Je ne mésestime pas la difficulté que rencontrent les enseignants pour faire appliquer cette mesure, malgré le règlement dont se sont dotés certains établissements. Le problème est réel, mais ce n'est pas avec cette loi que vous allez le régler, vous le savez pertinemment.
Dans certains établissements, des professeurs collectent les appareils au début du cours afin de s'assurer que leurs élèves ne soient pas tentés d'ouvrir leur sac et de regarder leur portable, comme l'évoquait tout à l'heure M. Corbière. Toutefois, en cas de conflit, un enseignant n'a pas le droit de fouiller un élève ni de confisquer un téléphone, car il ne s'agit pas d'un objet dangereux. Votre texte ne répond en aucun cas à ces préoccupations quotidiennes et très concrètes des enseignants.
La secrétaire nationale du syndicat SE-UNSA – le Syndicat des enseignants – dénonce, pour sa part, « une annonce purement médiatique » et « anecdotique par apport à d'autres sujets comme le recrutement des enseignants, leur formation ou la maîtrise des outils numériques ». Selon elle, l'interdiction absolue est impossible à cause du « manque de moyens » – ce n'est donc pas un problème législatif, mais bien un problème concernant l'exécutif. Elle précise que « les professeurs ne vont pas se transformer en police du portable alors qu'ils n'ont déjà pas le temps suffisant pour mener à bien l'apprentissage ».
J'en viens maintenant à l'autorisation des téléphones portables ou des tablettes pour un usage pédagogique. Là aussi, un débat s'impose, même si je regrette que nous soyons amenés à en discuter maintenant, car nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen de votre texte sur la place du numérique à l'école.
Tout d'abord, je pense que l'innovation pédagogique dispose de pistes très nombreuses hors du champ du numérique. Les écrans sont assez décriés comme source de la culture de l'immédiateté pour que l'éducation nationale soit prudente quant à leur usage dans un but pédagogique. Je me contenterai de rappeler à cet égard que les dirigeants de deux entreprises faisant partie des GAFA, Google et Apple, choisissent pour leurs enfants des écoles sans technologie. Cela devrait nous faire réfléchir collectivement. C'est à l'école que doit se faire l'apprentissage de la concentration – je sais, monsieur le ministre, combien vous y êtes sensible. C'est à ce prix que les élèves seront réceptifs à l'apprentissage des savoirs fondamentaux, auquel nous sommes collectivement attachés.
Monsieur le ministre, je suis attentivement vos propos, qui sont généralement très pertinents, …