Nos investigations ont duré plus d'un an et l'entreprise a été condamnée dans la mesure où il a été établi que le mensonge n'était pas par omission, mais bien par intention, avec une « double comptabilité » des analyses, une pour les services officiels et une pour l'entreprise.
En ce qui concerne les laboratoires d'autocontrôle, il faut poser la question de la responsabilité des opérateurs et de ce qu'ils doivent nous transmettre, car il faudra que les choses changent : il ne s'agira pas de nous transmettre des résultats défavorables à l'avenir en demandant aux pouvoirs publics ce qu'il faut faire, mais aussi de nous proposer des mesures de destruction des produits et de s'interroger sur les actions correctives à mettre en place dans l'usine.
Nous devons aussi nous poser la question de la qualité des analyses de laboratoire d'autocontrôle : nos laboratoires officiels doivent être accrédités, ils doivent être agréés et participer à ce que l'on appelle des essais d'inter comparaison. J'estime que nos laboratoires d'autocontrôle devront égalent être soumis à accréditation, à des essais d'inter comparaison : les méthodes d'analyse ne sont pas toujours très simples, notamment en bactériologie. Et pour que l'inter comparaison ait une réelle valeur, j'imagine assez bien que les laboratoires départementaux officiels, par exemple, conduisent les analyses d'inter comparaison auprès des laboratoires d'autocontrôle.
Nous avons donc à nous pencher sur un double sujet : d'un côté les entreprises, directement concernées ; de l'autre les laboratoires, auxquels les services d'inspection devraient pouvoir directement demander de leur transmettre les données. Actuellement, il faut passer par l'entreprise pour les obtenir.
Après vous avoir parlé de l'organisation du contrôle des entreprises, des PSPC, de la brigade d'enquête et de la mission des urgences, des fréquences des contrôles des établissements agréés – une fois tous les deux ans seulement –, j'en viens à la mise en transparence des résultats de contrôle : depuis la publication du décret du 15 décembre 2016 organisant la publication des résultats des contrôles officiels en matière de sécurité sanitaire des aliments, nous mettons à disposition, sur notre site internet, l'ensemble des contrôles sous une forme simplifiée en recourant à une sorte d'idéogrammes qui indiquent si les résultats sont satisfaisants ou très défavorables. Cette mise en transparence est essentielle ; mais pour aller plus loin dans la transmission des données au public, il faut passer par la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA), afin de savoir ce qui peut être transmis ou non, pour des raisons de confidentialité.
Nous avons environ 400 000 établissements à inspecter, dont 22 000 sont agréés, ce qui représente 55 000 inspections par an.
Venons-en maintenant à l'historique de l'usine, sur laquelle ont porté plusieurs de vos questions. Cet établissement, qui était l'usine Célia avant de devenir l'usine Lactalis, avait connu en 2005 un accident sérieux : on avait alors compté 146 malades, ce qui était loin d'être négligeable. À l'époque, les autocontrôles n'avaient pas permis de mettre en évidence des contaminations – nous n'avions pas eu d'autocontrôles positifs. Cette crise a été gérée par nos services et par la DGCCRF – du fait d'un partage des compétences entre nos services, qui mériterait d'être réexaminé, car assez peu lisible et compréhensible depuis l'extérieur : cette situation découle du protocole de répartition des contrôles établis en 2006, qui prévoit que les laits infantiles sont suivis par la DGCCRF ; j'ai saisi mes collègues de la Direction générale de la santé (DGS) et de la DGCCRF pour réexaminer ce protocole et revoir la répartition et l'organisation de ces contrôles ; nous devons nous réunir prochainement à ce sujet.