui ont intérêt à travailler ensemble.
Cette initiative n'a pas forcément été très bien perçue côté allemand… Nous avons donc intérêt à nous impliquer davantage dans la CSP, sur la base de vrais projets structurants.
Je remercie notre rapporteure pour ce travail éclairant, sur un dossier extrêmement complexe. À aucun moment, le projet de loi de programmation n'évoque le service national universel ou le service militaire volontaire (SMV). Pourtant, il s'agit d'un engagement de campagne du Président de la République. Cela va par ailleurs avoir un impact sur nos forces armées. Disposez-vous d'informations complémentaires ?
Vous évoquez deux sujets différents. Le SMV existe déjà et vise à former des jeunes qui ne sont plus en études et n'ont pas d'emploi, afin qu'ils accèdent plus facilement au monde du travail.
En aucun cas, le budget du service national universel n'est prévu par la LPM. Il a été dit et rappelé que l'effort serait interministériel. Pourquoi ? La réflexion, historique et philosophique, n'est pas nouvelle. En 1891, après l'instauration du service militaire obligatoire, Lyautey, dans Le rôle social de l'officier, évoquait déjà les « curés sac au dos ». L'histoire se répète : il s'agissait à l'époque de faire cesser la lutte des classes en enrôlant tous les Français. Aujourd'hui, la question se pose à nouveau : le Président veut redonner du sens à la notion d'engagement. Il estime que porter ces valeurs militaires – reconnues depuis toujours – de dépassement de l'intérêt individuel et de dévouement à l'intérêt collectif a du sens et mérite d'être réinscrit dans la vie de chacun de nos concitoyens de dix-huit à vingt et un ans. La forme n'en est pas encore arrêtée, mais il sera bien universel et obligatoire afin de montrer que, si, pour tous, la joie de l'âme n'est pas dans l'action, elle se trouve dans l'engagement.
Je m'associe aux félicitations de mes collègues, tout comme à l'interpellation de mon collègue Jacques Maire. Avant-hier, nous avons reçu l'association des amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, qui nous a à nouveau sensibilisés à cette question du secret défense.
La France est engagée dans de nombreuses coopérations militaires bilatérales, mais également au sein de l'OTAN. Par ailleurs, notre pays a relancé l'Europe de la défense – que beaucoup d'entre nous appelons de nos voeux – en particulier par le jeu de la coopération structurée permanente : ces différents engagements sont-ils complémentaires, voire compatibles ? Vos auditions vous ont-elles permis de constater comment la France était perçue par ses partenaires suite à cette initiative ?
Votre question est vaste et complexe : je vais essayer d'être la plus simple et la plus claire possible ! Il faut arrêter de céder à cette tentation consistant à toujours tout opposer : l'autonomie stratégique nationale ne s'oppose pas à l'autonomie stratégique européenne, l'Europe de la défense ne s'oppose pas à l'OTAN. Il s'agit d'initiatives complémentaires. Les capacités sont d'ailleurs les mêmes. Il n'y a donc pas opposition.
La France doit être plus claire vis-à-vis à l'OTAN, mes auditions m'ont permis de le comprendre. Cela me laissait perplexe depuis longtemps… Nous avons la fâcheuse tendance de souffler le chaud et le froid à l'OTAN : nous avons récemment rejoint le commandement intégré, mais disposons toujours un statut spécial. Nous apportons des moyens – ainsi des unités stationnées dans les pays Baltes –, sommes engagés régulièrement mais posons toujours nos conditions… Passez-moi l'expression, mais cela nous « grille » un peu…
La LPM pérennise notre engagement dans la présence avancée rehaussée de l'OTAN. Notre discours doit désormais être plus positif et moins restrictif ! Les responsables de l'OTAN ont une perception très ambivalente de la France, du fait de notre comportement : nous participons toujours, mais jamais de façon très ferme ou très claire, et toujours en émettant des réserves.
Cette clarification ne sera pas sans conséquence sur la perception de la France par ses partenaires européens. Beaucoup d'anciens pays d'Europe de l'Est ont rejoint l'OTAN avant de rejoindre l'Union européenne. C'était pour eux un gage viscéral de sécurité. Notre attitude vis-à-vis de l'OTAN ne les rassure donc pas.
C'est le sens de plusieurs de mes amendements : un message plus clair et plus positif envers l'OTAN. Cet engagement complète parfaitement l'autonomie stratégique européenne. Celle-ci est nécessaire : rendue possible par le renseignement, elle nous a permis de ne pas suivre les Américains en Irak en 2003. Nous en sommes ici tous ravis.
Permettez-moi d'ajouter que nous n'avons pas suivi la position américaine à propos de l'Irak car la position politique française, portée par le Président de la République de l'époque, M. Jacques Chirac, était très claire. Nous devons lui en être reconnaissants.
Le programme du Président de la République prévoyait la création d'un service militaire – le terme « militaire » était bien employé. Dans sa forme initiale, ce projet était très coûteux – on évoquait plusieurs milliards d'euros. A-t-il évolué pour devenir mixte – mi-militaire et mi-civil ? Dans ce cas, quel est son coût résiduel pour le ministère de la défense ? Ces sommes relativement importantes ont-elles été intégrées à la LPM ?
