Monsieur le président, madame la ministre des outre-mer, madame la présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, monsieur le rapporteur, chers collègues, chers amis calédoniens qui nous écoutez ou nous écouterez un peu plus tard compte tenu du décalage horaire, le 4 novembre prochain – ça y est, la date a été arrêtée hier par le Congrès du territoire – , une page nouvelle et importante de l'avenir de la Nouvelle-Calédonie s'écrira : le référendum prévu depuis maintenant vingt ans par les accords de Nouméa se déroulera, permettant, nous l'espérons tous, une consultation sereine du territoire sur son accession ou non à la pleine souveraineté. Cette page et cette date sont, bien sûr, incontournables ; ce sont des engagements forts, gravés dans le marbre, inscrits au titre XIII de la Constitution. Elles arrivent au terme d'un processus singulier, entamé il y a trente ans et auquel les différents responsables politiques sont toujours restés fidèles, il est important de le rappeler ici. Quel que soit le résultat, il restera à écrire le fameux jour d'après, à lui donner un contenu très précis, même si nous n'en sommes évidemment pas encore là.
Sans aucun doute, les relations anciennes entre la France et la Nouvelle-Calédonie ont été faites de hauts et de bas, d'« ombres » et de « lumière », à n'en pas douter, comme l'indique, à juste titre, le préambule des accords de Nouméa. Nul ne peut oublier qu'il y avait bien un peuple premier, qui possède des droits indéniables, « inaliénables et sacrés », pour reprendre, en se gardant de tout anachronisme, la formule du préambule de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Nul ne peut oublier non plus qu'une colonie de peuplement, liée en partie à l'histoire du bagne, est la source d'une autre culture, enrichie depuis lors par d'autres apports, et dont les droits sont tout aussi indéniables, inaliénables et sacrés. C'est encore une fois, redisons-le avec force, l'universalité française dans sa diversité.
Ombres et lumière, ce fut bien sûr encore le cas au début de la décennie 1980 : il y eut alors des tensions, des rancoeurs et, fort malheureusement, des morts, mais aussi de vrais espoirs et des réconciliations, incarnés par celles et ceux qui se réunirent autour de Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur, qui échangèrent une poignée de main demeurée historique. Ces pères fondateurs d'une Calédonie tournée vers l'avenir figurent bien au panthéon de l'archipel.
Le contexte actuel, tant local qu'international, n'est plus celui des années 1980. La Nouvelle-Zélande et l'Australie, par exemple, voyaient alors d'un très mauvais oeil – c'est peu de le dire – la présence de la France dans la région, non sans arrière-pensées, d'ailleurs. Les choses ont bien évolué depuis lors, ou sont en tout cas devenues plus subtiles et beaucoup plus contrastées, en raison de la présence de la Chine dans les parages, qui modifie les équilibres.
Depuis trente ans, d'autres équilibres ont aussi été trouvés dans les domaines culturel, économique, social, sanitaire et institutionnel. Beaucoup de choses ont été réalisées mais, bien évidemment, beaucoup reste à faire pour apaiser et mieux se comprendre, pour assurer et faire vivre la diversité. Ce rééquilibrage est la pleine démonstration que la France peut demeurer indivisible sans que l'on soit pour autant obsédé par l'homogénéité des statuts, notamment en cas d'éloignement géographique. Oui, la France peut être unie dans la diversité. Cette affirmation est non seulement un acte de foi dans notre génie institutionnel, mais aussi une orientation et même un objectif pour les mois et les années à venir en Nouvelle-Calédonie.
La consultation qui se déroulera le 4 novembre prochain devra, bien sûr, être exemplaire et convaincante.