Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la rapporteure, mes chers collègues, après des dizaines d'heures de débats sur ces deux textes d'une importance capitale, nous parvenons à peu près tous, je crois, quelles que soient nos sensibilités politiques au sein de cet hémicycle, à la même conviction : nous avons vécu un moment particulier, mais il n'est pas nécessairement à notre honneur, car il a comporté le meilleur et le pire.
Commençons par le meilleur. Bien entendu, nous reconnaissons tous la légitimité, l'opportunité, la nécessité de légiférer pour tenter de rétablir la confiance dans la vie publique, notamment dans la vie politique. Car il s'agit bien de rétablir cette confiance déjà rompue avec nos concitoyens. De la méfiance habituelle envers le politique et ses acteurs, nous sommes aujourd'hui passés à une véritable défiance, qui demain deviendra dégoût si nous n'y faisons rien. Il nous fallait donc agir rapidement et avec force, mais peut-être ne fallait-il pas confondre vitesse et précipitation.
Ces projets de loi étaient donc une bonne idée, mais c'est malheureusement plus tard que, parfois, le pire est arrivé.
Le calendrier, tout d'abord, laisse à penser que l'exécutif a un peu confondu l'intérêt médiatique et les exigences démocratiques auxquelles il aurait fallu répondre. À l'évidence, ces deux projets de loi ont été préparés à la hâte, voire mal ficelés, alors qu'il aurait fallu prendre le temps de la réflexion et de la concertation.
Pour ce qui est de la méthode, ensuite, nous avons tous pu constater au cours de ces dix jours, en commission comme en séance, plusieurs maladresses, excusable dans la plupart des cas, mais aussi quelques irrégularités assez graves, qui le sont beaucoup moins. Je n'oublie pas non plus le sectarisme dont ont parfois fait preuve les membres de la majorité, en rejetant systématiquement certains amendements qui, reconnaissons-le, allaient souvent dans le bon sens.
Vous avez très souvent su, madame la garde des sceaux, corriger ces erreurs, nous devons le reconnaître – je pense tout d'abord à la réserve ministérielle – , mais vous avez aussi refusé de nombreuses idées, pourtant pragmatiques et inspirées par une réalité de terrain, que nous aurions certainement pu voter tous ensemble.
Parlons maintenant un peu du fond, ce qui est finalement le plus important.
Ces textes contiennent de bonnes mesures mais, au lieu d'une réforme globale, ambitieuse et véritablement structurelle, nous avons droit à des lois d'ajustement de circonstance, à peine conjoncturelles. C'est bien dommage, car les élus de notre groupe ont fait des propositions qui allaient est dans le bon sens : le casier judiciaire, la suppression du verrou de Bercy, un véritable statut des collaborateurs et tout ce qui pouvait nous permettre de rendre effectivement confiance à nos concitoyens.
En outre, la plupart des dispositions que vous avez adoptées ne concernent finalement que les élus, notamment les parlementaires, mais oublient les autres acteurs de la République, tout aussi importants, que sont l'administration, la haute fonction publique, ainsi, bien sûr, que ceux qui la dirigent : les ministres. Nous sommes nombreux à le penser, sur tous les bancs de notre assemblée, et ç'était très certainement l'occasion de le matérialiser.
Pourtant, malgré cette défiance, nous serons nombreux à voter ces lois. À cet instant, l'état d'esprit du groupe Les Constructifs consiste avant tout en un véritable sentiment d'inachevé.