Intervention de Clémentine Autain

Séance en hémicycle du jeudi 24 mai 2018 à 9h30
Présence des parlementaires dans les organismes extérieurs au parlement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClémentine Autain :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, il est vrai que le diable politique se cache souvent dans les détails techniques. En l'occurrence, la proposition de loi qui a été déposée conjointement par les députés de la majorité et par ceux du groupe Les Républicains a pour objectif de légiférer sur la présence des parlementaires – députés et sénateurs – dans certains organismes extraparlementaires.

Si le sujet semble un peu aride et technique, en réalité, il dissimule des enjeux politiques véritables sur lesquels je tiens à intervenir aujourd'hui, au nom du groupe La France insoumise.

Cette proposition de loi était rendue obligatoire par l'article 13 de la loi organique du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, qui prévoit qu'à compter du ler juillet 2018 un parlementaire ne pourra plus être désigné en cette qualité dans une institution ou dans un organisme qu'en vertu d'une disposition législative. C'est celle-ci que nous examinons ce matin.

Cette proposition de loi a donc pour but de clarifier les règles qui régissent la présence des parlementaires dans ces organismes, de garantir la présence des parlementaires au sein de ces mêmes organismes lorsque celle-ci se justifie et, enfin, de simplifier le champ de ces organisations.

Nous partageons l'objectif de clarification : il existe en effet aujourd'hui 193 organismes, dont 58 nouvelles instances qui ont été créées depuis octobre 2014 – inflation notable ! Cela représente ainsi 660 nominations au Sénat et 700 à l'Assemblée nationale.

Nous estimons qu'il aurait été plus judicieux de simplifier le système des organismes extraparlementaires, en les distinguant selon leurs caractéristiques entre les instances d'expertise, celles d'application de la loi et celles de contrôle. Ne pourrait-on pas fusionner plusieurs organismes ?

Nous le savons toutes et tous ici, dans cet hémicycle, les journées ne comptent que vingt-quatre heures. D'ailleurs, la présence des députés et des sénateurs dans ces mêmes organismes n'est pas toujours aisée. Si l'on veut gagner en efficacité, il faut par conséquent se poser la question du temps, qui devrait figurer à l'agenda de nos réflexions sur l'exercice de notre mandat. Je pense d'ailleurs que le projet du Président de la République, qui souhaite diminuer le nombre de parlementaires, ne va pas faciliter le travail des élus représentants du peuple. Nous serons en effet bientôt moins nombreux, alors que les tâches – tout à fait importantes – que nous aurons à accomplir se multiplient.

À un moment où le rôle du Parlement et la place de l'opposition sont mis à mal par le Président de la République et par la majorité, nous estimons que la place des parlementaires dans ces instances doit être réaffirmée : elle est en effet importante et vitale pour la démocratie.

Il s'agit en effet, pour les parlementaires, d'un levier essentiel, ces organismes permettant de les associer à l'établissement d'un constat, à l'évaluation, au contrôle et au suivi de l'application des lois, ainsi qu'à un dialogue direct avec les acteurs de terrain, avec certains organismes ayant des compétences spécifiques ainsi qu'avec les associations.

La présence des parlementaires dans certains organismes, comme l'Agence française de développement, la Caisse des dépôts et consignations ou la Commission nationale de l'informatique et des libertés, leur permet d'accéder à une mine d'informations nécessaires au bon contrôle de l'action gouvernementale.

Mais derrière l'affichage, et derrière les objectifs que nous pouvons partager, cette proposition ne se donne pas les moyens de renforcer les pouvoirs de contrôle des parlementaires. Elle ne remet en effet pas en cause le pouvoir discrétionnaire des présidents de l'Assemblée et du Sénat en matière de nomination.

Certes, certaines déclarations, comme celle du président de Rugy, veulent nous faire croire à des nominations plus transparentes, réalisées en concertation avec les présidents de groupe et tenant compte de leurs souhaits. En pratique, nous le savons, nous le vivons, ces nominations restent des enjeux de pouvoir. Or ceux qui détiennent le pouvoir ont tendance à vouloir le garder et à accroître leur influence. Si le président de Rugy jure faire « des propositions aussi consensuelles que possible », il reste en la matière seul décisionnaire, comme son homologue du Sénat pour les nominations de sénateurs.

Ces déclarations peuvent étonner, mes chers collègues, quand on se rappelle – je ne prendrai qu'un exemple, mais il est de taille – la proposition consensuelle de nommer à la tête de LCP - Assemblée nationale un certain Bertrand Delais, formidablement connu…

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