La réunion

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L'audition débute à dix-huit heures.

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L'Assemblée nationale a constitué une commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire Lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques.

Il ne s'agit pas de faire le procès de qui que ce soit – nous ne sommes pas des juges – mais de comprendre comment cette contamination a pu se produire afin de réfléchir aux propositions que l'on peut formuler pour que cela ne se reproduise plus.

Nous poursuivons aujourd'hui nos auditions relatives à la commercialisation des produits contaminés.

Je rappelle qu'il nous a semblé indispensable de commencer notre cycle d'auditions par l'écoute de l'Association des familles victimes du lait contaminé aux salmonelles (AFVLCS).

Puis la commission d'enquête a entendu les organismes de contrôle de l'État, dont, en particulier, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui a géré les retraits-rappels, afin de savoir comment l'alerte avait été donnée et quelles mesures avaient ensuite été prises. Elle a également auditionné les associations de consommateurs.

Elle a reçu ensuite différents acteurs du secteur laitier, la Fédération nationale des industries laitières (FNIL), la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), directement touchés par cette crise, ainsi que les organisations professionnelles agricoles.

Une autre série d'auditions a porté sur les laboratoires d'analyses.

En ce qui concerne la commercialisation des produits, nous avons auditionné les pharmaciens et poursuivi avec des responsables de la grande distribution, et plus particulièrement, M. Régis Degelcke, président du conseil d'administration d'Auchan, M. Michel-Edouard Leclerc, président-directeur général du groupe E. Leclerc, M. Alexandre Bompard, président-directeur général du groupe Carrefour, ainsi que M. Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD).

Nous recevons aujourd'hui M. Thierry Cotillard, président d'Intermarché, M. Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires et M. Xavier de Fleurac, directeur de la performance des régions d'Intermarché.

Le groupement Les Mousquetaires est un distributeur qui regroupe des entrepreneurs et chefs d'entreprise indépendants, propriétaires de leurs points de vente et entièrement responsables de leur gestion. Il occupe une place prépondérante sur le marché de la distribution française : il réalise 41,6 milliards d'euros de chiffre d'affaires et compte 3 095 chefs d'entreprise indépendants dans ses rangs.

Intermarché - un des éléments prépondérants du groupement - réalise en France un chiffre d'affaires de 22,42 milliards d'euros hors carburant, soit une progression de 1,7 % et compte aujourd'hui 2 393 points de vente en Europe, dont 1 838 en France.

Nous avons beaucoup de questions à vous poser sur la façon dont votre enseigne a géré l'affaire Lactalis, la plus importante étant, évidemment, pourquoi des produits contaminés et faisant l'objet de retraits-rappels ont été proposés à la vente dans vos rayons. Nous avons, le rapporteur et moi-même, des interrogations plus précises.

Mais auparavant, je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et retransmise sur le portail vidéo de l'Assemblée nationale.

Comme il s'agit d'une commission d'enquête, je vais demander à chacun d'entre vous, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

MM. Thierry Cotillard, Olivier Touzé et Xavier de Fleurac prêtent successivement serment.

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J'en viens aux questions que nous vous posons. Elles pourront former le fil conducteur de cette audition.

En ce qui concerne l'information à destination des distributeurs concernant les procédures de retrait rappel, par qui et par quels canaux d'information avez-vous été informés du rappel et du retrait des produits ? Combien de messages avez-vous reçus ? Les informations ont-elles été claires et suffisantes ? Estimez-vous avoir eu, pendant la durée de la crise, des contacts réguliers et suffisants avec, d'une part, les services de l'État et, d'autre part, avec Lactalis ? Avez-vous bien été informé des cinq procédures de retrait rappel décidées par Lactalis et l'État ? Ces différentes vagues ont-elles nui à l'efficacité des procédures ? Disposiez-vous d'une liste unique des lots à laquelle vous reporter ? Si oui, sur quel support ?

En ce qui concerne la mise en oeuvre des procédures de retrait rappel, pouvez-vous nous donner une chronologie des alertes que vous avez reçues et des mesures que vous avez mises en oeuvre ? Mettez-vous systématiquement en place des vérifications pour vous assurer que les retraits rappels ont bien été effectués dans vos magasins ? À combien de procédures de ce type êtes-vous confrontés chaque année ? Rencontrez-vous souvent des difficultés dans la mise en oeuvre des procédures de retrait et de rappel ? Comment les employés sont-ils informés des mesures de retrait et de rappel ? Sont-ils formés à cette procédure ? Comment les clients sont-ils informés des mesures de retrait et de rappel ? Avez-vous mis en place des dispositifs d'informations spécifiques dans le cadre de l'affaire Lactalis ?

Pouvez-vous faire le point sur le nombre de produits retirés, le nombre de produits qui vous ont été ramenés, et le nombre de produits vendus par erreur dans votre enseigne ? Comment des produits faisant l'objet d'une procédure de retrait ont-ils pu se retrouver en rayon, et vendus à des clients ? Quels mécanismes, quelles procédures n'ont pas fonctionné ? Avez-vous eu des livraisons de produits Lactalis après des mesures de rappel ? Si oui, comment cela peut-il s'expliquer ? Les contrôles effectués par l'État de l'effectivité des mesures de retrait rappel ont-ils été utiles ? Des enseignes auditionnées avant vous ont indiqué qu'elles procédaient à des autocontrôles : est-ce votre cas ? En quoi consistent-ils ?

