Intervention de Régine Engström

Réunion du jeudi 12 avril 2018 à 9h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Régine Engström, secrétaire générale et haut fonctionnaire de défense et de sécurité auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

En ce qui concerne les piscines, il faut avant tout garder à l'esprit que tous les dispositifs de réponse aux menaces contre la sécurité participent d'une logique globale. En matière de sécurité passive, on peut donc considérer que les nouvelles piscines sont encore plus performantes que les précédentes mais, comme l'a souligné le rapport d'audit de l'AIEA, la force de notre système de protection réside dans le fait qu'il est fondé sur une obligation de performance et non sur une obligation de dimensionnement des moyens, passifs ou actifs. En d'autres termes, notre système de sécurité repose sur la conjugaison de plusieurs moyens qui permettent de retarder les intrusions, là où les Américains misent au premier chef sur la solidité de leur défense passive, le stade suivant étant, en cas d'intrusion, le tir sans sommation.

S'agissant de la vulnérabilité des piscines, nous avons évidemment envisagé les diverses menaces potentielles – tirs, crashs d'avion… –, pour lesquelles je n'entrerai pas dans le détail sachant là encore, qu'il s'agit d'informations classifiées. Je peux vous dire néanmoins que nous avons procédé en 2016 à toute une série de tirs d'essai, avec toutes les armes possibles et imaginables, pour vérifier la résistance des structures de béton. Les résultats de ces tests sont confidentiels mais ils ont été satisfaisants. Tout ça pour vous dire que nous ne nous limitons pas à des simulations théoriques mais que nous procédons à des essais in situ. Quoi qu'il en soit, j'insiste une nouvelle fois sur le fait que la sécurité ne repose pas sur le seul dimensionnement des structures, mais obéit à un dispositif global.

Cela m'amène à la question des intrusions des militants de Greenpeace sur des sites nucléaires, à l'automne dernier. Je rappelle que, depuis la loi du 2 juin 2015 relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires, les intrusions sur des sites nucléaires dont l'accès est réglementé sont des infractions à la loi et sont donc punis de sanctions dissuasives. Je rappelle également que, selon le Défenseur des droits, « les faits, informations ou documents, quel que soit leur forme ou leur support, couverts par le secret de la défense nationale […], ne peuvent faire l'objet d'une alerte ».

Cela étant posé, si je comprends l'objectif poursuivi par ces intrusions, dont le but est de démontrer la vulnérabilité de nos installations nucléaires à d'éventuelles attaques terroristes, elles ne nous apprennent rien que les exercices que nous pratiquons n'aient déjà appris à nos inspecteurs.

Ensuite, le principe de défense en profondeur, qui est notre principe d'action, n'est pas, en réalité, d'empêcher les intrusions sur le site, mais plutôt de les retarder par toute une série de dispositifs non prévisibles et non visibles, qui seront déclenchés pour ralentir la progression des intrus et leur interdire l'accès à la zone d'importance vitale. Le délai ainsi gagné doit permettre, dans un premier temps, l'intervention des PSPG puis, dans un second temps, en cas de risque avéré, celle du RAID et du GIGN. De ce point de vue-là, ce n'est donc pas parce qu'il a été démontré que l'une des barrières pouvait être franchie que le système est défaillant.

Reste que ce genre d'intrusion pose de vrais problèmes, au premier rang desquels la sécurité des intrus eux-mêmes. Certes, ils s'identifient rapidement comme faisant partie d'une ONG, ce qui retient les forces de l'ordre d'agir comme elles sont entraînées à le faire en cas d'attaque. Mais on pourrait fort bien imaginer qu'il s'agisse de terroristes se faisant passer pour des membres d'une ONG, auquel cas le moindre temps de latence dans la réaction des gendarmes pourrait leur être fatal et être fatal aux agents d'EDF présents sur le site.

Cette forme d'activisme est donc extrêmement dangereuse, et nous devons sans doute faire en sorte, en travaillant de concert avec les ONG, que de telles intrusions ne se reproduisent plus, d'autant que les ONG en question ont bien d'autres moyens de se faire entendre, par voie de presse, en s'adressant aux parlementaires ou encore aux commissions locales d'information (CLI).

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