Intervention de Patrick Dehaumont

Réunion du mardi 10 avril 2018 à 17h40
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Patrick Dehaumont, directeur général la Direction générale de l'alimentation (DGAL) :

Tout à fait : un restaurant peut être contrôlé à peu près une fois tous les trois ans à Paris, mais une fois tous les dix à quinze ans, selon les départements, en province… On peut s'interroger sur cette fréquence d'inspection ; une étude indépendante a montré que l'investissement financier consacré aux analyses dans le secteur de la remise directe était de 0,30 euro par an et par habitant en France, contre 2,40 euros au Danemark ! Il est toujours intéressant de faire du parangonnage et de regarder ce qui se passe dans les pays voisins ; votre question était donc utile.

S'agissant de l'organisation des contrôles, notre préoccupation première est la santé publique ; en tant que directeur général, j'y insiste beaucoup, mais le ministre insisterait de la même façon. On entend parfois dire que la préoccupation qui prime serait d'ordre économique, qu'il s'agirait de défendre les entreprises, etc. Notre première préoccupation, c'est bien la santé publique ; je tiens à le réaffirmer haut et fort.

L'organisation des contrôles s'appuie sur un certain nombre de textes européens. Rappelons que, dans le cadre de ce qu'on appelle le « Paquet hygiène », le professionnel est le premier responsable de la mise sur le marché des produits. L'État est là pour définir la règle et vérifier qu'elle est respectée, mais il n'est pas responsable de la mise sur le marché des produits, à une nuance près : l'abattage des animaux de boucherie, où l'État a une responsabilité directe et première dans le domaine alimentaire puisqu'il inspecte toutes les carcasses et y appose une estampille. Mais pour le reste des productions, c'est le professionnel qui est responsable et nous devons nous assurer qu'il a mis en place les mesures nécessaires et applique les règlements.

On distingue deux cas : les établissements agréés, qui ne font pas de remise directe, comme l'entreprise Lactalis, et les établissements dits de remise directe au consommateur. Dans l'un comme dans l'autre, les professionnels doivent mettre en place un certain nombre d'installations, des procédures de fonctionnement et un plan de maîtrise sanitaire (PMS), qui s'appuie sur un dispositif qu'on appelle de façon quelque peu barbare le système HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), qui consiste en une analyse des dangers et une maîtrise des points critiques. Ce PMS doit inclure des autocontrôles, dont certains sont analytiques, mais pas seulement : il peut y avoir des enregistrements de température et bien d'autres paramètres encore. Il est de la responsabilité du professionnel de définir les besoins en matière d'autocontrôles, notamment analytiques, et de mettre en place le dispositif ; il appartient ensuite aux services d'inspection d'évaluer le PMS et les différentes mesures mises en oeuvre, de s'assurer de leur pertinence, de vérifier qu'il est appliqué et, si besoin est, d'exiger la révision de ces éléments. En matière de microbiologie, par exemple, pour parler du sujet qui nous intéresse, on est soumis à la fois à des critères de sécurité des produits et à des critères de maîtrise de la production : ce ne sont pas forcément les mêmes paramètres qui seront suivis.

Je précise, pour répondre à une question du rapporteur, que les professionnels n'ont l'obligation que de transmettre à l'autorité compétente chargée des inspections les résultats d'autocontrôles défavorables effectués sur les produits – et non sur l'environnement – et lorsqu'ils sont sur le marché. Autrement dit, il n'est pas obligatoire de transmettre les résultats d'un contrôle environnement, ni les résultats d'un contrôle défavorable portant sur un produit qui se trouve encore dans l'usine.

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