En ce qui concerne les leçons à tirer de la crise et les perspectives d'évolution, dans quel sens allez-vous revoir ou avez-vous revu votre procédure de gestion de crise ? Les propositions en matière d'évolution des codes-barres, pour permettre le blocage en caisse par lot, vous paraissent-elles pertinentes ? Savez-vous si cela existe à l'étranger ? Comment favoriser leur développement ? Quelles autres évolutions pourraient être envisagées ? Pour les rappels, la possibilité d'utiliser les données bancaires vous paraît-elle pertinente ? Que pensez-vous du guide de gestion des alertes alimentaires ? Vous apparaît-il aujourd'hui suffisant ? De quelle façon pourrait-il être amélioré ? Pouvez-vous nous indiquer où en sont les travaux du Conseil national de la consommation (CNC) concernant l'amélioration des procédures de retrait rappel ? Quelles formations aux procédures de rappel peuvent-elles être envisagées ? Une des solutions pourrait-elle être de bloquer tous les produits d'une marque dès qu'une alerte est lancée, quitte à remettre en vente peu à peu les lots qui s'avèrent ne pas être contaminés ? Quelles pistes suggérez-vous afin d'éviter que de telles crises ne se reproduisent ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Monsieur le président, madame la députée, messieurs les députés, comme mes confrères distributeurs, nous avons la volonté de contribuer, ce soir, à faire la lumière sur une crise exceptionnelle en termes de sécurité alimentaire ; qui plus est, elle a touché la sécurité alimentaire des enfants.

Cette commission nous semble donc tout à fait judicieuse, puisqu'elle nous permet d'aborder les maillons de la chaîne de causalité, en y incluant évidemment, sans nous défausser, les maillons sur lesquels nous avons été impliqués, et continuons de l'être.

Je représente la catégorie des distributeurs associés, par opposition aux distributeurs intégrés : je fais confiance à M. Leclerc pour vous avoir expliqué la différence. Nous sommes des chefs d'entreprise indépendants. Chaque propriétaire de son point de vente est l'exploitant de son magasin. Nous avons ainsi 2 134 points de vente sur le territoire national. En ce qui me concerne, j'ai 44 ans, j'assume mes fonctions, pour le collectif, de président de l'enseigne. J'ai moi-même deux points de vente en région parisienne à Issy-les-Moulineaux. J'ai une formation de base d'ingénieur en agroalimentaire.

Monsieur le président, je vous propose d'aborder les questions sous trois thématiques : en quoi l'affaire Lactalis a constitué un retrait-rappel inédit ; comment, face à cette situation inhabituelle, nous avons mis en place des mesures exceptionnelles ; en dernière partie, je vous propose de prendre un peu de recul et d'examiner la manière dont on pourrait construire évidemment un système plus sécurisant pour nos – et pour nos concitoyens.

Je suis venu accompagné d'Olivier Touzé, directeur de la qualité pour le groupement Les Mousquetaires et de Xavier de Fleurac, qui est en charge du suivi de la performance de nos points de vente. Si vous le permettez, Olivier Touzé va commencer à répondre sur les points purement techniques.

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Je dirige une jeune équipe en charge des process qualité et de la démarche qualité. Nous avons plus de 50 personnes dédiées à cette démarche. Le retrait-rappel est une chose assez courante en distribution. Nous travaillons bien sûr avec le fournisseur lorsqu'il se produit des alertes et celui-ci en a la responsabilité.

Il est bien responsable aujourd'hui de ces retraits. Il les organise, dans le cas d'un rappel consommateurs, avec l'administration. Celle-ci valide tous les messages que l'on reçoit. Nous mettons en oeuvre immédiatement, aussi bien en semaine que le week-end et les jours fériés, grâce à un système d'astreinte, les mesures de retrait-rappel. En 2017, on en a organisé 487, dont 67 rappels consommateurs et, en 2018, on a déjà noté une hausse de ces rappels consommateurs, puisqu'on a déjà réalisé 40 retraits-rappels de ce type depuis le début de l'année.

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Dans quel domaine ? S'agissait-il, en partie ou en grande partie, de produits laitiers ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Il s'agit de dossiers en cours concernant les produits laitiers, mais aussi d'autres produits alimentaires. Ce sont des produits de consommation courante, qui varient selon les demandes du fournisseur.

Cela n'en fait pas une opération banale, ni facile, puisque la fréquence rend parfois l'exercice difficile pour nos équipes, qu'elles soient au niveau central ou au niveau des points de vente. On peut recevoir parfois jusqu'à neuf demandes de retrait-rappel dans la même journée.

L'opération n'est pas automatisée, même si, en amont, sur notre service central, nous avons des systèmes informatiques qui permettent de traiter l'information avec le fournisseur. Concernant les magasins, nous sommes en revanche dans des interventions humaines. La problématique pour nous, quand on travaille avec le fournisseur, c'est d'aller rechercher la traçabilité des lots qui se trouvent dans notre chaîne de distribution.