Le budget du service national universel (SNU) n'a pas du tout été intégré dans la LPM puisqu'il est pensé en interministériel. Le coût évoqué était de 3 milliards, ce qui a suscité en interne une levée de boucliers au motif que cela équivalait au coût de la dissuasion nucléaire. Un rapport sur ce SNU doit être rendu fin avril au Président de la République. Je crois que le dispositif s'oriente vers un service civique avec une partie militaire. Le but, mais je m'avance peut-être un peu, est de promouvoir les valeurs d'engagement, de dévouement et de dépassement de l'intérêt immédiat, que l'on trouve à l'armée. Nous en saurons plus à la remise du rapport.
Nous connaissons un bouleversement du monde, où les technologies s'immiscent dans de très nombreuses décisions politiques. Avant d'être député, j'étais spécialiste des questions de transformation numérique. La vitesse à laquelle apparaissent les transformations est très sous-estimée : l'idée de transporter des charges lourdes avec des drones était impensable il y a trois ans, l'idée de satellites capables de durer plus d'une quinzaine d'années aussi… Des start-up, notamment dans des pays comme les États-Unis, la Chine, la Russie, sont en train de démontrer que l'impensable est en fait possible. L'idée d'une commission, plutôt qu'un simple office scientifique et technique, qui aiderait les autres commissions à réfléchir à ces enjeux fondamentaux, mériterait donc d'être étudiée.
Au niveau militaire, le bouleversement est du niveau de l'invention de l'avion ou du fusil. Nous aurons dans ce budget – je l'ai vécu comme fournisseur – une opposition entre l'ancien et le nouveau mondes militaires. Il faudra être vigilant et régulièrement examiner si nous suivons bien ces évolutions technologiques.
Je vous rejoins quant à la nécessité de prendre en compte des bouleversements liés à l'arrivée des nouvelles technologies et d'unir nos forces avec nos partenaires. Je nuancerai cependant l'idée de bouleversement stratégique. Pour m'être beaucoup penchée sur les questions de guerre hybride, je constate que c'est quelque chose qu'on a l'impression de découvrir, par exemple l'utilisation des réseaux sociaux, alors que l'action sur les perceptions, les manipulations de la population civile ont toujours existé. Les nouvelles technologies ne transforment pas l'art de la guerre, même si elles accélèrent certaines techniques.
Le report dans le futur, notamment le prochain mandat, des engagements budgétaires de cette LPM donne le sentiment que l'on affiche des engagements mais que l'on n'en assume pas la responsabilité.
Le SNU sera financé, si j'ai bien compris, en interministériel. Mais seul le ministère de la défense en serait exclu puisque rien n'est affiché dans ce budget, c'est tout de même curieux…
Quant à la limitation à trois du nombre des OPEX, elle est intellectuellement choquante, surtout alors que le contexte international est particulièrement violent.
Enfin, quel sera le contenu du fonds européen de la défense et ses implications financières pour notre pays ? Signifiera-t-il un transfert de compétences ?
J'aurais bien sûr préféré une progression budgétaire linéaire dans le temps, alors qu'elle va suivre une courbe exponentielle avec une montée en puissance assez faible, je vous l'accorde, mais en aucun cas elle ne baisse ni ne traduit un désengagement. Quand nous voterons chaque année le projet de loi de finances et que, chaque année, les Français verront le budget de la défense augmenter tandis que les autres budgets diminuent ou stagnent, il faudra se battre pour garder le cap et convaincre l'opinion publique que, s'il n'y a pas eu d'attaques terroristes depuis quelque temps, c'est bien parce que l'effort consenti permet de les contrer.
Le SNU est entouré de beaucoup d'ombre ; par respect pour les rapporteurs qui travaillent sur ce sujet, je préfère ne pas parler en leur nom.
En ce qui concerne les OPEX, comme l'a dit le général Desportes, souvent on a déshabillé Paul pour habiller Jacques. L'enjeu est d'agréger nos alliés, et c'est l'objet de l'un de mes amendements. Nous ne sommes pas seuls : le Royaume-Uni fournit des Chinook au Sahel, les Allemands assurent une présence logistique… L'idée de partage du fardeau et de vision stratégique commune est essentielle.
Le fonds européen de la défense est une structure naissante. Cela fait des mois que je cherche à savoir d'où vient l'argent. Comme il n'est pas prévu dans la LPM, il serait prélevé sur le budget de l'Union européenne que nous avons voté à hauteur de 20 milliards d'euros. Cela implique de se mettre d'accord sur la ligne budgétaire que nous diminuerons. Pour l'instant, un programme de développement des capacités de défense devrait être doté d'un montant de 500 millions d'euros jusqu'en 2019, puis il pourrait bénéficier d'un milliard d'euros annuel après 2020. Cela pourrait permettre de développer des capacités que l'on ne peut plus développer seul : drones armés, intelligence artificielle…
L'importance du Parlement en matière militaire est en réalité très faible, ce dont le secret défense n'est qu'une illustration parmi d'autres. Notre système est très différent des autres pays européens. Chez nous, le secret défense est complètement dans la main de l'exécutif, comme toutes les affaires militaires, et je trouve que c'est un mauvais choix. Si le secret défense doit être levé, c'est par l'intermédiaire, cela a été dit, d'une intervention pénale, et je ne vois pas comment quelqu'un d'autre que les magistrats judiciaires pourraient intervenir. Cela pose la question de la faiblesse de notre pouvoir. Nous n'avons de fait qu'un pouvoir d'avis sur les questions militaires car nous sommes complètement dépendants de toute déclaration militaire, que nous apprenons par voie de presse la plupart du temps, y compris les OPEX. Les Français ne savent pas que nous avons des soldats partout. Même dans le budget, nous sommes très liés par la proposition que nous fait l'exécutif. Dans le monde tel que nous le connaissons, il va falloir changer cette politique.
