Intervention de Daniel Verwaerde

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 16h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Daniel Verwaerde, administrateur général par intérim du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) :

Je veux d'abord apporter une précision importante. Premièrement, j'ai mené une réorganisation assez profonde des projets d'assainissement et de démantèlement de manière à répondre aux demandes de l'ASN. Du reste, ces demandes émanaient des deux autorités de sûreté – le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense et l'ASN –, qui sont venues ensemble me rencontrer à Marcoule pour me dire qu'elles souhaitaient que nous ayons une vision d'ensemble du démantèlement.

Deuxièmement, il faut que vous sachiez que la France consacre 740 millions par an aux assainissements et démantèlements relevant du CEA, une somme qui est, à ma connaissance, nettement supérieure au budget qu'EDF consacre à cette activité. Ces crédits nous permettent, me semble-t-il, de conduire nos travaux d'assainissement et de démantèlement à un rythme compatible avec deux exigences. Premièrement, nous devons disposer de moyens humains capables d'encadrer ces travaux. J'insiste à nouveau sur la place de l'homme : l'argent ne fait pas tout. Or, actuellement, au CEA, 1 000 personnes environ travaillent à l'assainissement et au démantèlement – ce qui n'est pas rien –, auxquels s'ajoutent les sous-traitants. Deuxièmement, nous travaillons, à la demande de l'Autorité, à réduire le plus vite possible les plus grands termes sources. Auparavant, nous traitions toutes les installations sur un pied d'égalité : dès que l'une d'entre elles était arrêtée, nous la démantelions. Or, les deux autorités ont souhaité que soient traitées en priorité les installations qui contiennent le plus de déchets, c'est-à-dire la plus grande quantité de radioactivité susceptible d'être remise en circulation en cas d'accident. Il y a deux ans, nous avons donc revu nos programmes : j'ai fait établir un plan à moyen et long terme qui nous donne une vision d'ensemble de tous les chantiers, nous avons défini un ordre de priorité en fonction des risques que chaque chantier présenterait en cas d'accident et nous avons concentré nos efforts sur ceux qui présentent les plus grands risques. De fait, mes effectifs sont limités et, en tant que citoyen, j'estime que 740 millions par an, c'est une somme extraordinairement élevée. On peut toujours dépenser plus, mais c'est déjà beaucoup.

Par ailleurs, cette question m'a paru suffisamment importante pour être traitée par une division qui en a exclusivement la charge. Auparavant, la même division était chargée à la fois de la recherche et du développement – et travaillait donc pour l'avenir – et de l'assainissement et du démantèlement. Or, les êtres humains sont ce qu'ils sont : il est toujours plus intéressant de rêver de l'avenir que de régler les problèmes du passé. Il faut donc confier à des personnes la mission exclusive de démanteler et les juger sur cette mission, afin qu'elles soient motivées. J'ai ainsi modifié l'organisation du CEA en créant, à l'intérieur de la direction de l'énergie nucléaire (DEN) et de la direction des applications militaires (DAM), un périmètre regroupant l'assainissement et le démantèlement, placé sous l'autorité d'une direction qui pilote l'ensemble et me rend compte directement.

Comment se traduit cette nouvelle organisation ? Comme nos moyens sont limités, si des chantiers progressent rapidement, d'autres progresseront plus lentement. Toutefois, si ces derniers sont ceux qui présentent très peu de danger, c'est moins grave. Certes, on peut toujours dire qu'il faudrait zéro danger partout mais, outre que je ne suis pas là pour discuter les décisions des autorités, il me semble qu'il s'agit plutôt d'une bonne idée. En tout état de cause, nous avons consenti des efforts considérables pour répondre à la demande des autorités.

J'ajoute que, lorsque l'ASN a formulé cette demande, je travaillais déjà à l'amélioration de la sûreté et de la sécurité. En effet, l'inspection nucléaire générale qui, auparavant, était séparée d'au moins deux niveaux de l'administrateur général, m'est désormais directement rattachée, à la demande, du reste, de Pierre-Franck Chevet, qui a eu raison également sur ce point. L'inspection a donc la possibilité d'aller inspecter partout et immédiatement, à ma demande.

Enfin, estimant qu'à volume de moyens identiques nous n'étions pas très efficaces, j'ai demandé au Conseil général de l'industrie qu'il réalise un audit général de notre organisation et de notre efficacité en matière de sûreté. Selon les conclusions de cet audit, qui rejoignent l'analyse de M. Chevet, le CEA dispose de compétences importantes – les ingénieurs et les scientifiques travaillent bien et sont motivés – mais le pilotage d'ensemble posait problème. J'ai donc modifié l'organisation et créé une direction de la protection et de la sûreté nucléaire, que j'ai confiée à M. Vo Van Qui, qui est à mes côtés aujourd'hui. Pour avoir dirigé un centre nucléaire, je considère que la sûreté est ma première responsabilité et j'essaie donc de m'en occuper. J'espère que mon action dans ce domaine portera ses fruits.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.