On le voit bien avec Lactalis, la crise a une ampleur inédite et exceptionnelle. Nous souhaitons aujourd'hui tendre vers le zéro défaut. C'est l'objectif que nous nous donnons.

Le retrait-rappel Lactalis était inédit à plusieurs égards : la durée de la crise – presque un mois et demi –, le nombre de messages envoyés par le fournisseur Lactalis et la date à laquelle nous avons reçu les messages. Je vous donne un exemple : le premier message a été envoyé le samedi 2 décembre à 17 heures. C'est un service d'astreinte – puisqu'on est en système d'astreinte de Saint-Denis – qui a reçu l'information par téléphone. Il a organisé immédiatement la demande de retrait rappel par le fournisseur.

Puis cela a été l'escalade. L'arrêté du 9 décembre a été émis par le ministère, pour faire cesser la commercialisation de certains lots. Ensuite, on a eu quatre messages jusqu'au 13 janvier : le deuxième message aussi est tombé un dimanche matin à 11 heures pendant l'astreinte, ce qui a compliqué de nouveau la mise en oeuvre. On n'a jamais connu, de mémoire, de retrait aussi chaotique. J'ai une expérience importante, puisque cela fait près de vingt-cinq ans que je travaille dans la démarche « qualité » dans la distribution : on a parfois deux, ou trois messages maximum, mais cinq messages, c'est quand même très important et jamais vécu.

Beaucoup de messages étaient incomplets. Au premier message qu'on a reçu, il manquait des informations essentielles : on avait une identification d'un risque de gastro-entérite, alors qu'on était en face d'un problème de salmonelle. Dans ces cas-là, on a des messages sanitaires obligatoires à destination des consommateurs ; ils n'étaient pas indiqués sur l'affichette qu'on devait envoyer au consommateur. Dernier point, on a minimisé le risque puisqu'on nous a parlé de produits conformes, sur l'affichette, en évoquant le principe de précaution. Un certain nombre d'éléments étaient incomplets et imprécis, ce qui a rendu la tâche difficile, en termes d'analyse des risques.

Surtout, la multiplication des messages qui ont été envoyés a entraîné une déperdition d'efficacité et de confusion dans nos points de vente. Ils ont dû gérer, message par message, des retraits d'affichettes, de nouvelles affiches à poser, le retrait de lots supplémentaires… jusqu'au retrait systématique. Une des conclusions qu'on pourrait donner à cette histoire, qu'on a vécue difficilement, est la suivante : j'en suis persuadé, si on avait eu, dès le départ, un retrait de tous les lots concernant Lactalis, on aurait certainement géré, d'une façon plus tranquille et plus sereine, les investigations complémentaires, et peut-être remis des lots conformes – s'il y en avait, bien sûr. Voilà la première conclusion qu'on souhaite aborder.

Pour répondre à votre question concernant nos relations avec l'État, elles sont régulières et très bonnes. Nous travaillons régulièrement avec la mission des urgences sanitaires de la direction générale de l'alimentation (DGAL) et la direction départementale de la protection des populations (DDPP) de l'Essonne. Nous entretenons des relations de transparence. Nous participons aux enquêtes sanitaires conduites par ces services.

Dans le cas de la crise Lactalis, nous avons eu deux étapes. Pendant la première étape, celle du retrait-rappel, les autorités nous ont interrogés, comme il est tout à fait classique, pour demander les messages qu'on nous avait envoyés ; nous les leur avons transmis ; elles nous ont également demandé les premières comptabilités matières que nous avions à notre disposition, et que nous leur avons aussi fournies. Le dispositif mis en place s'est accéléré à partir du 10 janvier, quand la crise a été portée sur la place publique. Nous avons alors participé et collaboré entièrement à des échanges avec l'administration lors d'auditions.

En conclusion, dans cette deuxième partie de crise, nous avons vécu une situation particulière. On reviendra tout à l'heure sur les mesures exceptionnelles qui ont été prises pendant cette période. Je vais laisser la parole à Xavier de Fleurac, qui va vous expliquer, concrètement, comment sont mis en oeuvre les retraits-rappels dans nos magasins, en termes de fonctionnement.

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Xavier de Fleurac, directeur de la performance des régions d'Intermarché

Je suis plus particulièrement chargé du pilotage des équipes régionales, au contact des magasins.

En ce qui concerne les retraits-rappels, notre enseigne dispose de toutes les compétences et de toutes les procédures adaptées. En principe, la sécurité alimentaire dans notre système actuel dépend de l'autocontrôle. À ce titre, chaque magasin est responsable de la qualité chez lui ; dans la pratique, à l'aide des équipes du siège, nous leur apportons toute l'aide nécessaire. Il existe des procédures adaptées. À chaque stade, elles sont accessibles aux salariés, détaillées de façon très pratique, grâce à tous les efforts et tous les supports de formation adaptés : du e-learning disponible sur nos intranets pour tous nos collaborateurs et des formations en présentiel délivrées par notre prestataire qualité, qui s'appelle Aqualéha.