Je vous ai par ailleurs trouvée, madame la rapporteure pour avis, très complaisante à l'égard des Allemands. Vous avez l'air d'accepter que leur tradition militaire les empêche de participer à des OPEX. Or, le Japon, qui avait exactement la même politique que l'Allemagne, est en train de lever cette tradition. C'est un peu facile de dire que l'on a une tradition militaire et de reprocher en même temps aux Français d'avoir des réserves à l'égard de l'OTAN. L'Allemagne, qui a, malgré sa tradition, un budget militaire supérieur au nôtre, choisit en réalité de s'intéresser à certains enjeux plutôt qu'à d'autres : pays Baltes, Ukraine, où elle est très présente… Les dernières déclarations de l'ersatz de Gouvernement allemand nous montrent que nos deux pays ne sont pas près de se rapprocher au point de vue militaire, au contraire. Je regrette que nous perdions notre meilleur allié en Europe, l'Angleterre, et je trouve que vous êtes un peu trop gentille avec les Allemands.
Je souligne le même paradoxe dans la combinaison de vos deux remarques. Vous déplorez le peu d'importance du Parlement en France et en même temps – car vous êtes dans le « en même temps » (Sourires.) – vous soulignez une prétendue complaisance de ma part envers les Allemands, alors qu'ils ont un véritable régime parlementaire : rien ne se fait au niveau de l'exécutif sans le Bundestag.
Les Japonais, qui sont exactement dans la même situation historique que l'Allemagne, viennent de décider, parce que le contexte international est devenu extrêmement dangereux, de revenir sur leur doctrine de neutralisme, alors que le sujet est encore plus présent dans l'esprit des Japonais, pour de nombreuses raisons, notamment ce qui s'est passé à Nagasaki et Hiroshima. Le maintien de cette même doctrine de neutralisme est, je trouve, un peu rude de la part de ceux qui sont nos alliés privilégiés en Europe, depuis que l'Angleterre a décidé de partir.
J'ai vécu quatre ans en Allemagne. Dire que nous sommes une armée expéditionnaire tandis qu'eux ne sont bons qu'à nous accompagner au plan logistique, n'est pas la meilleure façon de communiquer auprès d'eux. Il faudrait d'abord se doter d'une vraie photographie de qui peut quoi : les processus décisionnels, les moyens financiers, le degré d'acceptabilité de pertes de soldats au front… Tout cela manque. D'où l'idée française, que je salue, d'une initiative européenne d'intervention. Tant que ce travail ne sera pas conduit, nos collaborations resteront au fil de l'eau.
On note tout de même une évolution, puisque l'Allemagne participe davantage aujourd'hui à des OPEX, le plus souvent au plan logistique, certes, mais avec 2 500 hommes, je crois, sur le terrain.
La commission passe à l'examen des articles.
Article 1er
L'article 1er fixe les objectifs de la politique de défense et de la programmation financière.
Suivant la proposition de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 1er sans modification.
Article 2
L'article 2 approuve un rapport annexé précisant les objectifs de la politique de défense ainsi que les ressources et les besoins prévus pour les atteindre, ce rapport pouvant lui-même être amendé.
La commission se saisit des amendements AE11, AE12, AE13, AE14, AE15, AE18 de la rapporteure pour avis
Je présenterai en même temps mes treize amendements à cet article. Mon but est de donner des signes d'amour à nos alliés. Le texte est franco-français et destiné à nos armées, mais il n'empêche qu'il sera épluché par nos différents alliés, en Europe, à l'OTAN, en Afrique, et il est important de saisir cette occasion pour conduire une sorte de diplomatie militaire et montrer notre attachement à tous ces partenariats que nous avons créés. C'est le sens de mes amendements.
Nous contestons la validité des critères, et en particulier les 2 % du PIB. La Grande-Bretagne a vu ses capacités militaires diminuer, or elle n'a aucune difficulté à respecter le critère. À l'inverse, l'Allemagne a vu ses capacités nettement augmenter et elle a de gros problèmes, compte tenu de son PIB, pour arriver à 2 %. Ce budget est établi en euros courants et non en euros constants. Je pense qu'il serait beaucoup plus juste, plus lisible, plus pertinent de parler en euros constants.
La commission des finances est également saisie pour avis de cette LPM et je lui laisse le soin de vous répondre.
La commission adopte les amendements.
Elle se saisit ensuite de l'amendement AE6 de Mme Annie Chapelier.
Nous souhaitons expliciter les choses, en ne faisant pas seulement référence à la force G5 Sahel mais aussi au support qu'on lui apporte.
Face à la dégradation continue de la situation sécuritaire dans la bande saharo-sahélienne, la création d'une force militaire conjointe offre une réelle occasion de sortie de crise et de réappropriation des enjeux de sécurité par les acteurs étatiques de la région. Agissons pour qu'elle soit opérationnelle rapidement pour venir en soutien à nos forces dans cet immense territoire.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite les amendements AE19 et AE16 de la rapporteure pour avis.
