Intervention de Olivier Marleix

Réunion du mercredi 21 mars 2018 à 17h30
Commission d'enquête chargée d'examiner les décisions de l'État en matière de politique industrielle, au regard des fusions d'entreprises intervenues récemment, notamment dans les cas d'alstom, d'alcatel et de stx, ainsi que les moyens susceptibles de protéger nos fleurons industriels nationaux dans un contexte commercial mondialisé

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix, président :

Je vous remercie, monsieur le ministre, pour vos réponses. Je ferai une remarque et je vous poserai une question sur les procédures extraterritoriales anticorruption et la mise en oeuvre de la loi de 1968.

Le problème, me semble-t-il, relève davantage de la pratique que du droit. Lorsque, avec le rapporteur et Natalia Pouzyreff, nous nous sommes récemment rendus aux États-Unis, nous avons pu observer que la procédure normale de sollicitation par les autorités américaines du bureau d'entraide internationale du ministère de la justice n'est pas toujours réalisée dans les délais qui conviendraient : elles commencent leur travail d'investigation sans que le ministère de la justice soit forcément immédiatement saisi. Seul le réseau diplomatique peut avoir l'information.

Or, en France, la coordination entre votre ministère, celui de la justice – qui n'est pas le mieux placé pour apprécier l'enjeu stratégique d'une procédure anticorruption contre une entreprise française – et Bercy n'est pas suffisante pour déceler les premiers signes avant-coureurs de l'ouverture d'une procédure de ce genre. Nous avons donc intérêt à mieux la contrôler, avec un objectif un peu paradoxal. D'un côté, il nous faut accompagner l'entreprise française dans le cadre de la procédure des autorités américaines, lorsque cette procédure est légitime : l'entreprise ne doit pas se cacher derrière la loi « de blocage », de sorte que ces autorités se sentent interdites d'intervenir ; le dossier Alstom a sans doute été compliqué par le fait que son dirigeant, M. Kron a, pendant des années, fait la sourde oreille et refusé de travailler avec les autorités américaines. De l'autre, les entreprises françaises doivent savoir pouvoir compter sur la force d'action de l'État pour les protéger de demandes éventuellement abusives, en arguant, le cas échéant, de la loi de 1968. Nous devons nous interroger sur la pratique gouvernementale face à des procédures que nous subissons au lieu de les gérer et de les accompagner convenablement.

Par ailleurs, le projet de mécanisme européen me semble fragilisé par le fait qu'il est construit sur la base du volontariat. En effet, il y aura deux types d'États membres : d'une part, ceux qui, comme la France ou l'Allemagne, se seront dotés d'un dispositif de contrôle et seront invités à faire un rapport sur sa mise en oeuvre à la Commission européenne, et, d'autre part, ceux qui auront décidé de ne rien faire. Or, notre régime de contrôle des IEF est différent selon que l'investisseur provient d'un pays membre de l'Union européenne ou d'un un pays tiers. On peut donc craindre qu'un investisseur issu d'un pays tiers n'utilise un faux nez dans un États membres qui aura prudemment décidé de ne pas se doter d'un mécanisme de contrôle pour réaliser une opération en France, par exemple. N'y a-t-il pas là un trou dans la raquette ?

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