Intervention de Guillaume Gouffier-Cha

Séance en hémicycle du jeudi 5 avril 2018 à 15h00
Attribution de la carte du combattant aux soldats engagés en algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Gouffier-Cha :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, le lundi 19 mars dernier, comme bon nombre d'entre vous, c'est dans le froid de cette fin d'hiver que j'ai rejoint les anciens combattants de ma circonscription à Vincennes, au vieux cimetière, pour une cérémonie importante, un moment de recueillement et de mémoire pour ceux qui sont morts pour la France, pour ceux qui sont rentrés blessés et meurtris à jamais de cette terrible guerre d'Algérie.

Plus de 300 000 Algériens y perdirent la vie, sans qu'il soit, encore aujourd'hui, possible de quantifier les pertes civiles de cette guerre. Dans le même temps, plus de 25 000 soldats français y furent tués et plus de 65 000 y furent blessés. Toute une génération est marquée par ce drame, des deux côtés de la Méditerranée. Ces jeunes gens ont participé à cette guerre non parce qu'ils l'avaient voulu mais parce que le pouvoir politique en avait décidé ainsi pour eux et leurs familles.

Après plus de sept ans de conflit, le 18 mars 1962, les accords d'Évian furent signés et débouchèrent sur le cessez-le-feu, qui prit effet dès le lendemain, le 19 mars 1962, puis sur l'indépendance de l'Algérie, le 3 juillet suivant. La présence de soldats français sur le territoire algérien se prolongea, en vertu des accords, jusqu'au 1er juillet 1964. Durant cette période, plus de 500 soldats français, appelés ou engagés, perdirent la vie.

Entre nos deux pays, l'attachement est fort, reposant sur des liens humains et historiques sans équivalents. Nos deux pays travaillent aujourd'hui à la réconciliation des mémoires et à l'approfondissement de leur coopération économique, culturelle, ainsi que dans le domaine de la sécurité. Ces dernières années, notre relation bilatérale a pris un nouvel élan. D'abord, avec la signature par les deux présidents, le 19 décembre 2012, de la déclaration d'Alger sur l'amitié et la coopération entre la France et l'Algérie. Ensuite, avec la visite du Président de la République, Emmanuel Macron, le 6 décembre 2017, qui a donné le ton d'une relation plus approfondie. Trois messages ont été adressés aux Algériens : la volonté partagée d'avancer ensemble sur la question mémorielle, un appel à une économie algérienne plus ouverte et un soutien aux investissements croisés, le souhait d'une relation répondant plus particulièrement aux attentes de la jeunesse. Cette relation se concrétise avec la tenue régulière de comités intergouvernementaux de haut niveau, le dernier datant du 7 décembre 2017.

Nous nous devons également d'apporter une protection particulière à ceux qui, en tant que militaires, appelés ou engagés en Algérie, ont sacrifié leur jeunesse et leurs rêves pour la France ; à ceux qui, trop jeunes, ont connu les horreurs de la vie et la noirceur de l'humanité ; à ceux qui ont vu tant de leurs camarades tomber.

À ces hommes, la nation doit la reconnaissance éternelle. Ces anciens combattants, une fois revenus en France, ont continué à tant donner à notre société, à travers le tissu associatif notamment. Ce sont des citoyens engagés, et bien souvent, avec eux, l'ensemble de leurs familles. Je tiens ici à leur rendre un hommage tout particulier pour le travail de transmission de la mémoire qu'ils accomplissent jour après jour auprès des jeunes générations. Ils parlent de la guerre bien entendu, et de sa terrible réalité, mais aussi et surtout de la paix, de sa construction et de l'importance de tout mettre en oeuvre pour la préserver. Pour ces raisons, nous nous devons de leur rendre hommage et de nous tenir à leurs côtés.

Au cours des dernières années, des efforts non négligeables ont été consentis pour renforcer les droits des anciens combattants, comme l'attribution de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord dont les pensions ont été liquidées avant le 19 octobre 1999 et l'augmentation de la retraite du combattant. Ensuite, les anciens combattants et conjoints survivants d'anciens combattants bénéficient tous, depuis cette année, du même mode de calcul de leur pension d'invalidité et de leur pension de réversion. Pas moins de 6 millions d'euros ont été réservés à cette mesure dans le projet de loi de finances pour 2018. Par ailleurs, nous avons également revalorisé dès cette année de 100 euros l'allocation de reconnaissance et la rente viagère pour les harkis.

Dans les prochains mois, après des années de discussions et conformément à l'engagement qui a été pris par le Président de la République et la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées, nous attribuerons la carte du combattant aux soldats engagés en Algérie après les accords d'Évian, entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964.

La date du 2 juillet 1962 représente un couperet inéquitable et, même si le dispositif de carte « à cheval », créé en 2014, a permis d'octroyer la carte du combattant à près de 11 000 anciens militaires, nous nous devons d'aller plus loin et d'établir une véritable reconnaissance à l'égard de l'ensemble des anciens militaires qui sont restés mobilisés en Algérie jusqu'au 1er juillet 1964.

Une réflexion est en cours pour évaluer le chiffrage exact de cette mesure. Des divergences demeurent. Nous devons la mettre en oeuvre sans avoir recours à un artifice fiscal, même si des évolutions sont proposées aujourd'hui, et étudier les possibles effets indésirables de ricochet que celle-ci pourrait entraîner. C'est pour cette raison que nous souhaitons, en l'état des travaux au sein du ministère, éviter de créer un dispositif inapplicable dans l'immédiat.

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