L'article 2 aurait pu être une mesure phare de protection des enfants victimes de violences sexuelles. Madame la secrétaire d'État, vous aviez d'ailleurs annoncé, au début du mois de mars, que le projet de loi établirait un seuil d'âge au-dessous duquel l'enfant serait considéré comme ayant été contraint. Quelle n'a pas été ma surprise à la lecture de ce texte, où il est seulement proposé de préciser la contrainte et la surprise pour inclure éventuellement le non-consentement des victimes mineures selon l'abus d'ignorance, le manque de maturité ou de discernement ! Nous nous souvenons tous avec effroi de Sarah ou de Justine, qui ont été considérées à 11 ans comme consentantes à des pénétrations commises par des hommes de 22 et de 28 ans, ou de l'affaire d'Angélique, âgée de 13 ans.
Actuellement, les actes sexuels de pénétration sur mineurs de 15 ans sont interdits dans le seul cas où la victime crie ou est tuée. Comment rendre acceptable que des enfants de 11, 12 ou 13 ans puissent consentir à un acte sexuel ? Je n'admets pas qu'il puisse y avoir un débat, lors d'un procès, sur leur capacité à être consentants à un rapport sexuel avec un adulte. Je n'accepte pas que le Gouvernement recule ainsi sur cette question, sur la base d'argumentaires purement théoriques. L'opinion générale initiale était bien en faveur d'une mesure de bon sens, qui instaurait un seuil sous lequel un enfant serait obligatoirement considéré comme non consentant. On oppose désormais à cette disposition la menace d'une potentielle censure du Conseil constitutionnel. Les valeurs constitutionnelles de la France sont-elles incompatibles avec la protection des enfants violés par des prédateurs ?
Il est important de rappeler que nous ne débattons pas d'une situation hypothétique. Ces débats ont lieu parce que la loi a déjà failli et qu'elle n'a pas protégé des enfants. Le vide juridique est chaque fois pointé dans des affaires comme celles de Pontoise ou de Meaux, pour ne citer qu'elles. Il est nécessaire de légiférer efficacement. C'est pourquoi, plutôt que d'augmenter le risque de déqualification de viols et d'agressions sexuelles en atteintes sexuelles sur mineurs de 15 ans et d'entériner le viol comme un délit, plutôt que de redéfinir la contrainte ou la surprise, il faut établir une présomption irréfragable de non-consentement chez les enfants en dessous d'un certain âge – 13 ou 14 ans.
Une telle proposition n'est ni inédite ni déraisonnable. De nombreux pays voisins, comme le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie, la Belgique ou les Pays-Bas, ne questionnent pas, lors d'un procès, le consentement des mineurs en cas d'atteinte sexuelle. De nombreux députés ont d'ailleurs proposé, en commission, des solutions alternatives. Je me joins à eux et vous demande de faire preuve de courage afin, si ce n'est d'instaurer la présomption irréfragable, d'inverser la charge de la preuve. Pénétrer un enfant n'est pas de la sexualité ; le non-consentement doit être présumé.