Puis elle se saisit de l'amendement AE8 de Mme Annie Chapelier.
Cet amendement fait référence, dans le cadre des « trois D », développement, défense, diplomatie, à la relation entre défense et développement. Du fait de la déstabilisation des territoires, nous ne souhaitons pas les abandonner en termes de développement. Alors que nous nous en serions retirés, il faut à présent augmenter notre présence, ce qui suppose une coordination opérationnelle entre les forces militaires et les forces de développement, ce qui n'est pas simple. Des opérations civilo-militaires existent, plutôt pour la bonne image des armées, mais les acteurs du développement, que ce soient les ONG ou les opérateurs publics, ne souhaitent pas être associés aux forces armées. Or cette coopération est nécessaire, et il existe d'ailleurs déjà un accord entre l'état-major des armées et l'Agence française de développement (AFD). Il faut y faire référence de façon précise : c'est le second point de l'amendement.
Le premier point est plus spécifique. Le champ de nos objectifs de développement a été élargi à des objectifs de sécurité et d'intérêt public, comme le trafic de main-d'oeuvre et la lutte contre la drogue et les passeurs. Les moyens d'intervention militaire peuvent être utilisés et ne le sont pas toujours, pour des raisons de priorité : par exemple pour l'utilisation des satellites, on va évidemment privilégier la lutte contre le terrorisme à la lutte contre la drogue. Il faut cependant l'évoquer, car cela fait partie de l'acceptabilité de ces forces sur les théâtres d'opération.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement AE17 de la rapporteure pour avis.
La commission se saisit de l'amendement AE20 de la rapporteure pour avis.
J'ai voulu montrer que tout ce que l'on met en place au plan européen s'appuie sur une série d'initiatives et de structures, et qu'il faut en tirer les conclusions avant de créer quelque chose. Je vous invite à sous-amender l'amendement si vous pensez qu'il est perfectible.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle se saisit de l'amendement AE7 de Mme Annie Chapelier.
L'aide au développement ne peut concerner la défense. Quand un pays s'effondre au plan budgétaire parce que toutes ses ressources vont vers la défense et assèchent complètement les budgets sociaux d'éducation, de santé et d'emploi, on renforce les conditions de développement du terrorisme. Il n'y a pas de consensus international pour faire considérer que les budgets militaires ou de sécurité soient considérés comme une aide au développement. Un moyen de contournement, ce sont les crédits budgétaires : c'est une forme d'hypocrisie, dans laquelle on apporte une aide budgétaire à un État et, comme le budget de l'État est une boîte noire, l'État peut réaliser des transferts vers la défense tout en disant que l'aide va à l'éducation. La solution est de faire monter en puissance des aides liées à la sécurité intérieure et à la défense. Elles existent déjà mais sont encore faibles. La facilité de paix pour l'Afrique (APF) de l'Union européenne est petite et a été préemptée par les Anglais pour la Somalie à hauteur de près de 80 %. On essaye aussi de le faire avec des financements ad hoc dans le cadre du G5 Sahel, avec 413 millions d'euros débloqués, mais sur une base qui implique des contributions d'État. Le sujet est devant nous. Il est difficile car les ONG et l'opinion publique ne sont pas forcément ouvertes à l'idée de financer la défense, et en même temps on a besoin d'États fonctionnels et sécurisés pour permettre le développement.
L'amendement vise à mettre l'accent sur la nécessité de renforcer les capacités de financement européennes et internationales dans le domaine de la défense.
Suivant la proposition de la rapporteure pour avis, la commission adopte cet amendement.
Puis elle émet un avis favorable à l'adoption de l'article 2 modifié.
Article 3
Suivant la proposition de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 3, sans modification.
Article 4
L'article 4 précise la dotation annuelle prévue pour faire face aux OPEX et aux missions intérieures.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 4, sans modification.
Sur cet article 4 que nous venons d'adopter, je souhaite vous faire une suggestion qui concerne notre commission.
L'alinéa 4 dispose : « Les opérations extérieures et les missions intérieures en cours font, chaque année, l'objet d'une information au Parlement. À ce titre, le Gouvernement communique aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un bilan opérationnel et financier relatif à ces opérations extérieures et missions intérieures. » Notre commission permanente n'aurait-elle pas à exprimer un avis ? On pourrait examiner la possibilité, mais ce que je vous suggère ici, c'est que notre commission soit désormais considérée comme compétente sur les OPEX. Je ne vois pas pourquoi nous ne le sommes pas : ces opérations concernent la stratégie, la diplomatie, l'influence, la sécurité de la France. Je propose donc une démarche en ce sens auprès du président de l'Assemblée.
Tout le monde est d'accord ? Merci.
Article 5
L'article 5 présente les évolutions prévues des effectifs du ministère des armées pour la période de 2019 à 2025.
Suivant la proposition de la rapporteure pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 5 sans modification.
Article 6
Cet article organise le principe d'une actualisation de la programmation militaire, notamment en 2021.
Je ne peux qu'y être favorable, d'autant que nous venons d'accepter collectivement les nouvelles responsabilités proposées par la présidente. C'est un devoir de nous sentir concernés et de nous prononcer en 2021.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 6, sans modification.
Nous en avons fini avec le titre premier du projet de loi de programmation. Nous allons à présent examiner les dispositions normatives dont la commission s'est saisie.
