– Je ne vous force pas la main sur ce sujet. Quoi qu'il en soit, dans le domaine de la sécurité nucléaire, il est incontestable que cette logique doive s'appliquer.
Le SGDSN joue également un rôle essentiel dans le contrôle des exportations : je pense par exemple au projet d'exportations, en Chine, par Orano (ex-Areva) d'une usine de retraitement. Le SGDSN est très impliqué dans la négociation de l'accord intergouvernemental sous-jacent, pour que cette exportation soit parfaitement conforme aux spécificités ou demandes de contrôle que pourrait demander l'AIEA.
Nous avons aussi un rôle en matière d'alerte gouvernementale : je pense par exemple à cet incident qui a récemment défrayé la chronique, et dont on s'interroge encore sur les causes, cette échappée d'isotope signalée par la détection de la présence de ruthénium 106 en provenance, très probablement, de la Russie. Avec l'aide de l'IRSN, de l'ASN et du CEA, nous avons été les premiers à coordonner un travail collectif, pour informer nos autorités de la manière la plus précoce possible, pour procéder à l'évaluation des conséquences possibles sur les populations européennes, pour s'assurer de la réduction de ces risques, et en même temps, au plan international, pour poser un certain nombre de questions auxquelles toutes les réponses, notamment du côté des Russes, n'ont pas été apportées.
Ces contacts nombreux avec la famille nucléaire – je laisse de côté les problématiques liées à la dissuasion – font que nous avons une expertise du secteur qui nous permet de bien assurer ce travail de dialogue collectif avec les opérateurs et les principaux ministères, ce qui est important car il s'agit de sujets qui peuvent être très techniques.
Le dernier élément au titre duquel le SGDSN est impliqué est la problématique du terrorisme. Notre pays a été frappé depuis 2015 par une vague d'attentats terroristes, qui nous a amené à relever, dans tous les domaines, les dispositifs de sécurité, et à renforcer le travail du renseignement. Sur la sécurité nucléaire et la protection, il faut prendre de la profondeur de champ. Nous avons aussi été extrêmement attentifs et réactifs à tous les types d'évolution de la menace, notamment terroriste. Nous avons identifié le risque d'importation sur le territoire national d'un certain nombre de modes opératoires, en particulier sur le théâtre du Levant, où Daesh a notamment pu acquérir, en occupant des villes, les capacités scientifiques de certains laboratoires ou des capacités militaires.
Si certains risques étaient plus évidemment en cause, je pense à l'usage malveillant des drones, à des recherches récentes sur les explosifs, à des tentatives de fabrication de ricine, d'ypérite ou de toxines botuliques – sans que cela ne prospère beaucoup – en revanche, la problématique nucléaire n'était pas en cause. Elle l'a été en 2016 – ce qui a appelé notre vigilance très tôt – à travers des services de renseignement et d'enquête belges sur le fait que, dans un ordinateur d'un terroriste interpellé dans le cadre des affaires de Molenbeek, on a retrouvé les références d'un directeur d'un centre de recherche nucléaire. Sur ce sujet de l'évolution de la menace terroriste, dès que nous recevons la moindre alerte ou signalement, nous sommes particulièrement vigilants à nous assurer de leur prise en compte, à transmettre l'information, à faire travailler nos services. Mais je dois dire qu'autant sur les autres sujets que j'ai évoqués, en particulier les drones ou les explosifs, le préfet Bolot est bien placé pour mesurer ce que cela implique en termes de renforcement de la sécurité aérienne, de détection des explosifs, autant en matière nucléaire, à part ce signalement que j'évoquais à l'instant, nous n'avons pas eu d'autres craintes. Mais le domaine du nucléaire implique de telles questions de sécurité où, de toutes les façons, la problématique terroriste est déjà intégrée.
Quand je quitte le champ des généralités pour revenir à ce qui a été fait récemment, je suis éclairé par les travaux et recommandations de l'OPECST sur les renforcements de nos systèmes de protection, notamment la mission parlementaire que l'OPECST a menée en 2011 sur le thème de « La sécurité nucléaire, la place de la filière et son avenir », présidée par M. Claude Birraux. Avec la recommandation sur les dispositifs d'alerte et de communication, gérés au SGDSN, notamment par son bureau de veille et d'alerte, à travers la consolidation du système de veille du ministère de l'intérieur (le COGIC), et de celui du ministère de la transition écologique et solidaire (le CMVOA), les alertes sur les incidents à caractère nucléaire sont désormais complètement intégrées. Je vous annonce d'ailleurs la proposition que j'ai faite au Premier ministre de consolider encore le bureau de veille et d'alerte, au-delà du seul secteur nucléaire, pour le transformer en un véritable centre de veille et d'alerte gouvernemental, de façon à mieux traiter la question des alertes aux populations. Nous avons un travail encore devant nous sur ce point. Vous le savez, le ministère de l'intérieur a développé, à travers la direction de la protection civile, un premier système d'alerte via l'application SAIP (système d'alerte et d'information de la population) sur smartphone. Se sont aussi développées des applications de ce type, sur un mode associatif, notamment celle dénommée Qwidam. Je crois qu'il faut revenir sur ce sujet. Il y a eu un intéressant rapport du Sénat sur ce système d'alerte. Je vois que la rénovation des sirènes coûterait 52 millions d'euros, il faudrait peut-être s'interroger...