Je souhaite apporter deux brefs éclaircissements. Tout d'abord, depuis quarante ans que j'anime un comité de défense des hôpitaux, je ne puis que constater que l'augmentation des déserts médicaux est évidente. Des analyses plus fines doivent être menées sur le territoire, car de nombreux documents, tels que des cartes, sont largement erronés. Par exemple, je suis intervenu à Châtillon-sur-Seine, en Côte-d'Or, qui est considéré comme l'un des départements les mieux dotés de la région ; mais en fait, hors du pourtour dijonnais, c'est le désert ! Il y a même des déserts médicaux au coeur de Paris ! Il faut y faire attention pour attribuer correctement les aides.
Ensuite, les statistiques sur le renoncement aux soins publiées par le Secours populaire français, l'Union confédérale CFDT des retraités ou divers organismes, montrent que 20 % à 30 % des gens n'achètent plus de prothèses, consultent moins ou même ne consultent plus du tout. On met souvent en avant le problème financier, qui est effectivement le motif principal de renoncement aux soins. Cependant, les analyses montrent que le problème de l'éloignement est de plus en plus souvent mentionné. En effet, la mobilité est difficile dans de nombreuses régions, lorsqu'il n'y a plus de transports publics et que des services hospitaliers ont été fermés. Dans notre secteur, par exemple, on prête des scooters aux jeunes pour qu'ils aillent en formation. Certaines régions cumulent donc les handicaps. Voici quelle est la vie de nombre de nos concitoyens aujourd'hui.
Il faudrait également analyser précisément ce que coûtent les regroupements hospitaliers et les restructurations opérées depuis une vingtaine d'années en termes de déplacement. Les chiffres de prise en charge des déplacements médicaux ont explosé partout ; il y a parfois eu des abus – je me souviens qu'André Grimaldi disait qu'un de ses patients venait en taxi depuis Orléans à sa consultation à Paris. On exclut généralement ces coûts lorsqu'on analyse les dépenses de santé, alors que les transports constituent une part importante du reste à charge.
En ce qui concerne le numerus clausus, vous avez rappelé, madame Trisse, que c'est en aval et non en amont que se pose le problème. Mais si on a restreint l'entrée à la faculté, on aura d'autant plus de problèmes en aval. En outre, ouvrir le numerus clausus n'exclut pas de repenser les stages.
Les aides actuelles ont montré leur inefficacité, comme tout le monde le dit. L'Ordre des médecins lui-même l'a affirmé sur son site, en expliquant que les « mesurettes » prises depuis dix ans ne portent pas leurs fruits et qu'elles doivent être attribuées de manière plus ciblée ; mais ils ont dû retirer ces déclarations sous la pression de leur base. Nous souhaiterions que les aides publiques permettent par exemple d'assister les médecins dans leur travail administratif, sans quoi celui-ci est financé par les associations ou les collectivités municipales.