Mon analyse ne vous vise pas particulièrement, monsieur le commissaire, mais je pense que l'on sous-estime la rupture qui existe entre le peuple et l'Europe. Le Président de la République a expliqué qu'à force de présenter systématiquement l'Europe comme un bouc émissaire, les responsables nationaux ont instillé le virus de la défiance. À mon avis, nous sommes bien au-delà de cela. Il faut réorienter de façon radicale une politique européenne s'appuyant pour l'essentiel sur un libéralisme exacerbé qui provoque des ruptures terribles au niveau des territoires.
Depuis 2014, les banques ont reçu 767,3 milliards d'euros sous forme de prêts de la Banque centrale européenne (BCE), à des taux compris entre 0 % et 0,4 %, en plus des 1 700 milliards d'euros de garanties des plans de sauvetage élaborés à la suite de la crise de 2008. Ne pensez-vous pas qu'il vaudrait mieux créer, sous l'égide de la BCE, un fonds européen de développement solidaire et écologique qui permettrait de lancer un plan d'investissement global de l'Union européenne, soutenant une reconstruction productive, durable, sur des bases sociales de solidarité ?
Ne pensez-vous pas que le budget – qui représente seulement environ 1 % de la richesse créée dans l'Union européenne – est étriqué au point d'incarner une forme d'absurdité économique ? Dans une zone économique intégrée, refuser de se doter d'un budget conséquent ne revient-il pas à se priver totalement d'un levier décisif pour dynamiser l'activité ? Victor Hugo disait : « Ce que Paris conseille, l'Europe le médite. Ce que Paris commence, l'Europe le continue. » Qu'en pensez-vous ?
Vous dites souhaiter une Europe plus démocratique et notamment lutter contre la fraude fiscale. Pourrons-nous dire « veni mosco vici » dans quelques mois ? (Sourires.)