Intervention de Michel Antony

Réunion du jeudi 17 mai 2018 à 10h30
Commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

Michel Antony, président fondateur de la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités :

Il va de soi que nous ne remettons pas en cause l'évolution de la société : au contraire, nous applaudissons à la féminisation et aux changements de mode de vie des médecins. Déjà, dans ma jeunesse, certains de mes collègues du monde médical travaillaient à temps partiel parce qu'ils avaient envie de vivre autrement. Nous ne critiquons donc pas ces évolutions.

Permettez-moi de rappeler encore que même si nos propositions paraissent restreindre de manière draconienne la liberté d'installation, nous désirons qu'elles soient mises en oeuvre en accord avec les professionnels de santé. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté sur ce point.

Par ailleurs, il est impossible de dresser un état des lieux général. On ne peut le faire que sur certains points : ainsi on connaît le nombre de services d'urgence qui ont été supprimés ; on sait qu'à l'époque des regroupements hospitaliers un millier de petits centres ont été fermés ; le nombre de maternités est passé de 1 500 environ en 1970 à 500 environ aujourd'hui : il a donc été divisé par trois. La Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités assure le suivi de la situation au jour le jour – c'est une tâche insupportable et déprimante, parce que l'on ajoute chaque jour une fermeture à la liste. Vous avez fait remarquer à juste titre que la situation s'aggrave.

En Bourgogne-Franche-Comté, comme en Bretagne, dans les Ardennes ou dans d'autres régions où la mobilisation est importante, s'exprime un « ras-le-bol » qui touche la totalité de la population, et notamment des élus. Ainsi, vous savez sans doute que le conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, qui est régulièrement sollicité par nos comités très actifs dans le secteur, a voté à l'unanimité contre le projet régional de santé (PRS). Ses arguments sont très clairs – ce sont les nôtres depuis très longtemps. Nous travaillons avec l'ARS lorsqu'il s'agit de monter un centre local de santé ou d'accueillir des étudiants, mais l'ARS ne répond jamais en rien à notre demande principale, qui concerne l'arrêt des fermetures de service et la « fourniture » des personnels de santé nécessaires.

Une quinzaine de localités sont mobilisées dans notre secteur, où le PRS a donc été rejeté, comme il l'a été récemment par les conseils départementaux du Doubs, de la Haute-Saône, de l'Yonne ou de la Nièvre. Il y a une fronde des élus : 70 élus ont ainsi rendu leur écharpe pour protester contre la fermeture des urgences de nuit à Clamecy ; à Montceau-les-Mines, 60 de vos collègues ont formulé cette même menace ; dans le Jura, 500 personnes ont brûlé leur carte électorale. Il existe une tension véritable, que l'on se doit de prendre en compte à l'Assemblée nationale. Comme le montre l'exemple de Bourgogne-Franche-Comté, on ne peut plus continuer aujourd'hui à gratter un os qui est déjà largement gratté. On ne peut pas supprimer des services continuellement. On ne peut plus dire aux gens que c'est pour leur bien, que la concentration permettra de leur rendre un meilleur service ailleurs, que la télémédecine et les hélicoptères vont les sauver ! Les gens n'y croient plus, ils en rigolent, et les professionnels aussi. On sait très bien que sans la présence humaine et sans le maintien des services nécessaires aux populations, on va vers la catastrophe annoncée. La Coordination souhaite ardemment que l'exemple de Bourgogne-Franche-Comté fasse boule de neige, car on ne peut plus continuer ainsi.

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