Monsieur Kron, au fil des auditions que nous avons menées ces derniers mois, vous êtes apparu, d'une part, comme un président courageux, qui a tout fait pour sauver son entreprise, qui a cherché absolument un repreneur et l'a d'ailleurs trouvé en GE, dans une procédure certes rapide, et peut-être accélérée par le cours des choses. Contrairement à certains collègues, je ne conteste pas que GE offrait la meilleure solution à ce moment-là. L'entreprise était implantée en France et elle y employait plus de 10 000 personnes sur huit sites. C'est un élément qui compte aussi, quelle que soit la nationalité de l'employeur.
Mais d'autre part, vous apparaissez aussi comme un président aux prises avec des affaires, objet d'une procédure d'instruction en Suisse et de la part de la Banque mondiale depuis un certain temps, ce qui a d'ailleurs, nous a-t-on dit, attiré l'attention du DOJ. Vous êtes aussi le président qui a refusé de coopérer avec le DOJ et qui a sacrifié un de ses employés, peut-être même sans vergogne, sans scrupules, puisque Alstom a finalement plaidé coupable en décembre 2014. Qu'est-ce qui vous a retenu de coopérer en temps et en heure, c'est-à-dire en 2013, avant l'arrestation de M. Pierucci, avec la justice américaine ? Quels regrets pouvez-vous avoir, au vu du destin d'Alstom et surtout de la personne de M. Pierucci, qui ne bénéficie plus d'aucun soutien, qui n'a reçu aucune visite de la part de représentants d'Alstom. Il est emprisonné pour trente mois ; vous n'avez pas reçu sa famille ; il a des centaines de milliers d'euros de frais d'avocat non payés. Quels regrets pouvez-vous avoir et quelle est votre part de responsabilité ? Même si vous avez 100 000 employés, ce n'est pas tous les jours qu'un de ces employés se retrouve en prison. Quels enseignements en tirez-vous et quelles recommandations pourriez-vous faire à vos pairs ou au système judiciaire français sur la coopération avec la justice américaine par le plaider-coupable et la protection des personnes physiques ?