Intervention de Olivier Touzé

Réunion du mercredi 30 mai 2018 à 18h00
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires :

Il s'agit de dossiers en cours concernant les produits laitiers, mais aussi d'autres produits alimentaires. Ce sont des produits de consommation courante, qui varient selon les demandes du fournisseur.

Cela n'en fait pas une opération banale, ni facile, puisque la fréquence rend parfois l'exercice difficile pour nos équipes, qu'elles soient au niveau central ou au niveau des points de vente. On peut recevoir parfois jusqu'à neuf demandes de retrait-rappel dans la même journée.

L'opération n'est pas automatisée, même si, en amont, sur notre service central, nous avons des systèmes informatiques qui permettent de traiter l'information avec le fournisseur. Concernant les magasins, nous sommes en revanche dans des interventions humaines. La problématique pour nous, quand on travaille avec le fournisseur, c'est d'aller rechercher la traçabilité des lots qui se trouvent dans notre chaîne de distribution.

On le voit bien avec Lactalis, la crise a une ampleur inédite et exceptionnelle. Nous souhaitons aujourd'hui tendre vers le zéro défaut. C'est l'objectif que nous nous donnons.

Le retrait-rappel Lactalis était inédit à plusieurs égards : la durée de la crise – presque un mois et demi –, le nombre de messages envoyés par le fournisseur Lactalis et la date à laquelle nous avons reçu les messages. Je vous donne un exemple : le premier message a été envoyé le samedi 2 décembre à 17 heures. C'est un service d'astreinte – puisqu'on est en système d'astreinte de Saint-Denis – qui a reçu l'information par téléphone. Il a organisé immédiatement la demande de retrait rappel par le fournisseur.

Puis cela a été l'escalade. L'arrêté du 9 décembre a été émis par le ministère, pour faire cesser la commercialisation de certains lots. Ensuite, on a eu quatre messages jusqu'au 13 janvier : le deuxième message aussi est tombé un dimanche matin à 11 heures pendant l'astreinte, ce qui a compliqué de nouveau la mise en oeuvre. On n'a jamais connu, de mémoire, de retrait aussi chaotique. J'ai une expérience importante, puisque cela fait près de vingt-cinq ans que je travaille dans la démarche « qualité » dans la distribution : on a parfois deux, ou trois messages maximum, mais cinq messages, c'est quand même très important et jamais vécu.

Beaucoup de messages étaient incomplets. Au premier message qu'on a reçu, il manquait des informations essentielles : on avait une identification d'un risque de gastro-entérite, alors qu'on était en face d'un problème de salmonelle. Dans ces cas-là, on a des messages sanitaires obligatoires à destination des consommateurs ; ils n'étaient pas indiqués sur l'affichette qu'on devait envoyer au consommateur. Dernier point, on a minimisé le risque puisqu'on nous a parlé de produits conformes, sur l'affichette, en évoquant le principe de précaution. Un certain nombre d'éléments étaient incomplets et imprécis, ce qui a rendu la tâche difficile, en termes d'analyse des risques.

Surtout, la multiplication des messages qui ont été envoyés a entraîné une déperdition d'efficacité et de confusion dans nos points de vente. Ils ont dû gérer, message par message, des retraits d'affichettes, de nouvelles affiches à poser, le retrait de lots supplémentaires… jusqu'au retrait systématique. Une des conclusions qu'on pourrait donner à cette histoire, qu'on a vécue difficilement, est la suivante : j'en suis persuadé, si on avait eu, dès le départ, un retrait de tous les lots concernant Lactalis, on aurait certainement géré, d'une façon plus tranquille et plus sereine, les investigations complémentaires, et peut-être remis des lots conformes – s'il y en avait, bien sûr. Voilà la première conclusion qu'on souhaite aborder.

Pour répondre à votre question concernant nos relations avec l'État, elles sont régulières et très bonnes. Nous travaillons régulièrement avec la mission des urgences sanitaires de la direction générale de l'alimentation (DGAL) et la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de l'Essonne. Nous entretenons des relations de transparence. Nous participons aux enquêtes sanitaires conduites par ces services.

Dans le cas de la crise Lactalis, nous avons eu deux étapes. Pendant la première étape, celle du retrait-rappel, les autorités nous ont interrogés, comme il est tout à fait classique, pour demander les messages qu'on nous avait envoyés ; nous les leur avons transmis ; elles nous ont également demandé les premières comptabilités matières que nous avions à notre disposition, et que nous leur avons aussi fournies. Le dispositif mis en place s'est accéléré à partir du 10 janvier, quand la crise a été portée sur la place publique. Nous avons alors participé et collaboré entièrement à des échanges avec l'administration lors d'auditions.

En conclusion, dans cette deuxième partie de crise, nous avons vécu une situation particulière. On reviendra tout à l'heure sur les mesures exceptionnelles qui ont été prises pendant cette période. Je vais laisser la parole à Xavier de Fleurac, qui va vous expliquer, concrètement, comment sont mis en oeuvre les retraits-rappels dans nos magasins, en termes de fonctionnement.

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