À ce titre, en 2017, des formations ont eu lieu dans 2 022 magasins, ce qui représente 7 358 collaborateurs. Spécifiquement, la définition des retraits-rappels est présentée, ainsi que les conséquences en résultant, en termes de sécurité, pour nos clients, mais aussi les procédures à mettre en place dans chacun des magasins. Concrètement, les magasins sont donc parés pour traiter ces cas-là. Concrètement, les messages d'information sont déposés dans une rubrique sur notre Intranet sur la première page, la « page de garde » : sur un bandeau vertical très visible, avec une indication message urgent et un panneau « Danger ». Tant que le message n'est pas traité, il apparaît en surbrillance. C'est vraiment extrêmement visible.

Le salarié référent concernant les retraits-rappels, chargé de consulter ces rubriques – dans nos consignes, au minimum deux fois par jour – télécharge et édite le message, édite les affichettes à positionner sur nos rayons et fait le lien avec le collaborateur chargé de retirer les produits, de les isoler, de les retirer de la vente et de les identifier en réserve. En cas de doute, il peut joindre un numéro vert, qui s'appelle le « réflexe qualité » chez nous. Là, il peut échanger avec les interlocuteurs de la direction de la qualité de la centrale. À ce titre là, l'année passée, il y a eu un peu plus de 10 000 appels vers ce service. Donc c'est un système qui fonctionne bien.

Je viens de vous décrire les règles standard concernant les retraitsrappels. En plus de ces dernières, face à la situation de crise née de l'affaire Lactalis, nous avons réagi et mis en place des mesures exceptionnelles à partir du 11 janvier. La principale a été le blocage en caisse par désactivation des codes-barres. Si un produit était passé entre les mailles du filet, il ne pouvait pas être scanné par l'hôtesse de caisse, et un message sur l'écran de la caisse indiquait : « vente interdite ». Concrètement, le produit ne pouvait pas être encaissé.

La deuxième mesure a été la mise en place d'un message d'alerte complémentaire sur tous nos écrans d'ordinateur.

Chez Intermarché, une radio interne diffuse des informations à destination des collaborateurs avant l'ouverture des magasins. Par cet intermédiaire, nous avons commencé à diffuser un message d'alerte toutes les vingt minutes concernant les retraitsrappels lors de cette crise Lactalis.

Nous avons également mis en place un numéro vert pour nos clients. Les magasins ont été appelés par nos équipes régionales. Nous avons envoyé trois SMS concernant cette crise à tous les adhérents. Nous avons mis en place une assistance médicale en ligne. Nous avons également contacté tous les consommateurs qui avaient acheté des produits concernés depuis le 2 décembre grâce aux données de cartes de fidélité et des cartes bancaires, en collaboration avec les banques. Cela représente au total 14 774 contacts.

Bien entendu, nous tirons des enseignements de l'ampleur de cette crise, que M. Cotillard va vous détailler.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Comme M. de Fleurac vient de vous le dire, je pense qu'il y aura réellement un « avant » et un « après » l'affaire Lactalis concernant la gestion de nos retraitsrappels. Nous avons clairement connu un dysfonctionnement dans la mise en oeuvre opérationnelle de notre procédure. Les chiffres que je vais vous annoncer n'ont pas été publiés, mais ils ont été donnés à la DGCCRF dès qu'ils ont été consolidés, en toute transparence.

Sur 2 134 points de vente, nous avons retiré 110 000 boîtes de nos stocks. 2 313 produits concernés par le retrait-rappel ont été vendus, et aucune vente n'a été réalisée à l'export. Ces chiffres sont inacceptables à mes yeux, et nous avons failli. Chaque boîte que nous avons vendue était une boîte de trop. Tous nos efforts, quand nous avons eu ces chiffres, ont consisté à concentrer toutes les énergies de l'entreprise pour recontacter les consommateurs qui avaient acheté une de ces boîtes. M. de Fleurac a donné le chiffre : plus de 14 774 consommateurs ont été appelés grâce à deux systèmes : la carte de fidélité de notre système et la carte bancaire. Cela nous a permis, au final, de faire retourner 2 213 boîtes sur nos points de vente. C'est une conclusion à garder en tête pour la gestion future de nos retraits-rappels.

Aujourd'hui, nous disposons de trois éléments nouveaux pour la gestion de nos retraitsrappels qui n'existaient pas avant la crise Lactalis, que M. de Fleurac vient d'évoquer. Il s'agit tout d'abord de l'alerte par radio interne, nous avons la chance d'avoir une radio qui s'adresse à nos collaborateurs dès le matin, avant l'ouverture du point de vente. Lorsqu'il y a un retrait, les équipes de M. Touzé envoient le message à la radio, et il est diffusé dans nos points de vente. Deuxièmement, des bandeaux sur nos ordinateurs précisent les retraits en cours. Surtout, la grosse évolution, qui n'est pas propre à Intermarché, est le blocage en caisse des codes-barres concernés.

Quelles améliorations supplémentaires pourraient être apportées au système pour améliorer la sécurité alimentaire de nos consommateurs ? L'enjeu majeur est de s'assurer que demain, il soit possible d'assurer une traçabilité au lot, et non pas au code-barres. Pour cela, toute la chaîne doit travailler : industriels et distributeurs, nous devons nous réunir pour trouver une solution. Elle est sûrement proche, grâce aux évolutions technologiques en cours – je pense notamment à la radio-identification (RFID) – et c'est sur ce sujet que doit travailler toute la chaîne de distribution, pour assurer cette traçabilité au lot.

