Le phénomène d'amnésie traumatique n'a pas d'âge : un majeur comme un mineur peut y être soumis. Cette raison serait donc suffisante pour prévoir, dans le cas des victimes majeures, le même délai de prescription que pour les mineurs.
Mme Autain a évoqué un autre point, très important : la nécessité d'aller porter plainte. Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, le dépôt de plainte constitue une seconde violence pour la personne violée, car il s'agit de raconter, de revivre devant un tiers le traumatisme qu'elle a vécu. Or le fait qu'une personne ayant subi les mêmes agissements de la part d'un même auteur ait le courage de porter plainte, de revivre cette violence, ce traumatisme, peut avoir un effet d'entraînement. Il me semble alors important de permettre aux autres victimes de suivre le mouvement enclenché – rien n'est plus traumatisant que d'en être empêché !
Nous savons tous que la question de la preuve va se poser à un moment ou à un autre. De toute manière, comme l'a dit Mme Autain, ce problème se posera avec la même acuité six mois après les faits ou vingt ou trente ans après ceux-ci, mais la possibilité de porter plainte est très importante car elle permet aux victimes d'obtenir une petite reconnaissance.
Madame la garde des sceaux, si vous ne voulez pas que la prescription soit la même selon que la victime est majeure ou mineure, alors il y a une solution très simple, qui consiste à adopter les amendements que nous examinerons prochainement et qui proposent l'imprescriptibilité des crimes sexuels commis sur des mineurs. La distinction entre majeurs et mineurs sera alors très claire. En effet, nous considérons la pédophilie comme un crime contre l'humanité. Nous aurons l'occasion de le redire.