Nous nous accordons tous sur le constat que si la loi a bien institué des schémas départementaux pour l'accueil des gens du voyage, 30 % des objectifs en termes d'accueil ne sont pas encore atteints. Le dispositif connaît donc des lacunes. Il existe certes des procédures permettant de lutter contre les installations illicites, mais elles sont lentes et n'empêchent pas les dégâts irrémédiables causés par ces installations sauvages. Or, ces dégâts ont un coût financier et humain, notamment lorsqu'il faut mobiliser les agents de la collectivité pour remettre un lieu en état.
L'objectif de ce texte est de proposer des outils plus opérationnels et plus réactifs. Il a été élaboré en concertation avec les élus locaux, mais également avec les forces de l'ordre, très largement mobilisées dans ces affaires, pour des périodes qui durent d'ailleurs de plus en plus longtemps. Monsieur Paris, vous m'avez reproché de beaucoup me référer à la Haute-Savoie. Je suis consciente que nous sommes là face à un problème national, mais il se trouve que, dans ce département, ces installations illicites sont de plus en plus fréquentes et de plus en plus longues, au point que l'on peut se demander si ces gens du voyage voyagent encore ! Ils demeurent en effet toute l'année dans le département, se bornant à des sauts de puce d'une commune à l'autre.
Les tensions s'accroissent et je partage les inquiétudes de mes collègues, Martial Saddier, Arnaud Viala et Sébastien Huyghe ; je crains qu'un jour un drame survienne parce que nous n'aurons pas pris nos responsabilités et adopté les mesures juridiques qui s'imposent. Qui sait ce que fera un jour un agriculteur parce qu'on s'en sera pris à son outil de travail, un propriétaire de terrain ou un membre de la communauté des gens du voyage, qui peut être armé et menaçant ?
Nous ne devons pas faire preuve d'angélisme, de cet angélisme qui, selon moi, avait inspiré la proposition de loi de Dominique Raimbourg, adoptée par l'Assemblée nationale sous la précédente législature, qui supprimait les carnets de circulation et prévoyait un certain nombre de dispositions visant à améliorer l'habitat des gens du voyage sans traiter suffisamment cette question des campements illicites.
Ce texte enfin n'est en aucun cas stigmatisant. Au contraire, certains membres de la communauté des gens du voyage qui respectent leurs obligations se trouvent lésés par ceux qui s'installent de façon illicite, là où ils n'en ont pas le droit. L'idée est donc bien d'avoir un texte « gagnant-gagnant » tant pour les élus que pour les gens du voyage qui respectent les règles en vigueur.
J'ai souhaité maintenir le texte du Sénat qui me paraissait être une proposition équilibrée, l'idée étant qu'elle rassemble un très large consensus, y compris dans cette assemblée, afin de nous permettre de disposer rapidement d'outils opérationnels. C'est une attente très forte des gens qui agissent sur le terrain. C'est également un engagement de la ministre Mme Gourault. Consciente des besoins en la matière, elle proposait d'utiliser un autre véhicule législatif, le projet de loi « évolution du logement, de l'aménagement et du numérique » (loi Élan) ou un texte s'inscrivant dans le cadre de la réforme de la procédure pénale. Nous considérons, pour notre part, que cette proposition de loi, très largement approuvée par le Sénat, est parfaitement adaptée. Nous souhaitons donc que, d'ici son examen dans l'hémicycle, l'ensemble des groupes fassent des propositions permettant de l'améliorer encore, afin qu'elle puisse être adoptée à la faveur d'un large consensus. Ce sujet est en effet transpartisan ; il répond à un besoin des élus locaux, quelle que soit leur couleur politique.