Le deuxième point d'amélioration porte sur les outils de gestion et de communication de crise. Je pense à l'harmonisation du processus de collecte des données bancaires. Nous avons connu une situation dans laquelle, en fonction de la banque que nous contactions, la réactivité était plus ou moins grande. Je pense qu'il faut absolument harmoniser la collecte des données. La création d'une application ou d'un site à destination des consommateurs serait une piste envisageable. Enfin, l'heure est certainement venue de faire évoluer le guide interministériel conçu par la DGCCRF, la DGAL et la DGS, ainsi que le propose le Sénat.

Aujourd'hui, la maîtrise du pilotage opérationnel du retraitrappel est beaucoup plus forte, mais nous avons tout intérêt à adopter une démarche collective pour normaliser des solutions qui n'existent pas, et qui pourraient encore améliorer toute la chaîne.

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J'ai une question anodine, mais qui doit avoir beaucoup d'importance pour vous : quelles informations vous ont vraiment manqué lors des rappels ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Concernant la dénomination du produit ou les lots, nous avons eu l'information précise. Au départ, nous avons senti – je m'exprime à titre personnel – que le fournisseur minimisait les risques dans l'information à donner au consommateur. Nous ne nous immisçons pas dans la gestion de la traçabilité du fournisseur. Le fournisseur nous donne les éléments pour que l'on puisse rechercher les lots dans notre chaîne de distribution, et nous faisons partir les messages aux magasins concernés. Ensuite, il revient à chaque point de vente de rechercher les produits concernés dans les rayons, nous faisons une traçabilité manuelle et comme le disait M. Cotillard, c'est un des points que nous souhaitons améliorer.

Le premier message que nous avons reçu ne faisait pas mention de salmonelles, mais de gastro-entérite. Habituellement, nous avons une information consommateur sur les symptômes. Ce sont des messages standards que nous donnons lorsqu'il existe un risque de listeria, de salmonelles, ou d'Escherichia coli. Ce message n'apparaissait pas dans l'information du fournisseur. Nous l'avons signalé dans les échanges avec le fournisseur. C'est de sa responsabilité, nous ne pouvons pas nous immiscer dans la communication du fournisseur qui, en plus, était validée par l'administration avec laquelle il travaille.

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Pourrions-nous avoir communication de ces messages ? C'est la première fois que nous avons connaissance de leur contenu même. Vous dites qu'ils font état de gastro-entérite et non de salmonelle dans le premier message. Monsieur le président, je vous suggère de demander la communication à notre commission de ce document.

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Cette remarque est très juste, c'est la première fois que l'on nous parle du contenu de ce message. Mon autorité me permet de vous en demander la communication, messieurs. Nous vous serions donc reconnaissants de nous les faire parvenir.

S'il est fait mention de gastro-entérite plutôt que de salmonelle, c'est particulièrement ennuyeux.

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Vous parlez, messieurs, des numéros de lots. Entre le producteur de lait et vous, le seul lien est le lot, c'est ce qui va vous permettre d'isoler, d'identifier et de tracer. Je suppose que vous avez un système informatisé de gestion des stocks, vous n'y entrez pas le numéro de lot des palettes que vous recevez ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Non. Aujourd'hui, le système informatique en place entre nos entrepôts – qui reçoivent nos marchandises – et nos points de vente, ne gère pas la traçabilité au lot vers nos points de vente. C'est un des éléments que nous souhaitons faire avancer avec les fabricants, les logisticiens, et nos points de vente.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

La traçabilité actuelle et l'information au niveau de nos stocks reposent sur l'EAN, c'est-à-dire sur le code-barres. L'intérêt de préciser cette information au niveau du lot est d'avoir un maillage beaucoup plus fin, et de ne pas retirer l'intégralité d'une production, mais seulement une partie qui serait concernée par une contamination.

C'est le vrai sujet, il doit faire l'objet d'une concertation entre l'ensemble des acteurs, et je pense que nous devrions faire cette proposition à l'Association nationale des industries alimentaires. Tant qu'un industriel ne met pas en place ce système, aucun distributeur ne s'équipera, et nous attendrons la mise en place d'un système qui existe dans d'autres domaines que l'alimentaire. Dans les magasins Décathlon, tous les produits textiles ont une étiquette RFID positionnée à la source, dès le départ du produit du lieu de production.

C'est aussi une question économique. Sur un produit textile qui coûte quinze euros, une étiquette d'un coût de cinq centimes est tout à fait absorbable. Pour les produits alimentaires dont le prix moyen est de 1,5 ou 2 euros, les industriels freinent à mettre en place un système qui coûte cinq centimes. Mais si tous les distributeurs et tous les industriels décident d'adopter cette démarche vertueuse, le coût ne serait pas de cinq centimes, il tomberait très vite à un centime, ce qui serait aisément absorbable par la chaîne.

La solution technique pour tracer le lot existe, il s'agit maintenant d'une décision d'équipement et de sourcing à mettre en oeuvre au niveau industriel aussi bien qu'au niveau des distributeurs.