Article 18
Quand bien même cet article peut sembler éloigné du champ de compétences de notre commission, il m'a semblé que nous pouvions nous saisir de la question des droits politiques des militaires. Il y aurait, à cet égard, un parallèle intéressant à tracer avec les ressortissants de l'Union européenne présents sur notre sol, en faveur desquels le code électoral prévoit des droits politiques. J'ai reçu la directrice des affaires juridiques de la ministre sur ce sujet que j'avais déjà vécu « de l'intérieur ».
La question est assez complexe. Pour qualifier l'engagement des militaires, une formule revient cependant souvent : « Servir, avant de se servir ». Il est important pour eux de ne cumuler ni des fonctions qui ne peuvent l'être, ni des revenus financiers, comme ce serait le cas s'ils cumulaient des fonctions de militaire et de conseiller régional ou départemental. Un tel cumul de fonctions et de rémunérations va à l'encontre de l'esprit militaire.
Pour ma part, je suis détachée sans solde. Ne pas cumuler la rémunération de mon activité de députée avec celle de mon activité de militaire m'apparaît comme une évidence. Je n'ai donc pas proposé le cumul de la fonction de militaire avec un mandat régional, départemental ou national.
En revanche, il ne me semble pas acceptable que les militaires ne puissent être élus comme conseillers municipaux que dans des communes de moins de 3 500 habitants. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, vise précisément à réduire le nombre de ces communes : dans ma circonscription, il y en a moins de 50 aujourd'hui contre 86 en 2014. Limiter l'autorisation à des collectivités dont le nombre est en voie de réduction reviendra donc vite à une interdiction de fait.
C'est pourquoi, au nom de mon groupe politique, je défends un amendement visant à doubler le seuil, afin d'autoriser les militaires à être élus conseillers municipaux dans les communes de moins de 7 000 habitants. Cela permet d'englober un nombre considérable de communes et de concitoyens, mais aussi de conserver l'aspect bénévole de cet engagement, auquel les militaires sont très attachés.
La commission de la défense adhère du reste à ce principe. Elle formulera des propositions similaires, voire qui iront plus loin encore : elle dispose encore d'une semaine pour en débattre.
La commission se saisit de l'amendement AE9 de Mme Annie Chapelier.
Il s'agit d'un amendement d'appel. L'armée française est l'armée la plus féminisée d'Europe, mais nous restons sous le seuil des 20 % que nous nous étions fixé comme objectif. Dans ce contexte, une mesure symbolique, telle que la féminisation des titres, peut revêtir de l'importance. Elle peut contribuer positivement à modifier la perception de notre armée.
Notre rapporteure en donne un exemple. Outre qu'elle est une militaire dont personne ne discute la légitimité ni les compétences, elle est une femme, ce qui contredit une certaine vision populaire de l'armée.
Aussi, nous voulons féminiser le texte de la loi, en proposant d'y employer aussi, lorsque c'est possible, le féminin : « le ou la militaire », « le ou la réserviste », « le blessé ou la blessée »…
Même si elle n'est que symbolique, cette mesure pourrait améliorer la mixité du recrutement dans l'armée, gage d'amélioration du point de vue tant qualitatif que quantitatif.
Avis favorable. La délégation aux droits des femmes de notre assemblée pourrait se saisir de cette question. Créée en 2014 par le ministre Le Drian, la cellule Thémis travaille déjà aujourd'hui à promouvoir l'égalité et à lutter contre les discriminations en tous genres. Il me semble que la délégation, dont vous êtes membre, pourrait faire un état des lieux de ce sujet.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle se saisit de l'amendement AE10 de Mme Annie Chapelier.
Mettre fin à un statut militaire interdisant les fonctions électives nous satisfait pleinement, mais nous avons du mal à comprendre la logique de la proposition de notre rapporteure pour avis. Il n'existe pas deux sortes de citoyens français, pourquoi dès lors fixer à 7 000 le nombre maximal d'habitants des communes où les militaires pourraient siéger au conseil municipal ? Ce critère n'existe nulle part. Pourquoi un tel mandat ne représenterait-il pas une charge de travail comme ceux de conseiller départemental ou régional ? Il n'y a pas deux sortes d'élus.
« Servir sans se servir », dites-vous par ailleurs. Certes, mais tous les parlementaires ici présents ont le sentiment de « servir sans se servir », mais ils touchent une indemnité. C'est un problème philosophique qui est ici posé – libre à celui qui le souhaite de ne pas percevoir son indemnité – et il ne me semble pas possible d'utiliser votre argument en séance publique sans que cela fasse du bruit.
Sortir de l'interdiction faite au militaire de se présenter à toutes les élections, très bien, mais sans faire de distinction entre les mandats, ce qui poserait en outre un vrai problème de constitutionnalité, quoi que vous en ait dit la directrice des affaires juridiques du ministre. L'égalité des citoyens devant la loi est en effet un principe constitutionnel qui vaut aussi pour la possibilité de se présenter à des élections. Seul l'accès aux élections nationales pourrait leur être refusé – et encore – au motif que le Parlement vote les crédits militaires. Mais que dire alors des médecins qui se prononcent sur la loi de financement de la sécurité sociale ou des instituteurs qui votent les crédits de l'enseignement ?
