Intervention de Françoise Dumas

Séance en hémicycle du lundi 16 avril 2018 à 17h00
Déclaration du gouvernement sur l'intervention des forcées armées françaises en syrie et débat sur cette déclaration.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Dumas, vice-présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées :

Dans la nuit de vendredi à samedi, sur ordre du Président de la République, les forces armées françaises, en coalition avec les États-Unis et la Grande-Bretagne, sont intervenues en Syrie par le biais de frappes aériennes et de tirs de missiles de croisière, pour détruire les capacités de production, de développement et de stockage d'armes chimiques du régime syrien.

Le bilan de l'attaque du 7 avril, qui a entraîné ces représailles, est particulièrement lourd : plus de 50 personnes ont été tuées. Les éléments réunis par la France, émanant de nos propres services, de partenaires ou d'organisations non gouvernementales réputées pour leur fiabilité, ont permis d'établir avec un haut degré de confiance que cette attaque était de nature chimique et qu'elle avait été conduite par les forces du régime syrien.

Cette banalisation de l'emploi d'armes chimiques contre les populations civiles ne pouvait rester sans réponse, car elle constitue une menace pour la sécurité collective. Notre intervention se fondait juridiquement sur la résolution 2118 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui ouvrait la voie à une action coercitive en cas de manquement du régime à ses engagements, pris en 2013, de démanteler son arsenal chimique. Malheureusement, en raison de l'opposition de la Russie au Conseil de sécurité, une réponse concertée et forte de la communauté internationale face à l'utilisation d'armes chimiques était impossible.

La planification des opérations de la coalition a pris en compte le risque d'escalade militaire, en évitant de viser des objectifs pouvant abriter des forces alliées du régime. L'absence de victimes collatérales civiles est une autre preuve de la proportionnalité et de la justesse des frappes. Au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale, je tiens à saluer la place centrale occupée par les forces armées françaises dans ce dispositif.

Dans le cadre de cette opération, la marine nationale a déployé trois frégates multimissions, une frégate anti-sous-marine et une frégate antiaérienne. Elle a lancé avec succès trois missiles de croisière navals d'un nouveau type, qui n'avaient jamais été employés depuis leur mise en service. Le raid aérien français mené par l'armée de l'air depuis la France, avec cinq ravitaillements en vol et dix heures de vol d'affilée en condition de combat, a mobilisé l'action de cinq Rafale, quatre Mirage 2000, deux AWACS et plusieurs ravitailleurs sur une distance de plus de 4 000 kilomètres.

Cette opération, particulièrement complexe, a permis de démontrer, s'il en était besoin, l'excellence de la planification de nos états-majors, le professionnalisme et le courage de nos militaires, ainsi que la qualité de nos équipements. L'outil militaire est ainsi parfaitement en adéquation avec notre volonté d'autonomie stratégique et de décision, en tant qu'alliés au sein de la coalition. En ce sens, nous saluons encore une fois la pertinence de l'effort consenti envers les armées, dans le cadre de la loi de programmation militaire 2019-2025.

Comme l'a indiqué Mme la ministre des armées, le 14 avril, l'opération est considérée comme terminée, puisqu'elle a rempli ses objectifs. Nous poursuivons désormais tous nos efforts diplomatiques pour aboutir à une solution politique inclusive. Mais la France, le Royaume-Uni et les États-Unis ont toutefois annoncé qu'une telle initiative pourrait être reconduite en cas de nouvelle utilisation de l'arme chimique par l'armée syrienne ou des forces supplétives du régime. La coalition doit cependant rester vigilante quant à la possibilité de représailles. Le risque étant élevé, les forces britanniques ont renforcé les mesures de défense aérienne sur leur base militaire à Chypre, d'où sont partis les quatre Tornado qui ont participé à l'opération.

Dans un contexte de blocage du Conseil de sécurité, ces frappes peuvent permettre de déverrouiller les positions des belligérants. Elles s'inscrivent dans un cadre plus large et cohérent, celui de la négociation pour une résolution politique du conflit. La France est attachée à un multilatéralisme efficace, fondement de sa politique étrangère. Si le premier objectif est de lutter contre les groupes terroristes qui nous menacent, et en premier lieu l'organisation Daech, la France doit également poursuivre ses efforts au sein des institutions internationales pour faire émerger une solution politique au conflit et stabiliser la région. Résoudre la crise humanitaire et mettre fin aux souffrances du peuple syrien est de notre responsabilité, car la France, dans le concert des nations, dispose toujours d'une voix particulière.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.