En 2014, nous avons eu l'occasion de nous expliquer sur ce sujet devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques – preuve qu'il nous arrive de nous rencontrer. Rappelons que notre copie à l'époque était encore vierge, puisqu'il n'existait aucune réglementation concernant les vols de drones. Or leur nombre a explosé pour passer de quelques milliers en 2012 à près de 500 000 aujourd'hui. Il a donc fallu mettre au point une législation en lien avec le Parlement et sur la base d'une expertise que nous avons conduite en nous appuyant sur la direction générale de l'aviation civile (DGAC) et sur les dronistes eux-mêmes. C'est la mission interministérielle de sûreté aérienne qui a coordonné ce travail qui, après sa reprise par le Parlement, a donné lieu à la loi du 24 octobre 2016.
Ce texte prévoit pour les utilisateurs de drones dits « coopératifs » un certain nombre d'obligations d'information, de formation et d'enregistrement, qui entreront en vigueur l'été prochain. Ensuite, il nous faut travailler avec les producteurs de drones, ce qui est un peu plus compliqué : le marché étant détenu aux deux tiers par un fabricant chinois tandis qu'un fabricant français détient une partie de l'autre tiers. Des mesures sont en cours d'élaboration pour répondre aux questions du signalement électronique lumineux et de la limitation de la capacité des appareils. L'objectif est d'instaurer une sorte de permis de conduire afin que les personnes qui achètent ces drones en toute bonne foi ne les utilisent pas n'importe comment.
Se pose ensuite la question des drones utilisés à proximité ou au-dessus d'une centrale nucléaire ou d'autres installations sensibles – palais national, base militaire ou autres. Deux cas de figure sont possibles. Le premier est celui de l'erreur d'appréciation d'un droniste non malveillant, mais qui s'approche trop d'un site sensible. Nous allons mettre en place un système de détection des drones autour des différents sites à protéger, qui seront déterminés par chacun des ministères. Le système d'enregistrement permettra de retrouver le droniste grâce à sa signature électronique. Il a été testé et est opérationnel ; reste à le diffuser de sorte que les ministères ayant des sites à protéger s'équipent des détecteurs. Cela prendre du temps, mais le dispositif est d'ores et déjà au point.
Deuxième cas de figure : le drone malfaisant, dont le pilote cherche à faire des vols de reconnaissance ou à porter un coup à une installation. Nous avons travaillé sur les technologies avec des industriels français – des grands groupes mais aussi des PME innovantes – et cofinancé trois consortiums qui ont mis au point des produits agissant à trois niveaux : la détection, l'identification et la neutralisation des drones.
Sur les aspects « identification » et « neutralisation », les groupements industriels retenus ont rendu une copie très correcte : nous avons effectué des tests à Villacoublay avec l'ensemble des utilisateurs potentiels – l'administration pénitentiaire et les armées, par exemple. Les résultats obtenus sont satisfaisants. Un de ces groupements industriels a développé la séquence pratiquement jusqu'au bout – il a d'ailleurs vendu son produit au ministère de la défense, ce qui montre que la défense de nos bases les plus sensibles est opérationnelle. Le travail de développement a également porté sur des outils plus légers tels que des brouilleurs antidrones, d'ores et déjà commercialisés sur le marché et fabriqués par des industriels français. Certains de ces appareils ont été utilisés par les forces de police lors de grands événements comme la COP21 ou l'Euro 2016 ; ils permettent, en détectant le drone par radar ou à vue, de le faire tomber en prenant le contrôle de leur liaison Wifi ou en brouillant leur signal GPS.
Tout ce travail, alors que nous partions de rien, a été conduit en moins de trois ans. Nous avons pris les mesures législatives nécessaires et la plupart des décrets sont prêts et entreront en vigueur à partir de l'été prochain. Sur le plan technologique, nous avons développé plusieurs outils en favorisant la production française, dont certains intéressent le principal opérateur français de production d'électricité.