Intervention de Jean Boudeau

Réunion du jeudi 24 mai 2018 à 11h30
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Jean Boudeau, membre du bureau national et inspecteur CCRF à la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de la Vendée, Force ouvrière (FO)-CCRF :

Voilà. Il en a été de même dans les hôpitaux.

Vous nous avez également interrogés sur le fait de savoir ce qu'était un réseau pour nous. Les réseaux de contrôle non institutionnels, officieux donc, ont été créés au milieu des années 1990 du fait de la difficulté technologique et réglementaire posée par des secteurs de produits très compliqués, à la demande des agents et de bureaux de l'administration centrale, afin de relier des « spécialistes » au niveau des départements et des régions pour échanger sur les procédures technologiques et de contrôle de certains produits. C'est ainsi que les réseaux se sont créés. Il paraît nécessaire, pour les syndicats, que les moyens budgétaires de ces réseaux soient augmentés pour travailler mieux ensemble et se réunir plus souvent.

Le premier démantèlement auquel il a été procédé fut le retrait des agents de la DGCCRF des laboratoires qui ont été rattachés à la direction générale des douanes. Nous perdons petit à petit contact avec ces agents et des analyses, des conclusions, des rapports sont difficiles à obtenir du SCL au niveau national.

Vous vous êtes étonné, monsieur le président, qu'un agent puisse couvrir autant de secteurs. On peut certes poster un gendarme à chaque feu rouge pour vérifier qu'on ne le brûle pas – il en va de même pour nous. Reste que, il y a quelque temps, régulièrement, nous étions deux sur le terrain pour remplacer des agents en vacances ou en arrêt maladie ; c'est devenu très rare voire impossible du fait de la baisse des effectifs et du fait de l'utilisation de l'informatique depuis les années 1990 – qui peut être aussi bien une aide qu'une lourdeur. Il est en outre demandé, à raison, d'être performant et donc d'avoir des indicateurs de performance reliés au niveau national. Le temps pris à renseigner ces indicateurs est parfois autant de temps pris sur une enquête.

Nous avons, comme dans de nombreuses sociétés privées et administrations, une démarche qualité avec des procédures très lourdes. Le formalisme à respecter lors des contrôles à la production CP2M, comme dans le cas de Lactalis, est très important, au point de nous « plomber », au détriment du travail de terrain – avec moins de possibilités de prélèvements dans les entreprises – et du travail de bureau – un contrôle nous demandant de nombreuses journées de bureau, ce qui n'était pas le cas autrefois. Là encore nous sommes dépendants des effectifs.

Je terminerai par une précision sur le contrôle sanitaire dans les entreprises de fabrication : tout dépend du fait qu'on contrôle des denrées d'origine animale ou des denrées d'origine végétale. Dans mon département une société de filetage découpe le poisson pour en faire des filets. Bien sûr cette entreprise est contrôlée par un collègue de la DGAL qui établit les procédures d'agrément, délivre une certification, va contrôler le parasitisme des poissons, la bactériologie, etc. Or, moi, j'y vais pour vérifier la traçabilité, que le poids des barquettes de poisson corresponde bien à celui affiché… Notre compétence n'est donc pas la même : mon collègue fait son travail et moi, de mon côté, je remplis ma mission de loyauté et de sécurité.

Par contre, dans le secteur de la bière, par exemple, j'ai dans mon département une brasserie assez importante ; or, puisqu'elle est dépourvue de denrées animales, nos collègues de la DGAL n'y vont pas. Nous sommes seuls, agents de la DGCCRF, à faire les contrôles de loyauté, d'étiquetage, de composition mais aussi d'hygiène puisque nous vérifions la procédure HACCP – acronyme de l'anglais Hazard Analysis Critical Control Point.

Donc, en effet, tout n'est pas si simple.

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