Les propos de mes collègues me donnent envie de leur dire qu'il faut en finir avec la naïveté et l'angélisme et cesser de se réfugier derrière les argumentations théoriques, a fortiori en faisant l'amalgame entre la situation des gens du voyage et celle des forains, ce qui est une grave erreur et démontre une méconnaissance totale du dossier.
Ce qui se passe sur le terrain est très grave. Certains ont admis avoir eu l'expérience des envahissements sauvages. Mais, au sud de la métropole lilloise, il s'agit d'une réalité à laquelle les riverains, les chefs d'entreprise, les agriculteurs ou les maires sont confrontés quotidiennement.
C'est la raison pour laquelle j'ai pris l'initiative d'organiser une réunion de tous les acteurs concernés, chaque fois qu'un nouveau préfet de région est nommé, pour essayer de promouvoir des stratégies permettant de lutter contre ce problème et contre le sentiment d'impunité de ces gens du voyage qui enfreignent la loi. Nos concitoyens ont, pour leur part, le sentiment qu'il y a deux poids deux mesures : ils sont sanctionnés lorsqu'ils dépassent la vitesse autorisée d'un ou deux kilomètresheure, alors que, lorsque les gens du voyage envahissent un terrain, il ne se passe rien !
Dans ma circonscription, des élus et des agriculteurs ont été molestés et se sont vu délivrer des ITT de plusieurs jours ; des coups de feu ont également été tirés en l'air par des gens du voyage ; quant aux dégradations, je ne compte plus les millions d'euros de dégâts, notamment dans les zones industrielles, après le passage de gens du voyage, soit que les entreprises n'aient pas pu fonctionner, soient que des locaux industriels vacants aient été dévastés, comme sous l'effet d'une bombe.
Dans ces conditions, les entreprises préfèrent s'implanter de l'autre côté de la frontière, en Belgique, où la législation est beaucoup plus ferme et où ils ne sont pas confrontés aux mêmes envahissements.
Je ne cesse de dire au préfet qu'un jour il y aura un mort. Je lance donc un cri d'alarme, car la situation n'est plus tenable sur le terrain. Il est impératif de renforcer la loi, et cette proposition y contribue, mais il faut surtout que la loi soit appliquée de manière pleine et entière, par exemple l'article 322-4-1 du code pénal, qui permet de saisir les véhicules, mais n'est quasiment jamais appliqué, alors qu'il permettrait d'apporter un début de réponse.
Je suis également fatigué par ceux qui opposent à nos arguments le respect des traditions et des modes de vie. Elles ont bon dos, les traditions ! Comme beaucoup de Français, je passe moi-même chaque année, par tradition familiale, quinze jours d'été sur la Côte d'Azur, mais je ne demande pas à la collectivité dans laquelle je séjourne ou à l'État de financer mon voyage ! Pourquoi l'exiger pour les gens du voyage, au nom de la tradition, sachant que nos concitoyens y sont résolument opposés ?