Le délai de prescription des crimes commis sur les mineurs a été élargi à trois reprises : en 1989, pour faire partir le délai de prescription de la majorité de la victime lorsque ces crimes étaient commis par un ascendant ou une personne ayant autorité, en 1998 pour faire partir ce délai de la majorité de la victime quel que soit l'auteur du crime, en 2004, pour allonger ce délai de dix à vingt ans, à compter de la majorité de la victime.
Aujourd'hui donc, la loi permet de poursuivre de tels crimes alors qu'ils ont été commis jusqu'à trente-huit ans auparavant. Ce délai de prescription est déjà considérable au regard des risques de dépérissement des preuves.
Comme le soulignent les professionnels de la justice, l'allongement du délai de prescription fragilise l'exercice de l'action publique : les preuves matérielles disparaissent et les témoignages sont de moins en moins fiables et précis.
En cas de poursuites tardives, qui seraient portées jusqu'à quarante-huit ans après les faits, selon l'article 1er du projet de loi, il sera très difficile de réunir les preuves suffisantes pour permettre une condamnation de la personne mise en cause, voire pour justifier son renvoi devant la cour d'assises.
Des décisions de non-lieu ou d'acquittement risquent de porter un préjudice plus grand aux victimes qu'une absence de poursuites en raison de la prescription de l'action publique. Le doute doit bénéficier à l'accusé, la gravité des faits et la souffrance des victimes ne peuvent remettre en cause ce principe. L'allongement des délais de prescription ne fera pas reculer la criminalité et, en particulier, ne protégera pas nos enfants.