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L'industrie pharmaceutique utilise un code différent de l'EAN à treize chiffres, qui donne le numéro de lot à la lecture. Avec ce système, il est possible d'indiquer à la lecture si le lot est en retrait. Cette lecture peut se faire à l'unité, sur chaque boîte, ou à la palette pour suivre le nombre de produits restant en stock. Il faut peut-être considérer différentes échelles : faut-il une information détaillée à la boîte ou à la palette ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Oui, on parle beaucoup de ce code 2D qui serait dissocié de l'EAN pour piloter la traçabilité au lot. Mais cela impose que tous les acteurs se mettent autour de la table, car il faut que chaque opérateur développe des équipements complémentaires, en particulier dans nos magasins, où nous devons faire une lecture-entrée et une lecture-sortie. On peut facilement équiper les opérateurs avec un smartphone, ensuite il faut pouvoir lire les codes 2D à la sortie caisse. Il faut donc mener une démarche avec les équipementiers, les fabricants et les logisticiens pour mettre au point ce système.

Nous devons rapidement nous réunir pour définir les standards.

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Peut-être que l'EAN 13 a atteint ses limites, il a vieilli. Il est restreint, on ne peut pas le faire évoluer. Le code QR est maintenant plus en phase avec nos demandes, et effectivement il faudra mettre au goût du jour les systèmes de gestion des stocks et de lecture.

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Madame Gipson, vous faites partie, avec M. Le Gac et d'autres, des députés qui travaillent dans cette commission, et Dieu sait que ce n'est pas facile en ce moment, alors que nous avons passé quelques nuits sur l'agriculture, et que nous allons faire de même sur le logement. Nous travaillons dans des conditions difficiles, et je tiens à remercier vivement les députés présents dans le cadre de cette commission.

Pourriez-vous, madame Gipson, nous présenter une petite contribution sur le codage, se fondant sur les auditions que vous avez eues, et eu égard à votre connaissance du sujet ? Nous avons la chance d'avoir une spécialiste parmi nous, c'est précieux pour la commission de compter parmi ses membres des députés qui connaissent ces points particuliers.

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Messieurs, vous avez dit qu'il ne vous appartenait pas de commenter la communication d'un fournisseur. Mais n'est-ce pas l'un des noeuds du problème depuis le début ? Est-ce que cette communication ne devrait pas être plus codifiée ?

Vous nous dites : nous recevons les messages que l'on reçoit, et nous sommes obligés de faire avec. Ne faudrait-il pas réfléchir à normaliser ces messages ? En quoi les messages reçus de Lactalis différaient-ils des messages que vous recevez habituellement dans d'autres procédures de retrait ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

L'information que nous avons reçue parlait de gastro-entérite, ce qui, selon le guide de gestion des alertes qui définit des modèles d'affichette en fonction du type de risque, ne justifiait pas de lancer un message sanitaire, comme cela est en revanche obligatoire dans le cas de la salmonelle. Or, le fournisseur savait qu'il s'agissait de salmonelle et, comme je l'ai dit, nous avons eu d'emblée le sentiment que le risque était minimisé, puisque le message évoquait par ailleurs le principe de précaution et l'analyse de produits conformes.

On peut donc raisonnablement se poser des questions, compte tenu de l'ampleur de la crise, qui va durer pendant cinq semaines, avec une multiplication des messages et, dès le 9 décembre, la publication de l'arrêté ministériel qui interdit certains lots à la commercialisation. Je veux bien qu'on ait fait des découvertes entre le 2 et le 9 décembre, mais il ne fait aucun doute que le fournisseur savait dès le départ quels étaient les risques. Si je fais cette remarque c'est que, de notre côté, cela nous a sans doute empêché d'adopter le bon schéma d'action.

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Si je comprends ce que vous nous dites, lorsque vous recevez un message qui parle de gastro-entérite et non de salmonelle, la procédure appliquée n'est pas la même.

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Si. Les consignes sont les mêmes, que ce soit une gastro-entérite ou un risque de salmonelle. Nous prenons acte de l'information transmise par le fournisseur, qui est traduite sous forme d'affichettes envoyées dans nos magasins pour être affichées.

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La salmonelle provoque d'ailleurs un syndrome gastro-entéritique, et la gastro-entérite peut parfaitement, chez les bébés, entraîner la mort par déshydratation – c'est un petit docteur qui vous l'affirme.

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C'est le fabricant qui vous a prévenus ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Oui.

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Si vous aviez retiré de vos rayons l'ensemble des produits Lactalis concernés courriez-vous un risque juridique ? En d'autres termes, le fournisseur pouvait-il se retourner contre vous si, au lieu de vous en tenir aux lots dont les numéros vous avaient été communiqués, vous aviez, par principe de précaution, retiré de la vente l'ensemble des produits en provenance de l'usine ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Vous soulevez là un point important, car il touche au devenir des produits. Je pense pour ma part qu'il conviendrait de réfléchir au fait de systématiser et de rendre obligatoire le retrait de l'intégralité des lots d'un produit lorsqu'il s'avère contaminé.

