Je relis l'article du code rural visé par l'amendement et les sous-amendements, et je ne suis pas sûr que la disposition soit limitée aux produits évoqués par Loïc Prud'homme : à mon sens, l'ensemble des produits phytosanitaires sont concernés.
L'objectif du Gouvernement, et celui des auteurs des sous-amendements, est légitime : préserver la santé de nos concitoyens. Mais la discussion qui s'est engagée a aussi montré qu'il n'y a pas d'étude d'impact sérieuse sur le nombre de terres qui seraient mises en friche, ni sur les conséquences d'une telle mesure sur les exploitations bio.
De plus, il faut prendre en considération une réalité socio-économique : la modification de la vie dans nos campagnes. Une nouvelle population arrive dans le monde rural, en Normandie comme ailleurs. À Dieppe, il y a parfois des Parisiens qui s'installent parce qu'ils trouvent la ville belle – et ils ont bien raison – puis qui trouvent qu'il y a tout de même beaucoup de goélands, que la drague du port est bruyante, que les chalutiers partent à la pêche très tôt le matin et que cela les empêche de dormir… L'activité économique engendre des inconvénients.
Les changements dans nos campagnes sont globalement plutôt positifs : cela fait vivre les écoles, les commerces… Mais les conflits d'usage et les conflits de voisinage sont de plus en plus fréquents.
Je ne suis pas sûr que le législateur doive aggraver ces tendances déjà présentes, et en particulier risquer de mettre les préfets en porte-à-faux, de les opposer à la population et aux maires. Les difficultés seront, je crois, grandes.
Enfin, à ma connaissance, les agences régionales de santé et les préfets disposent déjà, lorsque la santé publique est en jeu, de prérogatives qui leur permettent de protéger la population. Une ARS peut, à tout moment, considérer que l'usage d'un produit dangereux nécessite l'établissement d'un périmètre de protection ou des examens.
Il ne me semble pas utile d'en rajouter avec cet amendement, dont l'efficacité et les conséquences me semble douteuses, d'autant que nous n'avons pas d'étude d'impact.
Afin d'éviter que des mesures destinées à atteindre des objectifs légitimes n'entrent en contradiction avec la vie réelle, je propose que l'amendement du Gouvernement soit retiré pour être retravaillé et expertisé, afin que nous puissions en débattre sereinement.