Intervention de Frédérique Vidal

Réunion du mercredi 19 juillet 2017 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :

Madame Ali, les problèmes des universités ultra-marines sont réels. L'université de Mayotte a été créée très récemment. Elle est effectivement rattachée à l'université de plein exercice de la Réunion. C'est un vrai sujet de préoccupation, d'autant que le taux d'échec des étudiants mahorais qui quittent Mayotte est bien supérieur à la moyenne – à hauteur de 90 % à l'issue de la première année. Il convient d'aider Mayotte à grandir. Doit-on reprendre la formation à la base ou soutenir le développement de l'université ? Je pense qu'il convient au préalable de recréer un environnement favorable – en organisant par exemple une meilleure rotation des enseignants entre Mayotte, la Réunion et la métropole – , et de développer une véritable chaine de valeur. J'y travaille avec Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Nous serons attentives au rôle des universités dans l'animation de leurs territoires.

Madame Lang, cinq académies expérimentent déjà la réservation de places de brevet de technicien supérieur (BTS) pour les bacheliers professionnels, sur avis du conseil d'école. Cela a permis d'obtenir un taux de réussite de plus de 60 %. Ce résultat est encourageant puisqu'il se situe au-dessus de la moyenne nationale. L'expérience va donc être prolongée et proposée à d'autres académies. Lors de la dernière réunion des recteurs, plusieurs nouvelles académies se sont portées volontaires. C'est le principe même d'une expérimentation fructueuse : elle essaime naturellement.

De façon générale, nous devrions revenir aux principes qui ont présidé à la création des baccalauréats professionnels et technologiques, mais aussi des sections de technicien supérieur (STS) et des instituts universitaires de technologie (IUT). Aujourd'hui, quelque 85 % des étudiants titulaires d'un diplôme universitaire de technologie (DUT) poursuivent leurs études, alors que le marché du travail manque de salariés de niveau bac + 2 ou + 3. Vu de loin, le taux d'insertion des titulaires d'un bac + 5 est excellent, mais, de plus près, on se rend compte que la moitié d'entre eux occupe un emploi de niveau bac + 3. Le système a clairement été dévié de sa philosophie initiale.

De même, la concertation a permis de soulever un autre sujet : par le passé, les élèves passaient leur baccalauréat professionnel en quatre ans. Aujourd'hui, ils le passent en trois ans. Le monde socio-économique est favorable à une année de formation additionnelle, pour faciliter l'employabilité de ces jeunes. Nous souhaitons réfléchir sur ce point et sans doute mettre en place une année d'étude post-baccalauréat, qui permettrait ensuite la poursuite d'études supérieures courtes ou plus générales.

Madame Hérin, nous travaillons sur les territoires. Des expérimentations sont en cours, comme la délocalisation des premières années de formation à l'université dans certains lycées. Cette solution présente de nombreux avantages. Elle permet notamment d'élargir la palette de formations dans les villes moyennes, offrant ainsi de nouvelles opportunités aux élèves et aux familles, parfois peu enclines à laisser partir leurs enfants, pour des raisons financières – appartenant souvent à la classe moyenne, elles ne bénéficient d'aucun soutien – ou d'éloignement. Ces élèves, qui préparent un BTS parce que le lycée de leur ville le leur propose, ont plus tendance que les autres à poursuivre leurs études ensuite. Ce type d'expérimentation est donc intéressant. Ce serait également une façon d'amener plus d'élèves vers le supérieur, en améliorant par ailleurs leur réussite, l'ajustement lié à l'arrivée dans l'enseignement supérieur étant alors moins difficile.

Monsieur Gaultier, nous travaillons sur l'expérience menée par exemple à Angers, où il n'y a plus de numerus clausus et où les études médicales ont été pensées comme un continuum, associé aux études des sciences de la vie. Par ce biais, des médecins, des professionnels paramédicaux, mais également d'autres professionnels de santé sont formés. Cette expérimentation doit encore être menée une année – afin de couvrir un cycle complet de licence – avant que nous puissions en faire le bilan. Mais elle semble porteuse et j'y prête une grande attention. Elle pourra constituer une piste pour les doyens des facultés de médecine et les universités dotées d'un secteur médical.

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