Eh oui, on en est là !
Faire la différence entre du sexisme et de l'humour, une dispute et de la violence conjugale, de la drague et du harcèlement, est visiblement une tâche toujours difficile dans notre société si profondément marquée par les stéréotypes de genre. C'est pourquoi nous devons nous atteler à la publicité et aux contenus médiatiques. Il faut faire cesser l'accumulation et la banalisation d'images sexistes dans l'espace public. Un récent rapport du CSA – que vous avez peut-être lu, madame la ministre, madame la secrétaire d'État – , publié à l'initiative de Sylvie Pierre-Brossolette, donne la mesure du problème. C'est accablant. Mais les pouvoirs réels des structures institutionnelles ou associatives qui pourraient veiller à une forme de déontologie active dans ce domaine sont introuvables. Dans ce projet de loi, il n'y a littéralement rien qui permette de mieux agir. Nous avons donc déposé des amendements visant à prendre des mesures concrètes dans ce domaine, mais ils supposent d'affronter le pouvoir des GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon – et des publicitaires.
Un autre chantier majeur, absent de ce projet de loi, concerne les personnels, notamment de police et de justice, que rencontrent les femmes victimes dans leur parcours. Il n'est pas question ici d'accuser les policiers, les magistrats, les psys, les personnels hospitaliers, qui sont simplement des individus membres d'une société, la nôtre, pétrie de sexisme et peu armée face aux mécanismes des violences faites aux femmes. Il s'agit plutôt de leur donner des outils, de systématiser leur formation et la sensibilisation pour assurer un accompagnement juste, décent et adapté des victimes.
Le Groupe F et le tumblr « Paye ta police » ont recueilli 500 témoignages dans les commissariats. Ce qui en ressort est glaçant, et confirme ce que nous savions déjà par les expertises des associations et des intervenants divers. On y trouve la remise en question des faits, la culpabilisation des victimes et la moquerie à leur égard, et même le découragement à déposer une plainte. Il y a par exemple cette femme à qui l'on dit, lorsqu'elle appelle le commissariat : « On ne se déplace pas pour des balais cassés. » Il y a encore cette autre victime qui témoigne : « On m'a répondu que je voulais me rendre intéressante et on m'a demandé la couleur du canapé sur lequel mon agression a eu lieu, parce que, " si c'est vrai, tu as eu le temps de regarder le décor de la salle ". »