J'ai écouté attentivement vos propos. Vous êtes à Strasbourg. Je suis mosellane, élue dans la circonscription de Sarreguemines-Bitche. Je suis étonnée d'entendre que vous auriez la capacité de former davantage d'étudiants. Or ceux qui partent de chez moi pour venir chez vous ont été refusés sous prétexte qu'ils ne sont pas en Alsace, qu'il y a beaucoup trop d'étudiants et que vous n'avez pas la capacité de les prendre tous. Or nous sommes dans un contexte de milieu rural, à équidistance entre Metz et Strasbourg, et l'on nous ferme les portes du côté strasbourgeois.
Concernant le numerus clausus et le nombre de médecins libéraux librement installés, je souhaite vous faire part d'une anecdote. Il y a trois ans environ, j'ai regardé le cahier du Conseil national de l'Ordre des médecins qui s'installent en Moselle. Sur les 800 qui sont sortis « thésés », ils étaient moins d'une petite centaine à être prêts à s'installer comme généralistes. Tous les autres ont décidé de devenir spécialistes, d'aller dans les hôpitaux ou d'autres structures, ou encore de rester remplaçants. Ce n'est pas le problème du numerus clausus, mais celui de l'après. Nous posons-nous les bonnes questions ? Je n'ai pas la réponse.
Enfin, concernant les étudiants formés à Cluj, j'ai du mal à entendre qu'ils sont en situation d'échec. Lorsque l'on est classé 272e et que l'on n'en prend que 270 ou 271, l'on est tout aussi vertueux que les 270 ou 271 premiers. Ces étudiants vont à Cluj parce qu'ils ne se voient pas refaire une année dans des conditions assez terribles. Je reviens ici à votre affirmation selon laquelle vous avez la capacité de former plus d'étudiants. Je connais un peu les conditions de la faculté de Strasbourg, et j'imagine que c'est partout pareil. Certes, il n'y a pas d'égalité des chances et ce n'est pas très académique, mais les étudiants préfèrent aller à Cluj, où 90 % des étudiants sont francophones, voire français. Ces jeunes font leurs études mais se sentent quand même en situation d'échec, même s'ils réussissent à Cluj. Ils se sentent très mal par rapport à leurs amis qui sont restés en France. Il y a eu des suicides, pour cette raison, et nous avons dépêché des psychiatres. Ces étudiants n'ont pas trouvé leur place. Tout le système doit être repensé. Il ne s'agit pas d'augmenter les capacités pour augmenter les capacités.
Que fait un étudiant durant sa première année, puis lorsqu'il sort thésé ? Il faut y penser. En outre, comment éviter la déperdition d'étudiants, qui finalement restent mal dans leur peau parce qu'ils sont ailleurs ?