En effet lorsque, au nom d'une application large du principe de précaution, on bloque la mise en rayon d'un EAN – European Article Numbering – c'est-à-dire de tous les produits ayant le même code-barres, on tombe dans un vide juridique, car rien dans les contrats qui lient le distributeur à l'industriel ne précise aujourd'hui qui est responsable économiquement des stocks retirés de la vente. Il serait donc utile de clarifier la situation, pour éviter que soit le distributeur, soit l'industriel ne minimisent le nombre de lots à retirer, pour limiter leurs pertes économiques.

Lorsque l'on a affaire à des germes extrêmement pathogènes, comme la salmonelle ou la listeria, la question ne se pose pas pour nous, et nous avons pris la décision, en accord avec la direction de la qualité, de systématiser le blocage du produit en caisse. Néanmoins, il me paraîtrait souhaitable que votre commission envisage de modifier sur cette question de la responsabilité le cadre légal et réglementaire dans lequel s'inscrivent les contrats entre distributeurs et industriels.

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À quel moment devenez-vous propriétaire du stock ? Au moment où il franchit les portes de votre magasin ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Il nous appartient à partir du moment où il est réceptionné dans nos entrepôts. Il est, dans un premier temps, propriété de la centrale d'achats, qui le redistribue dans un second temps aux différents points de vente, lesquels deviennent alors propriétaires des stocks.

Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'à partir du moment où l'industriel indique à notre service qualité qu'un lot présente des problèmes, il doit en prendre le retour à sa charge ; dès lors donc que le retrait est étendu à l'EAN, l'addition devient plus coûteuse pour lui.

J'ai, après la crise, adopté une position assez radicale au sujet de Lactalis, estimant que, dès lors que l'industriel avait joué avec la santé de nos consommateurs, cette marque ne méritait plus de figurer sur nos linéaires : j'ai eu une entrevue avec M. Emmanuel Besnier, qui souhaitait savoir si ma décision était sans appel. Je lui ai alors fait valoir qu'il n'était pas normal qu'un industriel de son envergure n'ait pas appliqué le principe de précaution et retiré de la vente la totalité de sa production, au lieu de procéder en quatre ou cinq étapes.

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Considérez-vous que les rapports que vous avez eus avec la société Lactalis lors de cette crise ont été plus compliqués qu'avec d'autres fournisseurs en pareil cas ?

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Selon moi, d'autres entreprises auraient eu une autre gestion de la crise et n'auraient pas pris ainsi le risque de la jouer « à la petite semaine ». Il y a des industriels pour lesquels la santé n'a pas de prix : ils auraient pris des mesures beaucoup plus fermes et retiré leurs produits du marché dès la première alerte.

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Je tenais à vous remercier pour la franchise avec laquelle vous avez admis avoir failli en laissant en circulation trois mille boîtes, ce qui ne devrait jamais arriver. Et encore avons-nous échappé au pire, car il n'y a pas eu de morts. Mais imaginons, avec la menace terroriste, la situation dramatique dans laquelle un fou déciderait d'empoisonner une chaîne alimentaire : que ferait-on ? Au-delà de la question du lait maternel, l'objectif de cette commission doit bien d'être que, plus jamais, ne puissent être vendus des produits dont on sait qu'ils sont dangereux, quelle que soit la complexité des circuits de la grande distribution.

En outre, vous êtes les seuls à nous avoir dit que les acteurs de la grande distribution devraient se regrouper et s'organiser pour faire face à de telles situations. Cela m'amène à vous interroger sur le numéro vert. Nous avons découvert au fil de nos auditions que plusieurs numéros verts avaient été activés au cours de la crise : ne vaudrait-il pas mieux qu'il n'y ait qu'un seul numéro vert pour l'ensemble des magasins, ce qui n'est visiblement pas le cas aujourd'hui ?

J'en viens aux cellules de crise, celle de l'État et celles des acteurs privés. Nous allons faire des propositions pour améliorer la cellule de crise de l'État, mais elle a bien fonctionné. L'alerte sanitaire a été donnée très vite et la souche a été isolée, tellement bien isolée d'ailleurs que la France s'est montrée exemplaire par rapport aux autres pays européens. Pour ce qui concerne la distribution – et j'inclus le e-commerce –, pensez-vous que tous les distributeurs pourraient s'entendre ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

En cas d'alerte grave, avec communication à la presse, le fournisseur à l'obligation de mettre un numéro vert à disposition des consommateurs.

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J'entends mais, en règle générale, le consommateur s'adresse plutôt au magasin.

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

C'est pour cela que nous avons mis en place un numéro vert pour les consommateurs mais vous avez raison, nous l'avons fait au nom d'Intermarché.

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Il s'agit bien de plateformes externalisées auprès de prestataires ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Absolument.

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Nous avons été surpris, lors de nos auditions, de constater que les interlocuteurs avec qui les consommateurs sont mis en contact par ces numéros verts travaillent pour des prestataires spécialisés, mais qu'il n'y a pas forcément parmi eux de professionnels de santé. Le numéro vert que vous avez mis en place était-il animé par des professionnels de santé ?