Je partage ces réflexions. Réfléchir à l'accès des militaires à des fonctions électives est pertinent, mais comment les dispositions pourront-elles en pratique s'appliquer ? Le bénévolat n'est en tout état de cause pas opportun. Les militaires qui le veulent pourraient reverser leur indemnité à des associations, au cas par cas.
Je ne comprends pas par ailleurs comment vous en êtes venue à proposer le seuil de 7 000 habitants : s'agit-il uniquement de doubler le seuil actuel ?
Je partage ces interrogations.
S'il faut poser un seuil, retenons l'un de ceux que prévoit l'article 2121-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) : celui de 3 500 habitants y figure, pas celui de7 000 ! Sans même parler d'inconstitutionnalité, respectez au moins le CGCT.
Par ailleurs, il ne me semble pas opportun d'évoquer dans l'exposé des motifs la poursuite de la baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des communes.
J'irai dans le même sens, mais Talleyrand ne disait-il pas : « Mieux vaut se répéter que se contredire »… Dans le CGCT, le seuil de 7 000 habitants n'existe nulle part. Si on veut relever le seuil, le minimum prévu est 9 000 habitants.
Lors d'une précédente audition, j'ai été très touché, madame la rapporteure pour avis, par votre argumentaire quant à la sortie du statut de militaire. Je vous avoue que j'ai alors découvert toutes les limitations qu'il comporte : j'ignorais qu'il leur était interdit de se présenter aux élections municipales. Supprimer tout cela est donc opportun, mais pourquoi édicter de nouvelles limitations ? J'ai été atterré que vous proposiez d'interdire aux militaires l'accès aux mandats départementaux et régionaux. Le Conseil constitutionnel aura vite fait de retoquer une telle disposition !
S'agissant du bénévolat, je vous invite à relire les magnifiques discours tenus devant la Convention. À vous suivre, on pourrait aussi bien rétablir le suffrage censitaire… L'indemnité des élus n'est pas une possibilité de se servir, elle permet, au contraire, aux filles et fils du peuple d'accéder aux fonctions électives.
Personne ne se sert ! Arrêtons avec ce type de slogans. Nous avons bien du mal à revaloriser l'action publique, politique et parlementaire, où allons-nous si les députés eux-mêmes disent qu'il faut « servir au lieu de se servir » ? ! Pour ma part, je n'ai pas du tout l'impression de me servir.
La seule question est de lever l'interdiction faite aux militaires d'accéder aux fonctions électives.
Mon collègue a cité Talleyrand, j'évoquerai quant à moi le général Boulanger, mort depuis longtemps, tristement. C'est à lui que nous devons le statut actuel. Son tombeau est à Paris et je ne vous invite pas forcément à le visiter.
Puisque nous sommes en train de lever l'interdiction qui pèse sur les militaires, il me semble qu'il faut aller jusqu'au bout, sans prévoir de seuil, ce qui ne tiendrait pas devant le Conseil constitutionnel.
Les militaires ne sont-ils pas, après tout, des fonctionnaires comme les autres, auxquels doivent s'appliquer les mêmes incompatibilités mais pas davantage ? Leur intégration dans les conseils des collectivités territoriales me semble saine. Il est d'ailleurs probablement plus astreignant d'être conseiller municipal d'une commune de moins de 3 500 habitants que d'être élu de Paris, où l'administration de la ville fait tout à votre place (Sourires.).
Au vu de ce débat très intéressant sur la place du militaire au sein de la Nation, il me paraîtrait sage de retirer l'amendement, pour mieux reprendre la discussion en séance publique.
Madame la rapporteure pour avis, vous êtes députée, vous êtes militaire. La question vous concerne donc à titre personnel et, au fond, vous avez créé un précédent : un militaire peut être député, mais il ne peut être élu d'une commune de 5 000 habitants…
Je n'aime pas trop raconter ma vie mais, en l'occurrence, cela pourrait vous éclairer. Lorsque je me suis installée dans mon petit village de Turquant en 2014, j'ai souhaité m'impliquer dans la vie de la commune qui m'avait très bien accueillie – nous, militaires, sommes souvent très mobiles et j'arrivais d'Allemagne. Souhaitant devenir membre du conseil municipal, j'ai épluché le statut général des militaires et j'y ai vraiment constaté une certaine schizophrénie. Ainsi, il est interdit aux militaires d'adhérer à un parti, sauf en période de campagne électorale… De même, les militaires, n'étant pas des prisonniers de droit commun, ont le droit de se présenter à toute élection mais leur élection entraîne un détachement sans solde pour exercice de mandat électif. Réaliste lorsqu'il s'agit d'un mandat de député, de conseiller régional ou de conseiller départemental, cette disposition cesse de l'être dans le cas d'un conseiller municipal, au mandat bénévole. J'ai compensé cette déception en m'impliquant dans le milieu associatif local, et j'ai contacté un officier de la marine qui, lui, avait franchi le pas. L'élection de ce capitaine de vaisseau avait créé un précédent, et le Conseil constitutionnel – qu'il avait saisi par voie de question prioritaire de constitutionnalité en se fondant sur l'article de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui dispose que la loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société – lui a donné gain de cause en 2014, déclarant inconstitutionnelles les dispositions en questions. Le Conseil a en outre demandé au législateur de régler la question avant les prochaines élections municipales, qui doivent se tenir en 2020.
