Madame la ministre, nous aimons tous le train, nous aimons tous la SNCF et nous avons tous un regard lucide sur cette grande entreprise française. Le diagnostic a été posé à maintes reprises. On sait que le coût du service n'est pas adapté, que les investissements n'ont pas permis la rentabilité d'un certain nombre de lignes, que les cahiers des charges des installations sont beaucoup trop compliqués, que la qualité du service s'est dégradée au fil des ans. Tout cela, avec le vieillissement du réseau, est extrêmement préoccupant. Alors, faut-il réformer la SNCF ? Oui. Faut-il pour autant prendre tous les Français en otage ? Non. Dans une démocratie apaisée, une réforme telle que vous la souhaitez mérite qu'on y travaille consciencieusement avec les représentants de l'entreprise et surtout le Parlement. Or, sur le fond comme sur la forme, nous n'y sommes pas.
Sur la forme, on trouve huit articles dans ce projet de loi, dont six ne sont en fait que des habilitations à recourir aux ordonnances. Vous nous direz que, depuis vingt-quatre heures, vous avez commencé à changer, mais pourquoi n'avoir pas commencé par négocier ? Vous saviez bien que les représentants de l'entreprise avaient des revendications. Il était de votre devoir, à l'issue du rapport Spinetta, d'y réfléchir. Ce n'est pas ce que vous avez fait. Aujourd'hui, en fonction de vos négociations, vous changez le texte en introduisant des articles par voie d'amendement, ce qui ne nous donne pas le temps de les examiner, avec des études d'impact sérieuses. Convenez avec nous que ce n'est pas satisfaisant.
Sur le fond, votre texte confirme l'ouverture à la concurrence, à laquelle nous sommes favorables puisqu'elle date du moment où nous avons scindé en deux la SNCF par la loi de 1997. Cette ouverture était programmée. Tous les gouvernements l'ont confirmée par des textes successifs. Il n'est pas question aujourd'hui de remettre en cause cette ouverture mais de l'organiser. Sur cette organisation, vous nous demandez carte blanche mais qu'en est-il, par exemple, de l'EPIC de tête, qui ne permet pas une concurrence libre et non faussée ? Qu'en est-il du gendarme de la concurrence, l'ARAFER, dont vous voulez réduire le rôle alors que l'on vient d'apprendre que le rapporteur a déposé des amendements ? Qu'en est-il des petites lignes ? Vous n'en dites rien. Vous avez beau nous expliquer que chacun prendra ses responsabilités ; si c'est pour transférer les petites lignes aux régions, connaissant ce que sont leurs budgets, elles ne seront pas capables de les maintenir. Qu'en est-il de la dette, qui était hier de 47 milliards d'euros et de 50 milliards aujourd'hui, et dont on ne sait pas si elle sera, comme en Allemagne, reprise par l'État ou laissée à la SNCF ?
Des questions se posent. Le groupe Les Républicains auraient préféré avoir une véritable discussion avant l'examen des articles du texte.