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

La plateforme d'appels avec laquelle nous travaillons habituellement sur les risques consommateurs a été activée dans le cadre de la crise Lactalis. Nous avons communiqué un numéro vert, et les clients possédant une carte de fidélité ont été contactés par ces spécialistes du risque santé sécurité. Il s'agit, en premier ressort, de techniciens, mais, dans un second temps, des médecins peuvent répondre aux inquiétudes des consommateurs.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Vous nous avez demandé si nous estimions le secteur suffisamment mature pour une réflexion collective. J'étais présent lors de la réunion convoquée par M. Le Maire, le 11 décembre. L'état d'esprit, partagé par tous, était d'avancer. Nous étions soumis à une certaine pression, et notre angoisse à tous était qu'un décès survienne. Fort heureusement, nous n'avons pas eu à déplorer de mort – cela aurait donné à votre commission une tout autre dimension. Aucun distributeur ne peut jouer avec la santé des consommateurs, aucune enseigne ne peut échapper à la réflexion et nous ne devons pas attendre la prochaine crise. Le secteur est suffisamment mature pour mener la réflexion. Il existe un syndicat, que vous avez rencontré, auquel adhèrent la plupart des enseignes, exceptés Leclerc et Intermarché ; le jour où vous mettrez en place une commission, nous serons les premiers à être présents, car le sujet est trop important.

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Nous vous remercions d'être venus : il était pour nous essentiel de rencontrer les patrons des enseignes, les « chefs », plutôt que les personnes chargées des relations publiques ; nous entendrons d'ailleurs Emmanuel Besnier prochainement.

Les conséquences auraient pu être gravissimes. C'est la raison pour laquelle nous espérons que les enseignes, même concurrentes, accepteront d'accomplir ensemble les avancées que nous proposerons.

Une telle crise ne doit pas se reproduire. Au-delà de la sécurité alimentaire, c'est la sécurité publique qui est en jeu. Les consommateurs n'ont pas compris que trois semaines après le premier retrait-rappel, les contrôles aient pu détecter des boîtes encore en vente. Cela ne peut se reproduire, surtout avec les menaces qui pèsent sur nous.

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Vous avez dit que vous n'étiez pas sûrs de la composition de votre stock, au regard des lots qui vous avaient été signalés. Dans l'industrie, lorsqu'une incertitude existe sur les produits prêts à être distribués, le lot est bloqué et des tests sont effectués. N'est-il pas plus sage, pour un distributeur, d'appliquer le principe de précaution et de prendre la responsabilité de bloquer les lots d'un fournisseur ? Les lots défectueux seront forcément repris lors des négociations pour reprise de stock.

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Olivier Touzé, directeur de la qualité et du développement durable du groupement Les Mousquetaires

Lorsque l'on sait que le fabricant n'a pas tout à fait maîtrisé le risque, c'est en effet la mesure la plus simple à prendre. Thierry Cotillard l'a expliqué, ce sont des discussions d'ordre contractuel. Certes, la sécurité alimentaire passe avant les contrats, mais nous sommes bien dans cette dualité, où, en tant que vendeurs, il n'est pas si simple d'appliquer le principe de précaution à la place du fournisseur.

Nous devons traiter beaucoup de messages – 487 retraits-rappels l'année dernière. Mais atteindre cinq messages successifs est de l'ordre de l'exceptionnel. La première alerte du 2 décembre, même si elle est tombée un samedi soir, alors que nous étions d'astreinte, était un message classique. C'est à partir du 9 décembre que nous avons commencé à nous poser des questions.

Peut-être faut-il se demander si l'arrêté pris ce jour-là n'aurait pas dû imposer le retrait de l'ensemble des lots ? Dans tous les cas, en tant que directeur de la qualité, je ne peux que souscrire à vos propos.

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On a appris que des boîtes qui avaient été rendues avaient été replacées dans les rayons dans certaines enseignes. Par ailleurs, des boîtes potentiellement contaminées et remisées dans un entrepôt ont été volées il y a un mois en Seine-Maritime.

Disposez-vous de locaux spécifiques pour stocker les produits retirés ? Est-ce une obligation réglementaire ? Qui assure la destruction des lots ?

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Xavier de Fleurac, directeur de la performance des régions d'Intermarché

À ma connaissance, la loi n'oblige pas les magasins à prévoir un local dédié aux retraits-rappels. Selon la configuration des magasins, les produits sont disposés en réserves, dans des endroits définis.

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Il serait logique que de tels locaux existent, pour éviter les erreurs humaines.

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Les lots sont recouverts d'une bande autocollante sur laquelle il est écrit « non conforme ».

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Thierry Cotillard, président d'Intermarché

Je vous rejoins, une norme en la matière ferait sens.

Pour ce qui est de la destruction, le contrat prévoit qu'il revient à l'industriel de récupérer la marchandise non conforme. Les lots rejoignent la base logistique, puis repartent vers l'industriel. La gestion des produits non conformes est à la charge du fournisseur.

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Les responsables d'une enseigne nous ont indiqué qu'elle disposait de locaux spécifiques, fermés à double tour.

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C'est une mesure qui nous paraît fort légitime et qui recueillerait, j'en suis sûr, l'approbation des patrons de magasins.

Messieurs, je vous remercie de votre franchise.

L'audition s'achève à dix-neuf heures.

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Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 30 mai 2018 à 18 heures

Présents. - Mme Séverine Gipson, M. Christian Hutin, M. Didier Le Gac

Excusé. - M. Arnaud Viala