En soulevant le problème, je voulais plutôt, chers collègues, vous éclairer en vue des débats qui auront lieu dans l'hémicycle et sensibiliser la commission de la défense nationale et des forces armées, car la question est de sa responsabilité, non du ressort de notre commission. Évidemment, l'indemnité est méritée, et, souvent, elle ne fait que couvrir les frais des élus locaux.
Oui, je suis précurseure, et mon élection a pu susciter certaines incompréhensions : « Ah bon ? Nous avons le droit ? » La culture d'un corps n'évolue pas toujours au rythme des événements, et la question est d'une grande complexité : il y a les attentes des militaires, le fait que l'armée est dans la nation – pourquoi parle-t-on de lien entre l'armée et la nation ? L'armée est dans la nation ! –, des considérations philosophiques, l'obligation de neutralité, l'obligation de disponibilité absolue, un engagement « en tous temps et en tous lieux », et la participation à la vie de la cité.
La portée symbolique me paraît forte, mais je ne suis pas entrée dans les plus fines subtilités du droit électoral, l'organisation des municipalités et les différents seuils. Je me suis contentée de regarder les droits dont jouissent les citoyens européens sur notre sol, et j'ai proposé un doublement du seuil concerné pour faire un appel du pied à la commission de la défense, dans l'espoir qu'elle aille plus loin. Je voulais avant tout vous sensibiliser.
Tout ceci est extrêmement intéressant, mais si l'amendement n'est pas recevable, cela ne fera pas progresser le débat. Rouvrons-le plutôt dans l'hémicycle.
Nous sommes tous d'accord avec l'esprit dont procède l'amendement. Certes, cet amendement ne convient pas, mais il en faut un : s'il n'y a pas d'amendement, il n'y a pas de débat. Celui dont nous débattons présentement pourrait être retiré au profit d'un autre, par lequel notre rapporteure pour avis proposerait d'ouvrir la possibilité de se présenter à toute fonction élective. Mais, si nous nous en tenons à ce doublement du seuil, le Gouvernement ne pourra pas se prononcer en faveur de l'amendement et la discussion s'arrêtera à des considérations techniques.
J'aurais aimé entendre le point de vue de M. Girardin, qui est à l'origine de l'amendement que nous examinons.
En somme, tout le monde souhaite une réécriture de cet amendement, pour que la proposition soit plus audible et plus acceptable. Nous n'en ouvrons pas moins un débat tout à fait intéressant et objectif, auquel je n'ajouterai que ceci : finalement, nous avons une bonne occasion de remettre les militaires dans le jeu de la société civile, en leur proposant de participer à la vie de la cité. En outre, je pense qu'ils pourraient nous apporter beaucoup en ces temps où la résilience de la nation est maintes fois évoquée. Chacun doit porter, individuellement, face aux menaces auxquelles nous sommes exposés, ce principe de défense. Les enjeux sont importants, et nous devons réécrire l'amendement proposé.
J'abonde dans le sens de M. Girardin : l'amendement doit être retiré et un nouvel amendement écrit.
À la suite de notre débat, il serait effectivement opportun que Mme la rapporteure pour avis, si elle en est d'accord, rédige un nouvel amendement. Nous pourrions alors débattre de la question en séance plénière.
L'amendement AE10 est retiré.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 18 modifié.
Article 23
Je suis très favorable à cet article. Lors de la discussion générale, certains collègues souhaitaient des informations complémentaires sur les prélèvements biologiques en opérations. J'ai longuement discuté avec la directrice des Affaires juridiques de la ministre, mais également avec des militaires de rang. Je tiens à lever une inquiétude : il ne s'agit pas de systématiser ces prélèvements biologiques. En effet, l'armée française est soucieuse – et reconnue pour cela – de « la conquête des coeurs » des populations locales. Il n'est donc pas question de systématiser le fichage de ces populations sur un théâtre d'opération, mais simplement de protéger davantage les militaires.
Les relevés seront exclusivement salivaires – afin d'être le moins intrusif possible. Là où des engins explosifs improvisés (IED pour improvised explosive device) ont été posés ou à proximité d'un lieu d'attaque de l'armée française, si des individus au comportement suspect sont fichés, cela nous permettra de recouper les informations et de protéger nos militaires.
Nous ne jugeons pas ici des intentions, mais de la rédaction : vous conviendrez que ces « raisons précises et sérieuses » sont sujettes à interprétation. Y aura-t-il un contrôle de ce fichier de prélèvements biologiques ? Sauf erreur de ma part, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) n'est pas compétente. Il serait bon de revoir cela en séance publique.
Je partage les interrogations de ma collègue. Elle a raison, la CNIL ne contrôlera pas ce fichier. Bien évidemment, nous ne contestons pas l'intérêt de l'article 23, qui apporte des moyens supplémentaires d'action à nos forces armées et les sécurise ainsi. Mais cet article évoque des « raisons précises et sérieuses » et la possibilité de prélèvements sur des populations civiles. Nous ne remettons pas en cause l'article dans sa portée, mais dans ses modalités de contrôle. Nous devons imaginer un moyen de mieux contrôler ce fichier.
J'ai eu beaucoup de retours du terrain à ce sujet. Les conflits modernes – c'est toute la difficulté pour les militaires – accroissent la porosité entre les combattants et les civils : le civil rencontré la veille sur un marché devient le combattant du lendemain. J'ai été amenée à me poser des questions philosophiques sur les enfants soldats : sont-ils avant tout des enfants ou des soldats ? Sont-ils des enfants soldats ou des soldats enfants ? Cette porosité crée une véritable complexité sur le terrain. Une étude sérieuse a été réalisée par la directrice des affaires juridiques, afin que cet article soit conforme au droit public international et que la mesure soit proportionnée. Les militaires français sont très attachés à cet article.
