Intervention de Hervé Saulignac

Réunion du mercredi 28 mars 2018 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Saulignac :

Nous pouvons nous accorder sur certains constats : occupations illicites en hausse, dégradations, tensions avec les populations locales conduisant parfois à des violences, élus locaux pris dans des situations inextricables. Mais nous considérons que la présente proposition de loi ne répond pas à la nécessité d'améliorer l'accueil des gens du voyage. Elle voudrait nous faire croire que donner un « tour de vis » constituerait une solution. Or, nous ne croyons pas au renforcement de la répression.

Ce texte vise essentiellement, sans l'affirmer ouvertement, à revenir sur la loi « Égalité et citoyenneté » qui est venue modifier la loi Besson. Certaines des dispositions qui nous sont aujourd'hui proposées, si elles étaient appliquées, mettraient un terme au processus d'élaboration des schémas départementaux qui est aujourd'hui très loin d'être achevé car il s'inscrit inévitablement dans un temps long. Nous devrions plutôt nous préoccuper de trouver les moyens de l'accélérer. Il est beaucoup trop tôt pour modifier une loi qui n'est pas entrée en complète application. Certains décrets, notamment celui qui correspond aux dispositions de l'article 149 consacré aux aires d'accueil permanent et aux terrains familiaux locatifs, ne sont pas encore publiés, ce qui ralentit les procédures de révision des schémas départementaux arrivés à expiration.

Ce texte introduit une forme de déconnexion entre les communes et leurs EPCI. Il permet en effet à une commune d'être en règle quand bien même l'EPCI auquel elle appartient ne le serait pas. Si on supprime ce qui peut constituer un moyen de pression utile des communes sur les EPCI, ce sera la fin des schémas départementaux prévus par la loi « Égalité et citoyenneté ».

Autre mesure qui montre à l'évidence que cette proposition de loi cherche à mettre un terme aux mécanismes instaurés par les lois précédentes : la suppression de la procédure de consignation. Certes, il s'agit d'un mécanisme coercitif mais il s'impose car, dix-huit ans après l'adoption de la loi Besson, seuls dix-huit départements se sont conformés aux obligations des schémas départementaux. Il est assez paradoxal de se plaindre du stationnement irrégulier des véhicules des gens du voyage quand les préconisations de la loi en matière d'aires d'accueil et de terrains de grand passage ne sont pas appliquées.

En outre, le texte prévoit un alourdissement des sanctions pénales. Or, la plupart des sanctions existantes ne sont déjà pas appliquées. La police et la justice ne parvenant pas à faire face à la masse des tâches qui s'imposent à elles, il est très probable qu'elles n'accorderont pas la priorité au stationnement irrégulier. Ce renforcement des sanctions, s'il fera plaisir sur le moment à quelques élus locaux en grande difficulté, ne produira probablement aucun résultat.

Enfin, nous nous interrogeons sur les pouvoirs donnés au préfet en cas d'évacuation forcée : ils pourraient être considérés comme une forme d'atteinte disproportionnée à la liberté fondamentale d'aller et de venir.

Aujourd'hui, le dispositif repose sur un équilibre : ni laxisme vis-à-vis des occupations illicites ou des comportements délictuels, ni répression à l'encontre des gens du voyage. Cet équilibre, le groupe Nouvelle Gauche estime que la présente proposition de loi risque de le mettre à mal.

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