Ce que l'on nomme communément le « pantouflage » est une pratique consistant pour un agent de l'État à aller travailler pour une entreprise privée. Très fréquente chez les hauts fonctionnaires, qui monnayent de cette manière leur connaissance des institutions et des réseaux de prise de décision, elle pose des soucis éthiques et déontologiques évidents et donne très souvent lieu à des conflits d'intérêts.
Pour le haut fonctionnaire sorti de l'ÉNA, travailler pour une entreprise privée présente l'avantage de pouvoir espérer une rémunération bien supérieure. En effet, contrairement à ce que laissent entendre celles et ceux qui veulent briser l'administration publique, les fonctionnaires ne sont pas des privilégiés, nantis d'un statut trop confortable, mais des agents au service de l'intérêt général, qui défendent un service public.
La grille salariale du secteur public a un avantage : elle limite les inégalités entre les agents, tandis que les grilles salariales du secteur privé favorisent souvent les grands cadres et les postes de direction. Pour des agents qualifiés, les perspectives de carrière sont bien meilleures dans le privé ; quand vient le moment où ils sont plus motivés par leur rémunération que par l'intérêt général, ils répondent donc à l'appel des grandes entreprises. Le pantouflage est d'abord et avant tout très profitable à ces entreprises, qui recrutent ainsi des agents qui maîtrisent parfaitement les rouages et les failles potentielles de nos institutions.
Cette pratique présente de graves dangers. D'abord, l'agent peut être tenté de s'attirer les bonnes grâces d'une entreprise par une prise de décision favorable, dans l'espoir d'une récompense sous la forme d'une embauche. Ensuite, grâce au débauchage, les intérêts privés disposent de ressources dont ils ne pourraient bénéficier autrement. Enfin, avec le rétro-pantouflage, c'est-à-dire le retour du haut fonctionnaire dans son administration d'origine, l'entreprise peut profiter d'un interlocuteur privilégié. Avec l'article 63, sous couvert de favoriser la mobilité des fonctionnaires, le Gouvernement facilite en fait cette pratique qui confond les intérêts publics et privés, alors que les fonctionnaires disposent déjà de droits leur permettant de se mettre en retrait de leurs fonctions. Nous demandons donc, par l'amendement AS648, la suppression de l'article 63.