Je m'associe à ce qui vient d'être dit sur la sortie du Royaume-Uni : on ne peut pas s'en réjouir. C'est une perte, mais la crise est souvent une opportunité à saisir. Les rabais et les rabais sur les rabais ont pour origine le Royaume-Uni. La donne change, ce qui permet de rouvrir des discussions bloquées jusque-là, en l'absence de date d'expiration pour ces dispositifs. Par ailleurs, le lien entre le rabais et certaines politiques de l'Union est remis en question. C'est l'occasion de créer une structure budgétaire davantage tournée vers les défis et les nouveaux équilibres tels qu'on peut les concevoir aujourd'hui.
Il y a aussi un effet budgétaire presque mécanique sur le plan quantitatif. Le Royaume-Uni étant un pays relativement développé, sa contribution au titre du revenu national brut (RNB) est importante. Le manque à gagner conduit à revoir les équilibres au sein du budget européen. En raisonnant à 27 États membres, les dépenses budgétaires actuelles ne représentent plus 1,03 % mais 1,13 %. du RNB. Si l'on veut que les politiques de cohésion sociale, économique et territoriale et la PAC se poursuivent à 27, tout en développant d'autres politiques, il sera difficile d'éviter un niveau de contribution plus élevé qu'aujourd'hui, qu'il y ait ou non de nouvelles ressources.
Y a-t-il des évaluations de l'impact du budget européen ? Pour le calcul annuel des soldes nets, qui est la conséquence du rabais britannique, il a fallu appliquer une méthode comptable : on compare les versements à l'Union européenne et les retours estimés. C'est une méthode qui peut faire l'objet de beaucoup de critiques au plan méthodologique. Les bénéfices sont en réalité bien supérieurs, en particulier dans le cadre du marché intérieur. On aide en effet des pays moins développés dont les marchés sont ouverts aux industries françaises, allemandes ou encore italiennes, ce qui permet à ces dernières de se développer. Les aides apportées à certains pays ont ainsi des retombées ailleurs. La gestion des flux migratoires avec l'assistance de la Grèce – pour gérer les entrées –, ou avec la Turquie, a aussi un impact qui n'est pas facile à quantifier en termes monétaires dans l'ensemble des États membres, en particulier sous l'angle de la capacité d'accueil de ceux qui entrent de manière régulière au sein de l'Union européenne. Il en est de même du changement climatique : quand on arrive à instaurer des politiques de réduction des gaz à effet de serre, ce n'est pas un seul pays qui en bénéficie, mais l'ensemble de l'Union.
Je voudrais rappeler que la Commission a oeuvré pour le débat démocratique depuis le lancement du Livre blanc sur l'avenir de l'Europe : des discussions ont eu lieu dans les assemblées parlementaires de tous les États membres, les commissaires s'y sont investis, et il y a eu des dialogues citoyens et des conférences. Si un accord politique intervient en 2019, cela fera deux ans de débat démocratique. En ce qui concerne le précédent cadre financier, la proposition de la Commission a été faite en juin 2011, mais peu de choses se sont passées la première année : la discussion s'est finalement concentrée sur les six ou neuf derniers mois. Deux années entre le lancement du débat et un éventuel accord suffisent-elles ? On peut en débattre, mais je ne crois pas que l'on puisse conclure que cela ne permet pas un débat démocratique.