L'article L. 6314-1 du code du travail dispose, en son premier alinéa, que tout travailleur doit pouvoir trouver des formations « correspondant aux besoins de l'économie prévisibles à court ou moyen terme ». C'est à ce type de disposition qu'une vraie réforme du code du travail aurait pu s'attaquer, mais le Gouvernement a préféré affaiblir les salariés par ordonnance, les flexibiliser, les soumettre encore un peu plus à la volonté à court terme d'une partie du patronat. Pourtant, cette injonction est à la fois irréaliste et dogmatique.
Elle est d'abord irréaliste, parce que la prévision des besoins de l'économie est un véritable objet de recherche, une science humaine loin d'être exacte, et que faire porter aux travailleurs la responsabilité d'obtenir une information que des dizaines d'économistes sont incapables d'établir est invraisemblable – même les éminents spécialistes qui ont soutenu et conseillé le candidat Macron se sont beaucoup trompés.
Elle est également dogmatique, car en complet décalage avec ce dont nous avons tous besoin. Cette mention vise en effet à faire croire que le travail n'aurait d'autre raison d'être que de satisfaire des besoins de court et de moyen terme. Pourtant, la définition classique de l'économie est « l'ensemble des activités d'une collectivité humaine relatives à la production, à la distribution et à la consommation des richesses ». En d'autres termes, l'économie est ce que nous en faisons, à savoir, trop souvent, la recherche de profits à court terme.
Nous refusons cette vision du monde où ce serait aux humains de s'adapter à l'économie au bénéfice de quelques-uns, et considérons que l'économie a pour objet de répondre aux missions que nous lui donnons dans l'intérêt du plus grand nombre. Il n'y a pas de main invisible qui, planant au-dessus de nos têtes, nous ferait injonction de nous plier à sa volonté – seuls les libéraux du vieux monde ont encore cette croyance.
Pour notre part, mes chers collègues, nous estimons qu'il faut faire un choix clair en faveur de la réponse aux besoins humains, au respect de la dignité et aux défis posés à la société. Selon nous, la formation professionnelle peut être un moyen d'orienter le fonctionnement de l'économie dans le sens de ce qui participe à l'intérêt général. Nous souhaitons donc remplacer la notion de réponse aux besoins de l'économie à court et moyen terme par celle de réponse aux besoins de la société.