Quelqu'un doit juger de cette proportionnalité et ce ne peut être celui qui fait le prélèvement ou crée le fichier ! D'où notre volonté de prévoir un véritable contrôle et d'associer la CNIL.
Nous ne souhaitons ni supprimer, ni réécrire l'article. Il me paraît suffisamment clair. Vous avez raison, à aucun moment, on ne peut être certain qu'un civil ne va pas commettre des actions d'ordre militaire, le lendemain ou le soir même. Nous nous posons simplement la question du contrôle. En l'état actuel de sa rédaction, cet article laisse le champ libre à l'action sans contrôle. Les risques sont évidents.
Je peux vous faire une proposition. Nous sommes nombreux à être attachés à la place du Parlement et il dispose d'outils de contrôle : la délégation parlementaire au renseignement pourrait peut-être se saisir de ces données statistiques et évaluer si les contrôles ont été trop importants ou insuffisants ?
Je vous entends, nous pouvons tout à fait saisir la délégation de cette question. Avant le débat dans l'hémicycle, notre commission peut également réfléchir à cette question du contrôle, de sa proportionnalité et de la place de la CNIL. Nous ne sommes pour le moment pas en mesure d'amender l'article.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 23 sans modification.
Article 24
Cet article tire les conséquences de la ratification par la France de plusieurs conventions et protocoles.
Je suis très favorable aux articles 24 et 40, qui concernent différentes ratifications. En août 2017, j'ai voté le projet de loi autorisant la ratification du protocole relatif à la convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime. Ce protocole datait de 2005 !
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 24 sans modification.
Article 26
L'article 26 vise à corriger des surtranspositions dans le domaine des marchés publics de défense et de sécurité.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 26 sans modification.
Article 31
L'article 31 vise à faciliter la coopération de nos armées avec leurs partenaires sur le sol français.
Avis très favorable. C'est une erreur que nous ne soyons pas juridiquement mieux équipés pour l'entraînement de partenaires sur notre sol. L'extension de l'application des règles de l'accord sur le statut des forces (statuts of forces agreement ou SOFA) de l'OTAN nous permettra d'effectuer d'avantage d'exercices européens.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 31 sans modification.
Article 40
L'article 40 vise à donner au Gouvernement le pouvoir de légiférer par ordonnance sur des questions de police de l'État en mer.
Avis favorable : comme je l'évoquais précédemment, cela permet au Gouvernement de légiférer suite à la ratification du protocole relatif à la convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime fait à Londres le 14 octobre 2005. Cette ratification avait été portée par notre commission.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 40 sans modification.
Article 42
L'article 42 prévoit les modalités de l'application des dispositions du présent projet de loi outre-mer.
Avis favorable : j'ai souhaité porter cet article à votre connaissance, car, si nos territoires ultramarins sont confrontés à des situations différentes de la métropole, nous devons rester attentifs à leurs conditions sécuritaires et de défense.
La commission émet un avis favorable à l'adoption de l'article 42 sans modification.
Puis la commission émet un avis favorable à l'adoption de l'ensemble des dispositions dont elle est saisie, ainsi modifiées.
Je vous remercie et je tiens à saluer les qualités exceptionnelles de notre rapporteure pour avis, qui elle allie connaissances stratégiques et humaines de ce dossier. Pour nous, les dernières sont au moins aussi importantes que les premières !
La séance est levée à midi quinze.
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Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 7 mars 2018 à 9 h 30
Présents. - M. Frédéric Barbier, M. Bruno Bonnell, M. Bertrand Bouyx, Mme Valérie Boyer, M. Pierre Cabaré, Mme Annie Chapelier, Mme Mireille Clapot, M. Pierre Cordier, M. Olivier Dassault, M. Alain David, M. Bernard Deflesselles, M. Frédéric Descrozaille, M. Benjamin Dirx, Mme Laurence Dumont, M. Pierre-Henri Dumont, M. Michel Fanget, M. Bruno Fuchs, Mme Laurence Gayte, M. Éric Girardin, Mme Olga Givernet, M. Claude Goasguen, M. Christian Hutin, M. Yves Jégo, M. Bruno Joncour, M. Hubert Julien-Laferriere, M. Rodrigue Kokouendo, Mme Sonia Krimi, M. Jérôme Lambert, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Martine Leguille-Balloy, Mme Marion Lenne, Mme Marine Le Pen, M. Maurice Leroy, M. Jacques Maire, Mme Jacqueline Maquet, M. Denis Masséglia, M. Ludovic Mendes, Mme Monica Michel, M. Christophe Naegelen, Mme Delphine O, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-François Portarrieu, M. Didier Quentin, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Luc Reitzer, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Marielle de Sarnez, M. Joachim Son-Forget, Mme Sira Sylla, Mme Liliana Tanguy, Mme Valérie Thomas, M. Sylvain Waserman
Excusés. - M. Christophe Di Pompeo, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Michel Herbillon, Mme Nicole Le Peih, M. Jean-Luc Mélenchon, M. Frédéric Petit, M. Bernard Reynès, M. Guy Teissier