Mes chers collègues, bien que nous ayons légiféré en 2010 sur la question du téléphone portable à l'école, nous y sommes encore régulièrement confrontés. Lorsque le législateur doit intervenir encore et encore sur le même sujet, c'est qu'il a choisi une mauvaise voie. Ni l'interdiction a priori ni l'interdiction a posteriori ne résoudront ce problème : il faut l'envisager plus largement, en tenant compte de l'accès aux réseaux, de la numérisation de la vie.
L'âge moyen auquel les enfants reçoivent leur premier téléphone est désormais de 11 ans. Or les enfants ne comprennent pas les enjeux liés à la protection de la vie privée et aux données personnelles – ces dernières étant indissociables de l'usage d'un téléphone portable, en dehors même des horaires de cours. Ils sont victimes de harcèlement numérique, d'attaques contre leur vie privée. Et à cause de la fracture numérique, qui joue aussi en matière de protection de la vie privée et de maîtrise des données, les parents sont démunis, incapables d'aider leurs enfants à acquérir les codes nécessaires à un bon usage du téléphone portable et – d'une façon plus générale – de tous les terminaux numériques.
C'est le rôle de l'éducation nationale que de former les jeunes à ces technologies, qui sont désormais partie intégrante de notre vie. Il ne s'agit pas seulement d'apprendre à gérer ses données et à protéger sa vie privée, mais aussi de savoir ce qu'est un code informatique. Il faut que les jeunes soient capables de comprendre toutes les questions liées au numérique, qui sont d'une importance capitale – y compris, à l'avenir, pour la souveraineté nationale. Tel doit être le rôle de l'école : il ne s'agit pas seulement d'interdire.