Intervention de Brigitte Bidault

Réunion du jeudi 24 mai 2018 à 11h30
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Brigitte Bidault, secrétaire générale du syndicat national des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes-Confédération générale du travail (CGT) :

Merci de nous avoir invités : il nous paraît en effet indispensable que la représentation nationale concoure à mettre en lumière les mécanismes de la crise de Lactalis afin, tout d'abord, qu'elle ne se reproduise pas, ensuite pour que la responsabilité des multiples acteurs soit établie à des fins d'éventuelles sanctions, enfin pour que des dispositions soient prises en vue d'assurer le droit de la sécurité alimentaire de tous.

Nous sommes très préoccupés, nous aussi, par l'avenir de notre administration. J'y reviendrai.

Nous tenons avant tout à saluer l'esprit de service public – on ne le souligne pas suffisamment – des agents qui ont dû traiter cette crise, qu'il s'agisse des agents des services vétérinaires ou des agents CCRF. Vous comprendrez que notre organisation syndicale affirme que la responsabilité des personnels de ces administrations comme de celles des salariés de l'entreprise ne saurait être engagée. Les responsabilités sont peut-être à rechercher ailleurs – je pense à l'organisation du travail dans l'entreprise, aux conditions de travail, aux droits des personnels et de leurs organisations syndicales, j'y insiste, à l'organisation et aux moyens des administrations et, plus largement, à la puissance publique, à l'efficacité des politiques et des administrations publiques de contrôle, à l'information et au droit des consommateurs.

Nous souhaitons d'autre part revenir sur l'idée de fusion des services, évoquée de manière récurrente au cours des précédentes auditions. À la suite de la RGPP, de la REATE et de la modernisation de l'action publique (MAP), la CCRF a été déstructurée, conduisant à la multiplication des donneurs d'ordres, à l'interministérialité, à des projets de mutualisation, de mise en place de l'interdépartementalité mais aussi à la rupture de la chaîne de commandement et de la nécessaire interaction entre le niveau central et les niveaux territoriaux de notre administration. De fait, la réorganisation territoriale de l'État n'a pas conduit à une fusion mais à une juxtaposition de ces administrations au sein de directions interministérielles placées sous l'autorité des préfets, l'objectif étant de trouver des synergies. Aucune n'a cependant été trouvée – pire : les coopérations et échanges existants avec d'autres administrations ont été réduits. Cela s'explique par les objectifs, les habilitations et les moyens qui diffèrent radicalement entre les deux administrations juxtaposées au sein de l'interministérialité – Mme Pique l'a très bien expliqué.

Même si nous restons prudents sur l'affaire Lactalis, dans la mesure où une autre s'était déjà produite il y a dix ans, nous nous interrogeons sur l'efficacité des nouvelles organisations et des articulations administratives mises en place entre les niveaux départemental, régional et central. Nous nous interrogeons également sur les moyens alloués à nos services – ici la question du volume et de la nature de l'emploi est posée mais pas seulement. Nous souhaitons que la DGCCRF et la DGAL soient réhabilitées en tant qu'administrations publiques de l'État, dotées chacune d'une chaîne nationale de commandement et appelées à coopérer comme elles le faisaient par le passé et non pas amenées à être diluées dans des interministérialités dont la perte d'efficacité a été démontrée, notamment par le rapport Auvigne-Masurel de l'IGF et de l'IGA, remis en 2016.

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