Intervention de Stéphane Travert

Séance en hémicycle du mardi 22 mai 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Présentation

Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Elle se nourrit aussi, parfois, de la défiance des consommateurs et des injonctions contradictoires qu'ils envoient aux producteurs. Je ne crois pas que l'on puisse avoir des productions toujours plus saines et plus élaborées avec des prix toujours plus bas et des promotions toujours plus attrayantes.

Entre 2000 et 2016, le prix du lait payé au producteur est passé de 30 à 32 centimes par litre, soit 2 centimes de plus en seize ans : non pas 2 centimes par an, mais bien 2 centimes par litre de lait en seize ans, alors que, durant la même période, l'inflation a crû de plus de 27 % et le produit intérieur brut – PIB – de 45 %.

Ce qui vaut pour le lait vaut aussi pour de nombreuses autres productions agricoles, en viande bovine, en porc, en volailles, en productions végétales… Sans nier le fait que certaines productions ont connu parfois des parenthèses plus favorables, le sujet auquel il nous faut apporter des réponses est bien celui de la répartition et de la relance de la création de valeur, pour lutter contre la vente à des prix anormalement bas. Ma priorité est bien de redonner aux agriculteurs le juste prix de leur production et la visibilité indispensable à tout entrepreneur pour penser le temps long et ainsi produire une alimentation de qualité, dans le respect de règles sociales, environnementales et sanitaires renforcées.

Premiers maillons de la chaîne de production alimentaire, les agriculteurs devront se regrouper pour servir des transformateurs innovants, qui valoriseront les matières premières sur le marché intérieur comme à l'international. Nous voulons y arriver en renforçant les organisations de producteurs pour permettre aux agriculteurs de peser collectivement, et en leur permettant, ensemble, de définir le prix de vente de leurs produits. Sachez que plus de la moitié des éleveurs livrant à une entreprise privée n'adhèrent pas à une organisation de producteurs – OP – ou à une coopérative laitière. C'est vrai aussi pour le secteur de la viande et des fruits et légumes, qui comptent chacun plus de 250 OP parmi les 600 recensées en France.

Que prévoit le présent projet de loi ? Intitulé « projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable », il comprend deux titres principaux, le premier à dominante économique, et le deuxième à dominante sociétale. Le titre Ier regroupe une palette de dispositifs visant à redonner sa juste place à chaque maillon de la chaîne de valeur agricole et alimentaire : construction du prix à partir de l'amont et des coûts de production des agriculteurs : contrat et prix associés désormais proposés par celui qui vend ; clause de renégociation plus opérationnelle, pour faciliter la réouverture des négociations commerciales en cas d'évolution des coûts de production ; lutte contre les prix abusivement bas ; contrôles et sanctions ; rôle accru de la médiation ; renforcement des interprofessions ; travail sur le statut et le rôle de la coopération agricole ; encadrement des promotions ; seuil de revente à perte fixé à 10 %.

Sur ce dernier point, je souhaite rassurer les consommateurs, parfois rendus inquiets par les propos alarmistes d'un grand distributeur. Oui, c'est vrai : le relèvement du seuil de revente à perte et la fin des promotions excessives vont induire pour la distribution, dans un premier temps, une hausse de marge et de chiffre d'affaires. Mais, il n'y a aucune fatalité à ce que ces hausses se traduisent par une augmentation globale des prix pour le consommateur.

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