L'article L. 312-1 du code des juridictions financières dispose que lorsqu'un agent public a ordonné irrégulièrement des dépenses, il est justiciable devant une juridiction de droit commun : la cour de discipline budgétaire et financière.
Mais, mes chers collègues, j'appelle votre attention sur le fait que cet article comprend un II, disposant qu'un ministre est irresponsable financièrement. Je ne parle pas du tout de responsabilité pénale, pas de la Cour de justice de la République : lorsqu'un ministre est susceptible d'avoir ordonné irrégulièrement une dépense, il ne peut être poursuivi.
J'ai découvert cette situation lors d'une audition de la commission des lois, il y a quelque temps. Un ancien directeur de l'administration centrale de Bercy m'a expliqué que, quand il occupait ces fonctions, Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, avait décidé que les nouveaux enseignants n'iraient plus à l'école mais enseigneraient directement. Ce directeur a alors ordonné à tous les trésoriers et percepteurs du pays de payer les enseignants concernés, alors que le ministre de l'éducation nationale n'avait signé aucun texte. Lors de l'audition devant la commission des lois, il a précisé que cet ordre était purement illégal. Qu'aurait-il répondu au juge s'il avait été poursuivi ? Que c'était un ordre personnel du ministre et que, comme le ministre est irresponsable, ces poursuites n'avaient pas lieu d'être.
Mes chers collègues, si un maire d'une commune du Nord de la France demande à un secrétaire de mairie ou à un directeur de service d'acheter des déneigeuses, il lui sera répondu de le faire en été, faute de quoi elles ne seront pas livrées pour l'hiver. On ne peut pas admettre, dans notre pays, que la dépense publique n'obéisse à aucune régulation, hormis l'irresponsabilité de l'ordonnateur suprême.
Sous une autre majorité, j'avais tenté de faire voter cet amendement et le gouvernement de l'époque avait constitué l'hémicycle de telle manière que je n'obtienne pas gain de cause ; aujourd'hui, il y a une autre majorité, qui présente une loi pour rétablir la confiance. Mes chers collègues, cet amendement est important.